Robert Badinter

homme politique, juriste et essayiste français

Robert Badinter (19282024) est un avocat et homme politique français, ancien garde des sceaux.

Robert Badinter le 3 février 2007 au cours d'une manifestation contre la peine de mort à Paris.

Citations modifier

Discours du 17 septembre 1981 demandant l'abolition de la peine de mort en France modifier

Monsieur le président, mesdames, messieurs les députés, j'ai l'honneur au nom du Gouvernement de la République, de demander à l'Assemblée nationale l'abolition de la peine de mort en France.


La France est grande, non seulement par sa puissance, mais au-delà de sa puissance, par l'éclat des idées, des causes, de la générosité qui l'ont emporté aux moments privilégiés de son histoire.

La France est grande parce qu'elle a été la première en Europe à abolir la torture malgré les esprits précautionneux qui, dans le pays, s'exclamaient à l'époque que, sans la torture, la justice française serait désarmée, que, sans la torture, les bons sujets seraient livrés aux scélérats. La France a été parmi les premiers pays du monde à abolir l'esclavage, ce crime qui déshonore encore l'humanité.

Il se trouve que la France aura été, en dépit de tant d'efforts courageux l'un des derniers pays, presque le dernier - et je baisse la voix pour le dire - en Europe occidentale, dont elle a été si souvent le foyer et le pôle, à abolir la peine de mort.


C'est de France, c'est de cette enceinte souvent, que se sont levées les plus grandes voix, celles qui ont résonné le plus haut et le plus loin dans la conscience humaine, celles qui ont soutenu, avec le plus d'éloquence la cause de l'abolition. Vous avez, fort justement, monsieur Forni, rappelé Hugo, j'y ajouterai, parmi les écrivains, Camus. Comment, dans cette enceinte, ne pas penser aussi à Gambetta, à Clemenceau et surtout au grand Jaurès ? Tous se sont levés. Tous ont soutenu la cause de l'abolition. Alors pourquoi le silence a-t-il persisté et pourquoi n'avons-nous pas aboli ?


"La peine de mort est contraire à ce que l'humanité depuis deux mille ans a pensé de plus haut et rêve de plus noble. Elle est contraire à la fois à l'esprit du christianisme et à l'esprit de la Révolution."
  • Phrase de Jean Jaurès citée par Badinter dans son discours.


Utiliser contre les terroristes la peine de mort, c'est, pour une démocratie, faire sienne les valeurs de ces derniers.


Je suis convaincu - cela vous fera plaisir - d'avoir certes moins d'éloquence que Briand mais je suis sûr que, vous, vous aurez plus de courage et c'est cela qui compte.


Nul plus que vous, à l'instant du vote sur l'abolition, ne respectera la loi fondamentale de la démocratie.


Rien n'a été fait pendant les années écoulées pour éclairer cette opinion publique. Au contraire ! On a refusé l'expérience des pays abolitionnistes ; on ne s'est jamais interrogé sur le fait essentiel que les grandes démocraties occidentales, nos proches, nos sœurs, nos voisines, pouvaient vivre sans la peine de mort. On a négligé les études conduites par toutes les grandes organisations internationales, tels le Conseil de l'Europe, le Parlement européen, les Nations unies elles-mêmes dans le cadre du comité d'études contre le crime. On a occulté leurs constantes conclusions. Il n'a jamais, jamais été établi une corrélation quelconque entre la présence ou l'absence de la peine de mort dans une législation pénale et la courbe de la criminalité sanglante. On a, par contre, au lieu de révéler et de souligner ces évidences, entretenu l'angoisse, stimulé la peur, favorisé la confusion.


Proposition de loi relative à l'édification d'un monument au mont Valérien portant le nom des résistants et des otages fusillés dans les lieux de 1940 à 1944, 16 octobre 1997 modifier

Deux ans après que la France eut commémoré le cinquantenaire de l'armistice de 1945 et célébré le souvenir de celles et ceux qui ont fait le sacrifice de leur vie pour la libération de notre pays, le devoir de mémoire à l'égard de ces combattants de la liberté demeure toujours aussi fort. Force est, en effet, de constater avec l'historien Pierre Nora ("Les lieux de mémoire") que "la mémoire est la vie, toujours portée par les groupes vivants et à ce titre, elle est en évolution permanente, ouverte à la dialectique du souvenir et de l'amnésie, inconsciente de ses déformations successives, vulnérable à toutes les utilisations et manipulations, susceptible de longues latences et de soudaines revitalisations".
  • « Rapport n° 40 - Proposition de loi relative à l'édification d'un monument au mont Valérien portant le nom des résistants et des otages fusillés dans les lieux de 1940 à 1944 », Robert Badinter, Sénat, déposé le 16 octobre 1997 (lire en ligne)


Projet de loi constitutionnelle relatif à l'interdiction de la peine de mort, déposé le 31 janvier 2007 modifier

La révision constitutionnelle est la consécration de l'œuvre engagée dans notre pays par l'abolition, voulue par le Président François Mitterrand, le 9 octobre 1981, de la peine de mort et confortée ensuite par les engagements internationaux souscrits par notre pays. Elle réalise ainsi le voeu de Victor Hugo « L'abolition pure, simple et définitive ».
  • « Projet de loi constitutionnelle relatif à l'interdiction de la peine de mort - Rapport n° 195 (2006-2007) », Robert Badinter, Sénat, 31 janvier 2007 (lire en ligne)


