George Marshall

écologiste et écrivain britannique

George Marshall, né en 1964, est un militant écologiste et écrivain britannique. Il est spécialiste de la communication sur le climat.

Citations

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Le syndrome de l'autruche, 2017

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Les leçons à en tirer concernant le changement climatique sont claires. Premièrement, des données scientifiques rationnelles n'ont pas forcément le dessus sur un récit convaincant qui s'écrit dans le registre de l'émotion, et dans lequel les gens retrouvent leurs valeurs fondamentales. Comme je l'explique plus loin, ces perceptions culturelles deviennent extrêmement fortes et ne peuvent être écartées par de nouveaux arguments scientifiques.

Deuxièmement, les informations communiquées par notre famille, nos amis et ceux qui, à nos yeux, nous ressemblent (nos pairs) peuvent avoir bien plus d'influence sur nos opinions que les sonnettes d'alarme tirées par les experts.

Troisièmement, les comportements adoptés face au dérèglement climatique s'inscrivent dans une matrice plus large de valeurs, de politiques et de modes de vie. Ainsi, tout comme Dan Kahan, Tony Leiserowitz et quelques autres chercheurs de Yale affirment qu'il existe des « communautés d'interprétation » reconnaissables, des groupes qui croient ou ne croient pas au changement climatique.
  • Le syndrome de l'autruche, George Marshall, éd. Actes Sud, 2017  (ISBN 9782330091125), p. 59


Lorsque nous interprétons la norme sociale de manière erronée, nous pouvons être amenés à réprimer nos propres idées, creusant davantage l'écart et renforçant le faux consensus - et, si l'on pousse cette situation à l'extrême, créant une société dans laquelle la majorité reste silencieuse parce quelle craint d'être en minorité. Ce phénomène, appelé ignorance pluraliste, permet de comprendre la polarisation extrême autour de marqueurs d'identité politique clés comme l'avortement, le contrôle des armes à feu et, de plus en plus, le changement climatique.
  • Le syndrome de l'autruche, George Marshall, éd. Actes Sud, 2017  (ISBN 9782330091125), p. 66


Ainsi, ceux qui défendent l'adoption de mesures pour lutter contre le changement climatique doivent faire tout leur possible pour parler aux deux cerveaux. Ils doivent accumuler suffisamment de données et de preuves pour montrer au cerveau rationnel qu'ils sont une source crédible, tout en les transformant pour leur donner une forme qui soit attrayante et stimulante pour le cerveau émotionnel, à l'aide d'outils d'immédiateté, de proximité, de sens social, de narration et de métaphores qui puisent dans notre expérience. Chaque campagne de communication sur le changement climatique, de l'Académie nationale des sciences à la manifestation devant une centrale électrique (l'action directe), est une expérience de plus dans I'alchimie visant à transformer des données brutes en or émotionnel.
  • Le syndrome de l'autruche, George Marshall, éd. Actes Sud, 2017  (ISBN 9782330091125), p. 100


Premièrement, le changement climatique manque de poids - ce qu'il veut dire par là, c'est qu'il n'a pas les qualités qui le signalent comme quelque chose d'important ou digne d'attention. Tout comme Daniel Gilbert, Kahneman pense que les menaces pesant le plus dans la balance sont celles qui sont concrètes, immédiates et irréfutables, par exemple une voiture dont le conducteur aurait perdu le contrôle et qui se dirige droit sur vous. En comparaison, le changement climatique est, dit-il, abstrait, distant, invisible et contesté.

Le deuxième problème, c'est que chercher des solutions au changement climatique implique d'accepter certains coûts et certaines baisses à court terme du niveau de vie, afin de réduire des pertes plus importantes mais incertaines, qui se manifesteront peut-être dans longtemps. C'est un mélange qui, il en a bien peur, est extraordinairement difficile à accepter.

Le troisième, c'est que les informations sur le changement climatique ont l'air incertaines et contestées. Aussi longtemps que ce sera le cas, « les gens le verront comme un match nul, même sil y a d'un côté l'Académie nationale et de l'autre une poignée d'hurluberlus ».
  • Le syndrome de l'autruche, George Marshall, éd. Actes Sud, 2017  (ISBN 9782330091125), p. 109


Des études ont également montré que nous donnons la priorité au court terme sur le long terme et que nous actualisons l'avenir– dans le sens économique de l'actualisation. [...] On peut appliquer ces études au changement climatique : elles confirment, comme le craint Kahneman, que les gens sont disposés à éviter une diminution à court terme de leur niveau de vie et à prendre le risque de payer les coûts potentiellement supérieurs mais incertains qui pourraient apparaitre à plus long terme.
  • Le syndrome de l'autruche, George Marshall, éd. Actes Sud, 2017  (ISBN 9782330091125), p. 123


