Benoîte Groult

écrivaine française

Benoîte Groult (née le 31 janvier 1920 à Paris et morte le 20 juin 2016 à Hyères) est une journaliste, écrivaine et militante féministe française.

Benoîte Groult (2010).

Ainsi soit-elle modifier

Car le féminisme ne se résume pas à une revendication de justice, parfois rageuse, ni à telle ou telle manifestation scandaleuse ; c'est aussi la promesse, ou du moins l'espoir, d'un monde différent qui pourrait être meilleur.
  • Ainsi soit-elle, Benoîte Groult, éd. Grasset, 1975, p. 75-78
Tu as tout ce qu'il te faut, Breton ! Ton petit chapeau, ton petit costume,ton petit biniou. [...] Toi aussi Femme, tu as tout ce qu'il te faut : ton petit mari, tes petites robes, ton petit balai...
  • Ainsi soit-elle (1975), Benoite GROULT, éd. Grasset, 2000, p. 46
La mulier aussi est sapiens.
  • Ainsi soit-elle, Benoîte Groult, éd. Grasset, 2000, p. 55


La Touche étoile modifier

Une fois que la mort a posé sa griffe sur toi, elle ne te lâchera plus. Au fond de toi, en silence, elle va s'installer comme un taret. Ta chair va entamer sa dégradation à pas imperceptibles. Des organes que tu ne connaissais ni d'Ève ni d'Adam vont t'imposer leurs caprices. Ta grâce va devenir un effort, ta beauté une conquête, ta démarche un tour de force, l'insouciance une discipline, la santé une forteresse assiégée et l'inquiétude une compagne lancinante.
  • La Touche étoile, Benoîte Groult, éd. Le Livre de Poche, 2006, p. 10


Eux, les vieux, cumulent tous les âges de la vie. Tous ceux qu'ils ont été cohabitent, sans compter ceux qu'ils auraient pu être et qui s'obstinent à venir empoisonner le présent avec leurs regrets ou leur amertume.
  • La Touche étoile, Benoîte Groult, éd. Le Livre de Poche, 2006, p. 13


Les mots aussi nous ont été confisqués. Plus personne n'est moribond, quelle indécence ! On ne meurt plus de nos jours : on s'endort dans la paix du Seigneur ou bien on décède. Expirer évoque trop le dernier souffle. À éviter. Rendre l'âme est démodé maintenant qu'on n'est pas sûr d'avoir une âme... Trépasser paraît trop littéraire, alors qu'on peut dire décès en toute indifférence tant le mot a été vidé de tout pouvoir émotionnel par les administrations qui l'emploient. Dire « Ma mère est décédée hier » fait nettement moins mal que « Maman est morte ».
  • La Touche étoile, Benoîte Groult, éd. Le Livre de Poche, 2006, p. 22-23


Que se passerait-il si je faisais encore l'amour avec Adrien ? Il enlèverait ses prothèses dentaires et ne pourrait plus me mordre. J'enlèverais mes prothèses auditives et ne pourrais plus entendre ses mots d'amour (si on les garde, ça siffle quand on vous prend la tête entre les mains […]), nous pousserions de petits gloussements que l'autre prendrait pour des cris d'extase alors qu'ils traduiraient une sciatique, une crampe ou quelque difficulté à faire progresser un outil périmé dans un conduit désaffecté. Je lui crierais : « Mais tu m'as mis quelque chose de rouillé, Adrien ! Ôte-moi ça, s'il te plaît ! »
  • La Touche étoile, Benoîte Groult, éd. Le Livre de Poche, 2006, p. 29


