Voici Noël dans les planètes !
Loups à la montagne et vents à la mer...
À travers ton ombre, ô Tempête
Nous pendrons l'Étoile au front de l'hiver.
- Chant de Noël de l'abbé Chichambre.
L'Âne Culotte (1937), Henri Bosco, éd. Gallimard, coll. « Folio Junior édition spéciale », 1988, p. 11
Soyez bons pour l'Âne Culotte.
L'Âne Culotte (1937), Henri Bosco, éd. Gallimard, coll. « Folio Junior édition spéciale », 1988, p. 14
Cette estime qu'on lui témoignait et dont à part soi il faisait certainement ses délices, il était menacé de la perdre dès les premiers froids de décembre. Car alors cet âne parfait portait des pantalons.
- Au sujet de l'Âne Culotte.
L'Âne Culotte (1937), Henri Bosco, éd. Gallimard, coll. « Folio Junior édition spéciale », 1988, p. 16
Le malheur, c'est qu'il attirait singulièrement l'attention et si, comme l'a affirmé le Sage, il arrive que l'attention soit déjà de l'amour, le plus souvent, à notre avis, elle n'est que la mère de la malice.
L'Âne Culotte (1937), Henri Bosco, éd. Gallimard, coll. « Folio Junior édition spéciale », 1988, p. 17
Le plus souvent elle se plaignait. Rien ne pouvait la satisfaire. Elle avait un haut sentiment de la perfection. C'est pourquoi elle grondait le cochon, gourmandait la chèvre, morigénait la volaille et couvrait le chien de reproches. Parfois même, s'en prenant avec violence à l'Invisible, elle insultait les vents qui ne soufflaient pas à son gré.
- Au sujet de la Péguinotte.
L'Âne Culotte (1937), Henri Bosco, éd. Gallimard, coll. « Folio Junior édition spéciale », 1988, p. 21
Canards qui volent haut dans l'air
Annoncent neiges de l'hiver.
L'Âne Culotte (1937), Henri Bosco, éd. Gallimard, coll. « Folio Junior édition spéciale », 1988, p. 22
Celui qui parle sans raison
Tire le diable à la maison.
L'Âne Culotte (1937), Henri Bosco, éd. Gallimard, coll. « Folio Junior édition spéciale », 1988, p. 25
Il était humain que M. Cyprien eût aussi des ennemis, comme tous les solitaires, et particulièrement ceux qui habitent à cinquante pieds au-dessus du commun. Par leur façon de vivre, ils montrent clair comme le jour qu'ils n'ont besoin de personne, ce qu'on ne saurait leur pardonner.
L'Âne Culotte (1937), Henri Bosco, éd. Gallimard, coll. « Folio Junior édition spéciale », 1988, p. 36
Fleur de genêt cueillie à l'aube
C'est du plaisir pour le Lundi,
Et fleur de lys à pleine robe
C'est plus d'amour qu'on ne t'en dit...
- Chanson de grand-mère Saturnine
L'Âne Culotte (1937), Henri Bosco, éd. Gallimard, coll. « Folio Junior édition spéciale », 1988, p. 38
Ce n'était plus un âne de la terre, un baudet de village ; mais l'âne-type, l'âne pur, l'idée même de l'âne.
- Au sujet de l'âne Culotte, vu dans la campagne hors du village.
L'Âne Culotte (1937), Henri Bosco, éd. Gallimard, coll. « Folio Junior édition spéciale », 1988, p. 45
On entendait le geai batailleur se quereller avec violence, le babil de la pie sur le faîte d'un arbre, le pic qui travaillait avec entêtement et cognait du bec contre les vieilles écorces, parfois en éclatant de rire, le torcol tire-langue, la sittelle, le grimpereau à voix flûtée, l'échelette pendue aux parois de quelque ravin, la huppe arrivée des pays chauds, le coucou, la pie-grièche, la mésange, le roitelet, le hochequeue, le merle, tous les ramages et tels que je n'en avais point jusqu'alors admiré de pareils, près des maisons, aux Basses-Terres, comme si, sur les lisières de ce verger perdu, dans le quartier sauvage des collines, des vols entiers d'oiseaux, arrivés par milliers de cent lieues à la ronde, étaient venus chanter en l'honneur de ce vieil homme de la mer...
L'Âne Culotte (1937), Henri Bosco, éd. Gallimard, coll. « Folio Junior édition spéciale », 1988, p. 56
La bête voyage. Je l'ai vue une fois, sur un rocher, et, par hasard, en pleine lune, son museau pointu levé vers les astres. Mais c'était loin d'ici.
