Montesquieu
écrivain et philosophe français
Montesquieu (1689 - 1755), baron de La Brède et de Montesquieu est un moraliste, penseur et philosophe français du siècle des Lumières. Montesquieu, avec John Locke, est un inspirateur des principes d'organisation politique et sociale sur lesquels nos sociétés modernes s'appuient.
Lettres persanes, 1721
modifierAussi puis-je t'assurer qu'il n'y a jamais eu de royaume où il y ait eu tant de guerres civiles que dans celui du Christ.
- Lettres persanes (1721), Montesquieu, éd. Livre de poche, coll. « Livre de poche », 1972 (ISBN 2-253-00321-2), partie Rica à Ibben, à Smyrne, Lettre 95, p. 128 (texte intégral sur Wikisource)
Il n'y a que deux sortes de guerre justes : les unes qui se font pour repousser un ennemi qui attaque ; les autres, pour secourir un allié qui est attaqué.
- Lettres persanes (1721), Montesquieu, éd. Livre de poche, coll. « Livre de poche », 1972 (ISBN 2-253-00321-2), partie Usbek au même (Rhédi), Lettre 95, p. 256 (texte intégral sur Wikisource)
- Citation choisie pour le 13 décembre 2009.
L'effet ordinaire des colonies est d'affaiblir les pays d'où on les tire, sans peupler ceux où on les envoie.
- Lettres persanes (1721), Montesquieu, éd. Livre de poche, coll. « Livre de poche », 1972 (ISBN 2-253-00321-2), partie Usbek au même (Rhédi), Lettre 121, p. 310 (texte intégral sur Wikisource)
Pour faire de grandes choses, il ne faut pas être un si grand génie : il ne faut pas être au-dessus des hommes ; il faut être avec eux.
- Lettres persanes (1721), Montesquieu, éd. Livre de poche, coll. « Livre de poche », 1972 (ISBN 2-253-00321-2), partie Pensées et Fragments inédits, p. 139 (texte intégral sur Wikisource)
Les hommes sont bien malheureux! Ils flottent sans cesse entre de fausses espérances et des craintes ridicules, et, au lieu de s'appuyer sur la raison, ils se font des monstres qui les intimident, ou des fantômes qui les séduisent.
- Lettres persanes, Montesquieu, éd. Pléiade, 1972, partie Rica à Nathanaël Levi (médecin juif à Livourne), Lettre 143, p. 353 (texte intégral sur Wikisource)
Je ne vois pas que la police, la justice et l’équité soient mieux observées en Turquie, en Perse, chez le Mogol, que dans les républiques de Hollande, de Venise, et dans l’Angleterre même ; je ne vois pas qu’on y commette moins de crimes ; et que les hommes, intimidés par la grandeur des châtiments, y soient plus soumis aux lois.
- Lettres persanes, Montesquieu, éd. A. Lemerre, texte établi par André Lefèvre, 1873, partie LETTRE LXXXI,Usbek à Rhédi. À Venise, Lettre 81, p. 178 (texte intégral sur Wikisource)
dans un État, les peines plus ou moins cruelles ne font pas que l’on obéisse plus aux lois
- Lettres persanes, Montesquieu, éd. A. Lemerre, texte établi par André Lefèvre, 1873, partie LETTRE LXXXI,Usbek à Rhédi. À Venise, Lettre 81, p. 178 (texte intégral sur Wikisource)
La justice est un rapport de convenance, qui se trouve réellement entre deux choses
- Lettres persanes, Montesquieu, éd. A. Lemerre, texte établi par André Lefèvre, 1873, partie LETTRE LXXXI,Usbek à Rhédi. À Venise, Lettre 84, p. 183 (texte intégral sur Wikisource)
Quelques-uns ont affecté de se servir d’une autre langue que la vulgaire ; chose absurde pour un faiseur de lois : comment peut-on les observer, si elles ne sont pas connues ?
- Lettres persanes, Montesquieu, éd. A. Lemerre, texte établi par André Lefèvre, 1873, partie LETTRE LXXXI,Usbek à Rhédi. À Venise, Lettre 80, p. 174 (texte intégral sur Wikisource)
il est quelquefois nécessaire de changer certaines lois. Mais le cas est rare ; et lorsqu’il arrive, il n’y faut toucher que d’une main tremblante.
- Lettres persanes, Montesquieu, éd. A. Lemerre, texte établi par André Lefèvre, 1873, partie LETTRE LXXXI,Usbek à Rhédi. À Venise, Lettre 80, p. 175 (texte intégral sur Wikisource)
De l'esprit des lois, 1748
modifierL'amour de la république, dans une démocratie, est celui de la démocratie ; l'amour de la démocratie est celui de l'égalité.