[Le changement climatique] ne nous fournit aucun trait distinctif qui nous permettrait de lui donner une identité claire : pas d'échéances, pas de lieu précis, pas de cause unique, pas de solution, pas d'ennemi. Notre cerveau, sans cesse en quête des codes nécessaires pour analyser et catégoriser les informations, n'en trouve aucun, et nous nous retrouvons livrés à nous-mêmes. Mais nous avons besoin de ces codes (nous ne pouvons rien sans eux), c'est pourquoi nous créons et imposons les nôtres. C'est une situation dangereuse, la porte est ainsi grande ouverte aux interprétations erro nées, au biais de confirmation et à la possibilité pour nous de croire ce que nous avons envie de croire.
  • Le syndrome de l'autruche, George Marshall, éd. Actes Sud, 2017  (ISBN 9782330091125), p. 169


Le changement climatique ne s'inscrit dans aucune structure de cause à effet parce qu'on ne sait jamais vraiment si ce que l'on examine en est la cause réelle, ou une cause créée par la manière choisie pour définir le problème. Avons-nous du mal à accepter le changement climatique parce qu'il se situe dans le futur, ou avons-nous choisi de l'y placer pour le rendre difficile à accepter ? Le changement climatique est-il réellement incertain, ou choisissons-nous de l'expliquer ainsi ? Les solutions sont-elles trop compliquées à mettre en œuvre, ou est-ce simplement de cette façon que nous les décrivons ?
  • Le syndrome de l'autruche, George Marshall, éd. Actes Sud, 2017  (ISBN 9782330091125), p. 173


Les histoires les plus convaincantes sur le changement climatique ont la structure suivante : les gouvernements (coupables) justifient les taxes sur les émissions de carbone (effet) afin de renforcer leur contrôle sur nos vies (mobile). Les milliardaires de droite qui se sont enrichis grâce au pétrole (coupables) financent le déni collectif de l'existence du changement climatique (effet) pour s'enrichir davantage (mobile). C'est pourquoi il est très difficile pour un récit peu engageant, fondé sur des faits, d'entrer en concurrence avec une histoire convaincante bâtie sur un mensonge. « Avec toutes les preuves en main, la plupart des scientifiques en concluent que nos émissions dégradent le climat » est une réalité malheureusement moins tentante que : « Des escrocs scientifiques complotent pour fabriquer de fausses preuves afin d'obtenir de plus grosses bourses de recherche. »
  • Le syndrome de l'autruche, George Marshall, éd. Actes Sud, 2017  (ISBN 9782330091125), p. 188-189


Le changement climatique est une question complexe et technique, alimentée par les théories, les données et les prévisions de scientifiques spécialisés. Le problème n'est pas simplement que les scientifiques insistent sur I'incertitude ou utilisent des abstractions obscures, mais qu'ils dépouillent souvent cette problématique des images, histoires et métaphores qui pourraient stimuler notre cerveau émotionnel et nous pousser à agir.
  • Le syndrome de l'autruche, George Marshall, éd. Actes Sud, 2017  (ISBN 9782330091125), p. 213


Ces précédents [traités internationaux] restreignent le changement climatique à une série limitée de perspectives qui excluent entièrement d'autres approches du problème. Ils définissent le changement climatique comme une question environnementale, ce qui exclut de le considérer comme une question de ressources, d'énergie, d'économie, de santé ou de droits sociaux. Ils déterminent que la meilleure solution pour le gérer est l'échange des droits d'émission, ce qui exclut d'envisager des solutions en lien avec la réglementation, I'imposition de taxes ou le rationnement.
  • Le syndrome de l'autruche, George Marshall, éd. Actes Sud, 2017  (ISBN 9782330091125), p. 288


Il est bien plus difficile aujourd'hui de clamer notre innocence, alors que nous savons pertinemment que nos actions sont nuisibles. Si le changement climatique devient un acte délibérément préjudiciable à partir du moment où l'on sait qu'on en est la cause, est-ce si surprenant que la plupart des gens fassent tout leur possible pour éviter d'en savoir plus où d'accepter son existence ?
  • Le syndrome de l'autruche, George Marshall, éd. Actes Sud, 2017  (ISBN 9782330091125), p. 315


Les histoires que nous [...] mobilisons pour justifier nos voyages personnels [en avion] sont aussi semblables à celles que les toxicomanes inventent au sujet de leur dépendance : j'en ai besoin, je ne fais de mal à personne, tous les autres le font, je l'ai bien mérité, je peux m'arrêter à tout moment, d'autres font bien pire.
  • Le syndrome de l'autruche, George Marshall, éd. Actes Sud, 2017  (ISBN 9782330091125), p. 341


Soulignons le maigre engagement des religions sur la question du changement climatique. Par le passé, les mouvements de justice sociale, des campagnes contre l'esclavage à celles pour les droits civiques, contre l'apartheid, la dette et la pauvreté, ont pris leur essor dans les réseaux formés par des Églises.
  • Le syndrome de l'autruche, George Marshall, éd. Actes Sud, 2017  (ISBN 9782330091125), p. 362


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