- M. Cyprien, au sujet de la bête mystérieuse de la montagne.
L'Âne Culotte (1937), Henri Bosco, éd. Gallimard, coll. « Folio Junior édition spéciale », 1988, p. 59
Elle était inquiète ; mais elle savait que les enfants font rarement de vraies confidences aux grandes personnes. Ils ne parlent guère qu'à eux-mêmes, quand ils sont sûrs d'être bien seuls, et qu'ils peuvent se raconter des histoires secrètes, celles sans doute de ce tiers mystérieux qui les accompagne partout comme le Génie de l'enfance et dont, pendant quelques années encore, ils auront le bonheur d'entendre la voix, cette voix si semblable à la leur et cependant étrange, qui bientôt s'éteindra à jamais.
L'Âne Culotte (1937), Henri Bosco, éd. Gallimard, coll. « Folio Junior édition spéciale », 1988, p. 77-78
Il jouait la douceur, il jouait la colère, mais toujours avec un retour sur un tourment plaintif, une mélopée d'obsession, à laquelle, plus bas, presque sous ma cachette, au creux le plus noir du vallon, répondait le bruit sourd d'un piétinement innombrable et le halètement rauque d'une masse sombre qui, autant que j'en pus juger, semblait se mouvoir, sur cette cadence triste et tenace, sans un cri, avec une sombre volonté.
L'Âne Culotte (1937), Henri Bosco, éd. Gallimard, coll. « Folio Junior édition spéciale », 1988, p. 102
Cependant, même en son absence, jamais je n'avais pénétré dans sa cabane, peut-être par orgueil, mais peut-être aussi parce que j'avais le culte des refuges, la religion des caches, comme tant d'enfants qui se créent pour eux seuls de petites retraites, où ils vivent plus familièrement qu'ailleurs avec les compagnons imaginaires de leur âge.
L'Âne Culotte (1937), Henri Bosco, éd. Gallimard, coll. « Folio Junior édition spéciale », 1988, p. 109
Encore un qui n'a plus de sang dans la langue !
- La Péguinotte, à propos de Constantin qui parle peu.
L'Âne Culotte (1937), Henri Bosco, éd. Gallimard, coll. « Folio Junior édition spéciale », 1988, p. 125
Monsieur l'abbé, j'ai découvert le Paradis terrestre...
- M. Cyprien, à l'abbé Chichambre
L'Âne Culotte (1937), Henri Bosco, éd. Gallimard, coll. « Folio Junior édition spéciale », 1988, p. 127
Le Paradis ! il n'existe plus, me dit-il. Les Blancs y ont finalement abordé. Tout y est mort, et j'ai dû m'enfuir, moi aussi, mais je le garde en moi, ce Paradis ; j'en conserve la force, j'en connais le secret, j'emporte le pouvoir de le faire renaître, partout où je voudrai, même là-bas, en Occident, dans les jardins barbares.
- M. Cyprien, à l'abbé Chichambre
L'Âne Culotte (1937), Henri Bosco, éd. Gallimard, coll. « Folio Junior édition spéciale », 1988, p. 128
Mon père m'avait averti :
— Amuse-toi, va où tu veux. Ce n'est pas la place qui te manque. Mais je te défends de courir du côté de la rivière.
Et ma mère avait ajouté :
— A la rivière, mon enfant, il y a des trous morts où l'on se noie, des serpents parmi les roseaux et des Bohémiens sur les rives.
Il n'en fallait pas plus pour me faire rêver de la rivière, nuit et jour.
L'Enfant et la Rivière (1945), Henri Bosco, éd. Gallimard, coll. « Folio Junior édition spéciale », 1987, p. 13
Souvent, la nuit, je pensais à ces coins merveilleux, enfouis au milieu des bois, sur le bord de ces îles, où personne, sauf Bargabot, n'allait jamais.
L'Enfant et la Rivière (1945), Henri Bosco, éd. Gallimard, coll. « Folio Junior édition spéciale », 1987, p. 17
Elle trottait du haut en bas de la maison. Elle trottait le jour ; elle trottait la nuit ; elle trottait à l'aube ; elle trottait au crépuscule.
- À propos de Tante Martine.
L'Enfant et la Rivière (1945), Henri Bosco, éd. Gallimard, coll. « Folio Junior édition spéciale », 1987, p. 18
C'était une tentation de printemps, une des plus douces qui soient, je pense, pour qui est sensible au ciel pur, aux feuilles tendres et aux fleurs fraîchement écloses.