- « De l'esprit des lois », dans Œuvres complètes, Montesquieu, éd. Adamant, 2001 (ISBN 0543996123), t. 1, chap. III, livre V, p. 37 (texte intégral sur Wikisource)
Pour qu'on ne puisse abuser du pouvoir, il faut que, par la disposition des choses, le pouvoir arrête le pouvoir.
- « De l'esprit des lois », dans Œuvres, Montesquieu, éd. Nourse, 1767, t. 1, chap. IV, livre XI (« Des lois qui forment la liberté politique, dans son rapport avec la constitution »), p. 206 (voir la fiche de référence de l'œuvre) (texte intégral sur Wikisource)
La liberté est le droit de faire tout ce que les lois permettent.
- (fr) La liberté politique ne consiste point à faire ce que l'on veut. Dans un État, c'est-à-dire dans une société où il y a des lois, la liberté ne peut consister qu'à pouvoir faire ce que l'on doit vouloir, et à n'être point contraint de faire ce que l'on ne doit pas vouloir. Il faut se mettre dans l'esprit ce que c'est que l'indépendance, et ce que c'est que la liberté. La liberté est le droit de faire tout ce que les lois permettent; et si un citoyen pouvoit faire ce qu'elles défendent, il n'auroit plus de liberté, parce que les autres auroient tout de même ce pouvoir.
- De l'esprit des lois (1748), Montesquieu, éd. Pourrat, 1831, t. 1, chap. 3-Ce que c'est que la liberté, livre XI, p. 290
- Citation choisie pour le 28 janvier 2014.
Sur le caractère de la religion chrétienne et celui de la mahométane, on doit, sans autre examen, embrasser l'une et rejeter l'autre : car il nous est bien plus évident qu'une religion doit adoucir les mœurs des hommes, qu'il ne l'est qu'une religion soit vraie.
C'est un malheur pour la nature humaine lorsque la religion est donnée par un conquérant. La religion mahométane, qui ne parle que de glaive, agit encore sur les hommes avec cet esprit destructeur qui l'a fondée.
- De l'esprit des lois (1748), Montesquieu, éd. Firmin Didot, 1870, p. 407
Mes pensées, 1899 (posthume)
modifierL'étude a été pour moi le souverain remède contre les dégoûts, n'ayant jamais eu de chagrin qu'une heure de lecture ne m'ait ôté.
- Mes pensées (1899), Montesquieu, éd. Gallimard, coll. « Bibliothèque de la Pléiade », 1949, p. 975
Si je savais quelque chose utile à ma famille et qui ne le fût pas à ma patrie, je chercherais à l’oublier. Si je savais quelque chose utile à ma patrie, et qui fût préjudiciable à l’Europe, ou bien qui fût utile à l’Europe et préjudiciable au genre humain, je le regarderais comme un crime.
- Œuvres complètes, Montesquieu, éd. Firmin Didot frères, 1854, Pensées diverses, p. 622
Divers
modifierIl semble que les têtes des plus grands hommes s’étrécissent lorsqu’elles sont assemblées, et que là où il y a plus de sages, il y ait moins de sagesse : les grands corps s’attachent toujours si fort aux minuties, que l’essentiel ne va jamais qu’après.
- (fr) Dictionnaire universel françois et latin dit de Trévoux, collectif, éd. Imprimé à Paris, 1771, p. 917 du tome 3 ; article « Etrecir »
Elle m’a donné quatre enfans dont il y en a plus de la moitié où je jurerois que je ne suis pour rien.
- (fr) Histoire véritable, Montesquieu, éd. G. Gounouilhou, Bordeaux, 1902, posthume, p. Livre IV, dernier paragraphe (texte intégral sur Wikisource)
Citation rapportée
modifierSi les triangles faisaient un dieu, ils lui donneraient trois côtés.
- La philosophie pour les nuls, Christian Godin, éd. First Éditions, 2006 (ISBN 2-87691-998-2), p. 299
La liberté est le droit de faire tout ce que les lois permettent.
- La philosophie pour les nuls, Christian Godin, éd. First Éditions, 2006 (ISBN 2-87691-998-2), p. 292
D'autres auteurs le concernant
modifierHomme d'étude et de pensée, détaché d'assez bonne heure des passions et n'ayant du moins jamais été entraîné par elles, il habita et vécut dans la fermeté de l'intelligence. Très bon dans le particulier, naturel et simple, il mérita d'être aimé de tout ce qui l'entourait ; mais, même dans ses parties les plus humaines, on retrouverait ce côté ferme, indifférent, une équité bienveillante et supérieure plutôt que la tendresse de l'âme.