La justice peut disposer de la liberté, de la fortune, de l'honneur d'un homme qui a violé la loi, pourvu qu'elle observe rigoureusement toutes les garanties du procès équitable. Mais sa puissance s'arrête à l'intégrité physique de celui qu'elle condamne. Parce que nul ne saurait légitimement priver un homme ou une femme de ce qui le constitue en être humain, sa vie même. Et cette exigence première vaut pour toute l'humanité.
  • « Projet de loi constitutionnelle relatif à l'interdiction de la peine de mort - Rapport n° 195 (2006-2007) », Robert Badinter, Sénat, 31 janvier 2007 (lire en ligne)


L'Europe est aujourd'hui une zone libérée de la peine capitale.
  • « Projet de loi constitutionnelle relatif à l'interdiction de la peine de mort - Rapport n° 195 (2006-2007) », Robert Badinter, Sénat, 31 janvier 2007 (lire en ligne)


La dynamique européenne s'inscrit dans un mouvement plus large qui la comprend et la dépasse : l'abolition a connu une irrésistible progression à travers le monde. Ce mouvement, comme en Europe, influence le droit international dont, en retour, les évolutions confortent l'abolitionnisme et lui donnent les assises nécessaires pour connaître un rayonnement encore plus grand.
  • « Projet de loi constitutionnelle relatif à l'interdiction de la peine de mort - Rapport n° 195 (2006-2007) », Robert Badinter, Sénat, 31 janvier 2007 (lire en ligne)


Rapport d'information L'Union européenne et les droits de l'homme, Sénat, commission des lois, 4 mars 2009 modifier

Pour ceux qui ont foi dans les droits de l'Homme, il est nécessaire de toujours prendre en considération deux caractères sans lesquels les droits de l'Homme ne sont pas respectés : leur universalité et leur indivisibilité.

Leur caractère universel signifie que les droits de l'Homme concernent « tout homme », c'est-à-dire tout être humain. Comme le soulignait le grand juriste René Cassin, principal initiateur et rédacteur de la Déclaration Universelle, il s'agit de « protéger tout homme et protéger les droits de tous les hommes. »

Sur le caractère indivisible, il faut souligner que si les droits élémentaires de la personne humaine ne sont pas garantis dans l'ordre économique et social, on ne peut pas parler véritablement de respect des droits de l'Homme.
  • Rapport d'information n° 246 (2008-2009) de M. Robert BADINTER , fait au nom de la commission des affaires européennes, déposé le 4 mars 2009
  • « L'Union européenne et les droits de l'homme », Robert Badinter, Sénat, 4 mars 2009 (lire en ligne)


Nous sommes en grand péril environnemental, notamment pour l'eau, qui constitue un problème qui n'est pas suffisamment perçu et qui est pourtant essentiel.
  • Rapport d'information n° 246 (2008-2009) de M. Robert BADINTER , fait au nom de la commission des affaires européennes, déposé le 4 mars 2009
  • « L'Union européenne et les droits de l'homme », Robert Badinter, Sénat, 4 mars 2009 (lire en ligne)


La diversité culturelle ou la souveraineté ne saurait justifier que l'on porte atteinte à ce qui constitue les droits fondamentaux de tout être humain.
  • Rapport d'information n° 246 (2008-2009) de M. Robert BADINTER , fait au nom de la commission des affaires européennes, déposé le 4 mars 2009
  • « L'Union européenne et les droits de l'homme », Robert Badinter, Sénat, 4 mars 2009 (lire en ligne)


Entretiens modifier

Le débat a été vif. Il y eut des orateurs éloquents parmi les abolitionnistes : Raymond Forni (Parti socialiste - PS), Guy Ducoloné (Parti communiste - PC), Philippe Seguin (Rassemblement pour la République - RPR), parmi d’autres. L’abolition a été votée par la totalité des députés de gauche, par un tiers des députés de l’Union pour la démocratie française (UDF) et un quart du RPR, dont Jacques Chirac. La vraie surprise et la vraie victoire parlementaire, à mes yeux, ont été le vote de la loi par le Sénat, très hostile au gouvernement de la gauche, dans les mêmes termes que l’Assemblée nationale.
  • Sur les débats parlementaires concernant l'abolition de la peine de mort en France.
  • « Questions à Robert Badinter », Robert Badinter, site Vie publique, 17 septembre 2020 (lire en ligne)


En ce qui concerne le reste du monde, la cause de l’abolition a grandement progressé depuis 20 ans. En 1981, la France était le 36e État à abolir la peine de mort. Aujourd’hui, 108 États sont abolitionnistes sur 189 que comptent les Nations unies. L’abolition est devenue majoritaire dans le monde. Aujourd’hui, 90% des exécutions dans le monde sont le fait de quatre États : la Chine, les États-Unis, l’Arabie saoudite et l’Iran. L’alliance entre totalitarisme, fanatisme et peine de mort est historique.
  • Au sujet de l'état du débat mondial sur l'abolition de la peine de mort.
  • « Questions à Robert Badinter », Robert Badinter, site Vie publique, 17 septembre 2020 (lire en ligne)


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