Alain Vircondelet

universitaire, écrivain et plasticien

Alain Vircondelet, né en 1947 à Alger (Algérie), est un universitaire, écrivain et biographe français.

Alain Vircondelet

Citations d'Alain Vircondelet modifier

Saint Exupéry dans la guerre. Légendes et vérités, 2018 modifier

On le voit à Tunis, à Sidi Bou-Saïd, à Alger, à Bastia et toujours porté par une véhémence spirituelle qui frappe ses interlocuteurs. Le général Chambe auquel il s’est longuement confié notamment par lettres, rapporte sa dernière entrevue avec lui dans une oasis tunisienne. Il y est encore question de la civilisation, il s’explique sur son désir profond, exigeant, impérieux de ne pas céder aux sirènes de la fausse modernité, préférant la civilisation de Du Bellay à celle du téléphone. Il s’avoue lui-même un de ces êtres qui ne trouve pas sa place dans tout ce que le « progrès imbécile » a « fabriqué ».

  • Saint Exupéry dans la guerre. Légendes et vérités, Alain Vircondelet, éd. Editions du Rocher, 2018  (ISBN 978-2-268-09667-4), p. 212


Au cours des années qui suivirent la guerre, les milieux influents réglèrent ainsi son compte à Saint Exupéry. Il paya ses prises de position politiques et son rejet du gaullisme pourtant constamment argumenté, ses critiques fondées sur les intellectuels parisiens qui transportèrent leur existence mondaine à Manhattan tout en donnant des leçons de résistance, son dégoût public d’une société à venir, fondée sur le matérialisme et l’argent, sa détresse face à la perte du spirituel. Pour ces raisons on le renvoya au siècle qui venait, croyait-on, de s’achever avec la dernière guerre : délibérément, il était de l’ancien monde, celui que Zweig avait rassemblé sous le terme de « monde d’hier ». Saint Exupéry était donc « d’hier » et non de ce lendemain de la guerre à bâtir et dans lequel tous ceux que Saint Exupéry avait désignés comme de « faux résistants » étaient devenus les acteurs.

  • Saint Exupéry dans la guerre. Légendes et vérités, Alain Vircondelet, éd. Editions du Rocher, 2018  (ISBN 978-2-268-09667-4), p. 228


Charles de Foucauld, 1997 modifier

C'est une vie brûlée par Dieu qui se raconte ici. Les circonstances qui ont amené Foucauld au flamboiement mystique qu'aucune béatification n'a encore récompensé sont profondément existentielles : la déraison du père, la quête de la mère morte, les abandons successifs, la tentation érotique, l'appel de l'héroïsme, l'abjection de soi et le désir d'expier l'ont conduit au grand silence du désert.
C'est une histoire ou le deuil apparent n'en annonce pas moins l'émerveillement de la naissance.

  • Charles de Foucauld, Alain Vircondelet, éd. Les éditions du Rocher, 1997  (ISBN 9782268026619), p. 10


Et puis un besoin de pauvreté s'est emparé de lui. Il méprise sa fortune, non pas en termes de reniement des siens mais par son désintérêt même. C'est au-dedans de soi que se trouve la richesse, et il découvre dans la pauvreté des richesses insoupçonnées. C'est qu'elle déplace les désirs et les nécessités, elle donne priorité à ce qu'il sent monter en lui : le dépouillement de soi, l'avènement d'un autre savoir.

  • Charles de Foucauld, Alain Vircondelet, éd. Les éditions du Rocher, 1997  (ISBN 9782268026619), p. 75


Sans le savoir, il apprend l'Évangile des pauvres. La ténacité qu'il déploie dans ce voyage, ce naturel têtu qu'il convertit en patience et en enjeux vont être plus tard les grandes lignes de sa foi : « ne pas plus s'occuper de la santé, ou de la vie, que de l'arbre d'une feuille qui tombe », écrira-t-il. « N'avoir jamais peur de rien », affirmera-t-il toujours.

  • Charles de Foucauld, Alain Vircondelet, éd. Les éditions du Rocher, 1997  (ISBN 9782268026619), p. 83


Depuis quatre années bientôt qu'il les a quittés, son apparence physique aussi a changé. Il n'est plus le jeune lieutenant un peu pataud, mal à l'aise dans son uniforme, adipeux et replet, avec cette mollesse généralisée qui laisse apparaître une sensualité hautaine. À présent, très amaigri, atteint d'une fièvre qui allume ses yeux enfoncés dans leurs orbites, le visage émacié est tanné par le soleil, on pourrait l'imaginer en père blanc, venant d'une communauté de la Mitidja, où en ascète. Ses yeux gardent cette lumière et cette acuité qui le feraient reconnaître entre mille, et son rire fort et sans retenue rappelle seul le Foucauld d'autrefois.

  • Charles de Foucauld, Alain Vircondelet, éd. Les éditions du Rocher, 1997  (ISBN 9782268026619), p. 91


Lentement, à l'exemple de Blaise Pascal, il se resserre, se ramasse sur lui-même, aux yeux du monde il semblerait s'étioler, mais cette raréfaction de lui-même prélude, il le sent bien, à d'inouïes expansions, à des bouleversements intérieurs prodigieux. Il expérimente le refus pascalien du divertissement, celui qui peu à peu le rapproche de l'essentiel. Pour l'heure, cet essentiel a le visage des déserts immenses, l'ampleur des dunes mouvantes, où tout reste à déchiffrer.

