Annie Lacroix-Riz, née en 1947, est une historienne et militante marxiste française, professeur émérite d'histoire contemporaine à l'université Paris VII - Denis Diderot.
Ses publications sur la période 1939-1945, notamment au sujet de l'influence des grands intérêts financiers et industriels ont suscité des lectures critiques contrastées. Son recours systématique aux archives et l'importance de ses ouvrages sont appréciées. Cependant, plusieurs historiens contemporanéistes ont remis en cause sa méthodologie historique d'Annie Lacroix-Riz et lui reprochent d'appliquer dans ses ouvrages une grille de lecture qui subordonne la déduction à ses postulats de départ, certains lui reprochant d'être tentée par la théorie du complot de la « Synarchie », d'autres évoquant un parti pris anticapitaliste.
Il y a soixante ans, 57 % des Français considéraient l’URSS comme le principal vainqueur de la guerre. En 2004, ils n’étaient plus que 20 %. Amplifié par les médias, cet oubli progressif du rôle de Moscou tient aussi aux polémiques sur la politique de Staline entre 1939 et juin 1941, que des travaux historiques récents éclairent d’un jour nouveau. Mais, quoi qu’on pense du pacte germano-soviétique, comment nier que, trois ans durant, les Russes ont porté une grande partie de la résistance, puis de la contre-offensive face à la Wehrmacht ? Au prix de 20 millions de morts. [...] Si, en 1917-1918, le Reich fut défait à l’Ouest, et surtout par l’armée française, de 1943 à 1945, il le fut à l’Est et par l’Armée rouge.
Le grand capital français n'a pas collaboré parce qu'il a été vaincu, il a été vaincu, en s'y prêtant activement, parce qu'il avait choisi de collaborer sans réserves dans des conditions d'inégalité très profonde. La collaboration de 1940 à 1944 a été, comme la Défaite elle-même, une conséquence directe de la collaboration des années 1920-1940, dont j'ai montré les étapes dans l'ouvrage Le choix de la défaite. Il s'agit d'une coopération dans tous les domaines, commercial (cartels compris), financier, et politico-idéologique.
C'est le grand capital qui règle le sort de la France comme le sort de tous les pays européens. La concentration de capital et l'élévation consécutive de la composition organique du capital qui en résulte ont pour conséquence la baisse du taux de profit. Le grand capital est donc conduit à une guerre des salaires permanente, prévue d'emblée par les hauts fonctionnaires : ceux-ci ont annoncé, dès mai 1950, le « dumping social » d'aujourd'hui (en utilisant l'expression même), c'est-à-dire la baisse des salaires permanente.
Affaire idéologique ? Non, gigantesque dossier économique. L'Ukraine, brûlot russo-allemand avant 1914, où le Reich finançait déjà le mouvement "autonomiste", fut un des enjeux majeurs de la première Guerre mondiale : "L'Ukraine indépendante devait être une succursale économique et politique de l'Allemagne.
Aux origine du carcan européen (1900-1960), Annie Lacroix-Riz, éd. Les temps des cerises - éditions delga, 2014, p. 182
La perspective de piller ce trésor, en taillant en pièces l'empire russe, puis l'URSS, fit dans l'entre-deux-guerres, s'entre-déchirer tous les impérialistes, l'américain compris.
Aux origine du carcan européen (1900-1960) (1930), Annie Lacroix-Riz, éd. Les temps des cerises - éditions delga, 2014, p. 182
Depuis le dernier tiers du XXe siècle, Annie Lacroix-Riz poursuit avec persévérance un combat que je considère personnellement comme méritoire et nécessaire, contre les tentatives inlassablement réitérées d’exempter la grande bourgeoisie française de son essentielle responsabilité politique et morale dans la collaboration avec le nazisme, après la défaite de 1940.
« Critique de livre par Claude Mazauric. La (grande) bourgeoisie et l'inavouable collaboration », Claude Mazauric, L'Humanité, 3 octobre 2012 (lire en ligne)
Madame Lacroix-Riz semble plus portée à blâmer qu'à analyser. Elle est visiblement attirée par la thèse du complot. Elle revient au vieil épouvantail de la «Synarchie», contredisant par ces histoires de sociétés secrètes ses propres remarques très pertinentes sur la logique marchande à court terme.
« Interview. «Un problème de sources». Robert Paxton ne partage pas la thèse d'Annie Lacroix-Riz », Robert Paxton (propos recueillis par Annette Levy-Willard), Libération, 18 mars 1997 (lire en ligne)