[Les femmes d'aujourd'hui] sont des stakhanovistes : amour et amours, indépendance financière et morale, culture et amitié, un ou deux sports, un ou deux amants, un ou deux enfants...et tout cela sans les facilités dont nous, les bourgeoises d'avant 68, disposions. Et j'oubliais que nous disposions aussi des grands-mères d'antan, disponibles à la demande pour les jeudis, les week-ends, et les grandes vacances, des grand-mères qui savaient faire les œufs à la neige, le riz au lait et la mousse au chocolat au lieu de les acheter en barquettes. Des grand-mères qui sentaient modestement la violette et pas Opium de Saint Laurent... Des grand-mères sui generis qui ne portaient pas de short et ne partaient pas en Égypte pour Noël avec leurs « copines ». […] La pauvre Amélie, elle, a dû inscrire son embryon en crèche dès le troisième mois de gestation et jongler avec les horaires de garderies, les grèves des écoles, les baby-sitters qui partent plus souvent qu'elles n'arrivent, sans oublier les exigences croissantes de nos petits messieurs-dames de cette fin de siècle.
  • La Touche étoile, Benoîte Groult, éd. Le Livre de Poche, 2006, p. 108-109


C'était un boulot à plein temps de vieillir. Et rien que pour empirer un peu chaque jour, ça coûtait très cher !
  • La Touche étoile, Benoîte Groult, éd. Le Livre de Poche, 2006, p. 120


Les jeunes enfants sont terrorisés par l'idée de la mort. Par leur naissance, ils sont encore proches du néant et je suis convaincue que dans le ventre maternel déjà ils éprouvent des terreurs inimaginables. […] En réalité, les enfants hurlent à la mort. Ils sont des vivants de fraîche date, et n'ont pas eu le temps d'oublier leur état antérieur. [...] Les enfants sont des morts de la veille et les vieillards des morts du lendemain.
  • La Touche étoile, Benoîte Groult, éd. Le Livre de Poche, 2006, p. 123


Jamais ne sera écrite la généalogie véritable de chaque humain, tissée de détours inouïs, fruit des hasards, des caprices ou des passions.
  • La Touche étoile, Benoîte Groult, éd. Le Livre de Poche, 2006, p. 132


Chez les vieux […], c'est la démarche qui trahit la première. Plus aucun ne marche selon les lois de la nature. Ils se déplacent, certes, mais à l'intérieur ça couine. Plus rien ne va de soi ; il faut sans cesse s'ajuster au terrain, compenser, tricher, avec l'espoir de tromper son monde. […] Penser à ce qu'il faut mettre en jeu pour marcher, ce n'est plus marcher, c'est se déplacer d'un point à un autre. Et rappelle-toi qu'un jour, même ça, ça paraîtra miraculeux. En attendant, il faut réfléchir au pas suivant et coordonner ses efforts comme le fait le petit enfant. […] Quand la marche ne va plus de soi, c'est un peu de l'harmonie du monde qui est remise en cause. Nous devenons des échafaudages improbables où la défection d'un seul boulon suffit à compromettre tout l'édifice.
  • La Touche étoile, Benoîte Groult, éd. Le Livre de Poche, 2006, p. 138-139


Quand on s'éloigne d'une côte en bateau, on la découvre soudain différemment. Les criques, les caps, les plages forment peu à peu un ensemble qui n'est pas la somme de ses composantes. L'âge aussi est une manière de s'éloigner : on commence à percevoir sa vie comme un tout, qui n'est pas forcément la juxtaposition des événements qui l'ont constituée.
  • La Touche étoile, Benoîte Groult, éd. Le Livre de Poche, 2006, p. 155


Si on y pense, nous sommes une insulte à la perfection de l'univers et jamais plus la septuagénaire que je suis ne marchera comme Vénus parmi les vagues.
  • La Touche étoile, Benoîte Groult, éd. Le Livre de Poche, 2006, p. 188


On a toujours tort de donner deux raisons : c'est qu'aucune n'est la bonne.
  • La Touche étoile, Benoîte Groult, éd. Le Livre de Poche, 2006, p. 190


La mort des parents ne devient définitive que le jour où leurs enfants ne sont plus là pour les évoquer.
  • La Touche étoile, Benoîte Groult, éd. Le Livre de Poche, 2006, p. 198


Un lifting, c'est fait pour l'aventure en général, pour un amant à la rigueur, mais avant tout c'est fait contre. Contre l'âge qu'on a. Quel qu'il soit !
  • La Touche étoile, Benoîte Groult, éd. Le Livre de Poche, 2006, p. 200-201


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