Despote

héritier putatif d'un empereur ou d'un notable

Le despote est un terme qui qualifie aujourd'hui quelqu'un de « souverain tyrannique », prenant des décisions arbitraires sans tenir compte de l'avis d'autrui. Une telle personne possède un pouvoir absolu sur ceux qu'elle dirige.

Enseignement

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Cours d'histoire philosophique de la pensée

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Michel Foucault, Les Anormaux — Cours au Collège de France, 1974-1975

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[...] après tout, qu'est-ce que c'est qu'un criminel ? Un criminel est celui donc qui rompt le pacte, qui rompt le pacte de temps en temps, quand il en a besoin ou envie, lorsque son intérêt le commande, lorsque dans un moment de violence ou d'aveuglement il fait prévaloir la raison de son intérêt, en dépit, du calcul le plus élémentaire de la raison. Despote transitoire, despote par éclair, despote par aveuglement, par fantaisie, par fureur, peu importe. Le despote, lui, à la différence du criminel, fait valoir la prédominance de son intérêt et de sa volonté ; il la fait prévaloir de façon permanente. C'est par statut que le despote est un criminel, alors que c'est par accident que le criminel est un despote.


C'est par un état de violence permanente que le despote peut faire valoir sa volonté sur le corps social tout entier. Le despote est donc celui qui exerce en permanence — hors statut et hors la loi, mais d'une manière qui est complètement intriquée dans son existence même — et qui fait valoir d'une façon criminelle son intérêt. C'est le hors-la-loi permanent, c'est l'individu sans lien social. Le despote est l'homme seul. Le despote est celui qui, par son existence même et par sa seule existence, effectue le crime maximum, le crime par excellence, celui de la rupture totale du pacte social par lequel le corps même de la société doit pouvoir exister et se maintenir. Le despote est celui dont l'existence fait corps avec le crime, dont la nature est donc identique à une contre-nature. C'est l'individu qui fait valoir sa violence, ses caprices, sa non-raison, comme loi générale ou comme raison d'État. C'est-à-dire que, au sens strict, depuis sa naissance jusqu'à la mort, en tout cas pendant tout l'exercice de son pouvoir despotique, le roi — ou en tout cas le roi tyrannique — est tout simplement un monstre. Le premier monstre juridique que l'on voit apparaître, se dessiner dans le nouveau régime de l'économie du pouvoir de punir, le premier monstre qui apparaît, le premier monstre repéré et qualifié, ce n'est pas l'assassin, ce n'est pas le violateur, ce n'est pas celui qui brise les lois de la nature ; c'est celui qui brise le pacte social fondamental. Le premier monstre, c'est le roi. C'est le roi qui est, je crois, le grand modèle général à partir duquel dériveront historiquement, par toute une série de déplacements et de transformations successives, les innombrables petits monstres qui vont peupler la psychiatrie et la psychiatrie légale du XIXe siècle.


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