- À propos du jour où Pascalet partit vers la rivière.
L'Enfant et la Rivière (1945), Henri Bosco, éd. Gallimard, coll. « Folio Junior édition spéciale », 1987, p. 20
Il était basané comme ses ravisseurs, et tout aussi sauvage. Mais rien n'y trahissait l'effroi. Les yeux clos, la bouche serrée, l'enfant semblait de pierre.
- Première apparition de Gatzo.
L'Enfant et la Rivière (1945), Henri Bosco, éd. Gallimard, coll. « Folio Junior édition spéciale », 1987, p. 45
Et le soir vint. J'en fus étonné, car jamais jusqu'alors je ne l'avais vu. Du moins tel que je le voyais, sombre et tout bleu, à l'Orient, avec de grands arbres d'étoiles.
L'Enfant et la Rivière (1945), Henri Bosco, éd. Gallimard, coll. « Folio Junior édition spéciale », 1987, p. 46
Ne crains rien. Je connais l'eau.
L'Enfant et la Rivière (1945), Henri Bosco, éd. Gallimard, coll. « Folio Junior édition spéciale », 1987, p. 54
Comment Gatzo fut adopté par ma famille, voilà qui me reste encore un mystère, même aujourd'hui.
Le Renard dans l'île (1956), Henri Bosco, éd. Gallimard, coll. « Mille soleils », 1974, chap. L'intrus, p. 17
À dix ans, on ne sait pas ce que c'est qu'un mirage. Comme à tout âge, on a des visions. Mais, entre ce qu'on pense voir et ce qu'on voit réellement, on ne fait pas beaucoup de différence.
Le Renard dans l'île (1956), Henri Bosco, éd. Gallimard, coll. « Mille soleils », 1974, chap. Des souvenirs..., p. 36
Quand on se suffit en tout à soi-même, qu'a-t-on besoin de se lier à ceux qui, comme nous, n'ont besoin de personne ?
Le Renard dans l'île (1956), Henri Bosco, éd. Gallimard, coll. « Mille soleils », 1974, chap. Des souvenirs..., p. 39
L'aire, de tout temps m'avait fasciné. J'y voyais le lieu réservé aux apparitions. Sa forme circulaire, sa blancheur, et, l'été, sa phosphorescence, me semblaient favorables aux rencontres mystérieuses des fantômes et des songes.
Le Renard dans l'île (1956), Henri Bosco, éd. Gallimard, coll. « Mille soleils », 1974, chap. Des souvenirs..., p. 39
Ce qu'on apprend deux fois, on le sait une.
Le Renard dans l'île (1956), Henri Bosco, éd. Gallimard, coll. « Mille soleils », 1974, chap. Soleils et nuages, p. 59
Vous tombez mal ! Mes tomates se sont brûlées. Il y a un sort sur la braise. J'ai beau la recouvrir de cendre, comme d'habitude, eh bien, non ! elle perce la poêle !... Le diable y a mis sa fourche, pour sûr... Arrière, Cifer ! La tête à l'envers ! Rentre dans l'Enfer ! Et mange du fer !...
Le Renard dans l'île (1956), Henri Bosco, éd. Gallimard, coll. « Mille soleils », 1974, chap. Soleils et nuages, p. 68
Chien qui rêve, c'est chien qui sait, et s'il pleure, c'est qu'on va pleurer...
Le Renard dans l'île (1956), Henri Bosco, éd. Gallimard, coll. « Mille soleils », 1974, chap. Soleils et nuages, p. 69
Quand à l'air sommeille rassade,
Signe de grande soleillade
- Dicton de Tante Martine. Voir sur le Wiktionnaire : rassade.
Le Renard dans l'île (1956), Henri Bosco, éd. Gallimard, coll. « Mille soleils », 1974, chap. Soleils et nuages, p. 71
Vous allez entrer en Arithmétique. Et l'Arithmétique, c'est une maison. La façade n'en déplaît pas. La porte en est étroite, l'apparence rassure, et tout vous engage à entrer... Mais, une fois dedans, on a vite fait de se perdre... Cherche par-ci, cherche par-là, qui s'y retrouve est bien malin... C'est alors le palais des pas perdus...
- Frère Théopiste, entamant un cours de mathématiques
Le Renard dans l'île (1956), Henri Bosco, éd. Gallimard, coll. « Mille soleils », 1974, chap. Soleils et nuages, p. 74