  • Charles de Foucauld, Alain Vircondelet, éd. Les éditions du Rocher, 1997  (ISBN 9782268026619), p. 98


L'orient est plus prosaïquement le tremplin de Foucauld, la tension obligée de sa quête, parce qu'en réalité il s'agit de s'approcher d'un autre désert, plus ample et plus solitaire encore, celui où Dieu convoque ses saints, et qui est son retour. Ni esthétique ni désormais agnostique, la marche de Foucauld s'engage vers « Votre œuvre, mon Dieu, Votre œuvre à Vous seul »…

  • Charles de Foucauld, Alain Vircondelet, éd. Les éditions du Rocher, 1997  (ISBN 9782268026619), p. 123


Ce qu'il commence à découvrir, c'est, comme il l'écrira plus tard, que « le danger est en nous et non dans nos ennemis ».

  • Charles de Foucauld, Alain Vircondelet, éd. Les éditions du Rocher, 1997  (ISBN 9782268026619), p. 125


La « folie » aux yeux du monde de Charles de Foucauld commence ici. Sa « folie » et sa passion. Quelque chose d'irréductible, une exigence mystique, une force sourde et aveugle s'empare de lui. Huvelin sait dans le travail qu'il conduit auprès de lui depuis six mois à présent que son intuition ne l'a pas trompé. Foucauld est de la race de ces saints du désert, de ces êtres d'absolu que rien n'arrête, possédé par l'esprit saint d'Assise. Aussi désormais l'encourage-t-il dans la voie ascétique.

  • Charles de Foucauld, Alain Vircondelet, éd. Les éditions du Rocher, 1997  (ISBN 9782268026619), p. 143


Par une géométrie mystique singulière, Foucauld brûlant de passion pour Marie comme pour Dieu, à cause de l'amour impossible, accède à la fusion ne Dieu. Parce que les noces humaines sont irréalisables, il lui sera donné d'aspirer aux noces mystiques. Parce qu'il ne peut pas être époux, il invoquera l'Epoux auquel il se livrera.

  • Charles de Foucauld, Alain Vircondelet, éd. Les éditions du Rocher, 1997  (ISBN 9782268026619), p. 164


La pratique fervente de Foucauld est appliquée avec une ténacité farouche, presque terrifiante. Puisqu'il s'agit d'imiter Jésus dans sa vie rêvée, il ne renonce à rien, construit, s'habitue à ne se fixer que sur les actions et la pensée du Christ. Les lettres qu'il écrit à Marie n'effarouchent pas l'aussi fervente cousine. Au contraire, elle y voit là, dans son veuvage, la preuve que jamais Foucauld ne la quittera, et qu'elle le retrouvera dans cet amour inouï, irrationnel. Leur histoire d'amour, si tant est qu'il y en ait eu une dans l'avoué des mots, prend ici un tour tragique et romanesque. Elle, recluse dans son château, lui, oublié dans sa cabane, des milliers de kilomètres entre eux, et pourtant, tels les héros de Claudel, s'aimant par-delà Dieu et en Dieu, confusément mêlés, dans l'obscure nuit mystique.

  • Charles de Foucauld, Alain Vircondelet, éd. Les éditions du Rocher, 1997  (ISBN 9782268026619), p. 208


Le visage de Foucauld dans ces années-là change de traits. Il s'effile encore, ne possède plus cet air à peine poupin et jovial qu'un cliché de 1900 révèle, un collier de barbe, la moustache dévorent son visage, où n'habitent plus que ses yeux, brillants, vifs et mobiles, insoutenables à ceux qui mentent et trichent. C'est un visage qui absorbe, appelle et interroge. Un regard qui, sans qu'on ne lui demande rien, renvoie à sa propre interrogation, un regard qui confesse.

  • Charles de Foucauld, Alain Vircondelet, éd. Les éditions du Rocher, 1997  (ISBN 9782268026619), p. 251, 252


Presse modifier

J'ai 16 ans et je me souviens de tout, de la beauté d'Alger dans le petit matin de juin, du silence gêné des Algériens que l'on croise sur le quai des Messageries Maritimes, des gens qui pleurent, des enfants qui ont emporté avec eux leurs cages d'oiseaux, des vieilles femmes dans des chaises roulantes, de ces valises achetées en hâte sur les trottoirs de la ville, et dans lesquelles on a fourré le minimum. On ne connaît rien de la France, on sait seulement qu'il y fait plus froid que chez nous.

  • « 1962, les Français d'Algérie quittent leur pays natal », Alain Vircondelet, Huffington Post, 20 février 2012 (lire en ligne)


Louis Joxe, au conseil des ministres du 18 juillet 1962, déclare: « Les Pieds-Noirs vont inoculer le fascisme en France. Dans beaucoup de cas, il n'est pas souhaitable qu'ils retournent en Algérie ni qu'ils s'installent en France. Il vaudrait mieux qu'ils aillent en Argentine ou au Brésil. » De Gaulle et ses ministres approuvent.

  • « 1962, les Français d'Algérie quittent leur pays natal », Alain Vircondelet, Huffington Post, 20 février 2012 (lire en ligne)


Les pieds-noirs possèdent au plus haut point l'art du rebond. Ils ont, rivés au cœur, un courage et une volonté de fer, ils laissent dire en souriant mais n'oublient pas. Fidèles et loyaux à la France quand celle-ci les croyait félons et dangereux terroristes, ils se sont coulés dans le tissu français. On les discerne encore à leur accent qui quelquefois jaillit comme une pointe de lumière. Mais ni le temps qui passe ni les attentions dont ils sont souvent l'objet en période électorale, n'effacent le préjudice dont ils ont été victimes. Et ils se prennent même à rêver en ces temps de repentance, que la vraie, la seule repentance, c'est à eux et à leurs frères harkis que la France devrait l'adresser !

  • « 1962, les Français d'Algérie quittent leur pays natal », Alain Vircondelet, Huffington Post, 20 février 2012 (lire en ligne)

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