- Les lumières et les salons — Anthologie établie et présentée par Pierre Berès, Charles-Augustin Sainte-Beuve, éd. Hermann (éditeurs des sciences et des arts), coll. « Collection savoir : lettres », 1992 (ISBN 2-7056-6178-6), partie Montesquieu, 18 et 25 octobre. Causeries du lundi, t. VII, p. 118
Au milieu des hardiesses et des irrévérences des Lettres Persanes, un esprit de prudence se laisse entrevoir par la plume d'Usbek ; en agitant si bien les questions et en les perçant quelque-fois à jour, Usbek (et c'est une contradiction peut-être à laquelle n'a pas échappé Montesquieu) veut continuer de rester fidèle aux lois de son pays, de sa religion. Il est vrai, dit-il, que par une bizarrerie qui vient plutôt de la nature que de l'esprit des hommes, il est quelquefois nécessaire de changer certaines lois ; mais le cas est rare; et lorsqu'il arrive, il n'y faut toucher que d'une main tremblante. Cet esprit qui a dicté les Lettres Persanes ne poussera jamais les choses à l'extrémité du côté des réformes et des révolutions populaires.
- Les lumières et les salons — Anthologie établie et présentée par Pierre Berès, Charles-Augustin Sainte-Beuve, éd. Hermann (éditeurs des sciences et des arts), coll. « Collection savoir : lettres », 1992 (ISBN 2-7056-6178-6), partie Montesquieu, 18 et 25 octobre. Causeries du lundi, t. VII, p. 119
On a publié quelques notes de son Journal de voyage qui se rapportent à son séjour de Londres. Il ne se fait point d'illusion en beau sur l'état du pays et des institutions ; il juge au vrai la corruption des mœurs politiques, la vénalité des consciences et des votes, le côté positif et calculateur, cette peur d'être dupe qui mène à la dureté. S'il voit le mal, Montesquieu apprécie très bien les avantages qui le compensent : L'Angleterre est à présent le pays le plus libre qui soit au monde, je n'en excepte aucune république. Un coup d'œil de divination perce comme un éclair dans [une] phrase jetée en passant et qui prédit l'émancipation de l'Amérique anglaise.
- Les lumières et les salons — Anthologie établie et présentée par Pierre Berès, Charles-Augustin Sainte-Beuve, éd. Hermann (éditeurs des sciences et des arts), coll. « Collection savoir : lettres », 1992 (ISBN 2-7056-6178-6), partie Montesquieu, 18 et 25 octobre. Causeries du lundi, t. VII, p. 120
De retour en France, Montesquieu se retira à son château de la Brède, loin des soupers de Paris, pour y recueillir et y ordonner ses pensées ; il y resta deux ans, ne voyant que ses livres et ses arbres. Il donna ses Considérations sur les causes de la grandeur des Romains et de leur décadence (1734), qui sont restées le plus classique et le plus parfait de ses ouvrages, le seul même qui nous paraisse aujourd'hui sorti tout d'un jet comme une statue. Montesquieu s'avance d'un pied ferme, par une suite de réflexions serrées et vives et dont l'ensemble a l'air grand ; il a le trait prompt, court et qui porte haut. Cette façon de voir et de dire était faite pour s'appliquer merveilleusement aux Romains. Pour la forme, on aurait à rapprocher du discours historique de Montesquieu le discours même de Bossuet.
- Les lumières et les salons — Anthologie établie et présentée par Pierre Berès, Charles-Augustin Sainte-Beuve, éd. Hermann (éditeurs des sciences et des arts), coll. « Collection savoir : lettres », 1992 (ISBN 2-7056-6178-6), partie Montesquieu, 18 et 25 octobre. Causeries du lundi, t. VII, p. 121
En parlant des Romains, la langue de Montesquieu s'est fait comme latine et elle a un caractère de concision ferme qui la rapproche de la langue de Tacite ou de Salluste. Il excelle à retremper les expressions et à leur redonner toute leur force primitive, ce qui permet à son style d'être court, fort et d'avoir l'air simple.
- Les lumières et les salons — Anthologie établie et présentée par Pierre Berès, Charles-Augustin Sainte-Beuve, éd. Hermann (éditeurs des sciences et des arts), coll. « Collection savoir : lettres », 1992 (ISBN 2-7056-6178-6), partie Montesquieu, 18 et 25 octobre. Causeries du lundi, t. VII, p. 122
Au début de L'Esprit des lois, [Montesquieu] va jusqu'à dire que les premiers hommes supposés sauvages et purement naturels sont avant tout timides et ont besoin de la paix : comme si la cupidité physique, le besoin et la faim, ce sentiment aveugle que toute jeunesse a de sa force, et aussi cette rage de domination qui est innée au cœur humain ne devaient pas engendrer dès l'abord les rixes et les guerres. Cette critique est fondamentale et porte sur tout L'Esprit des lois. Montesquieu accorde trop non seulement en-dehors, mais en secret et dans sa propre pensée, au décorum de la nature humaine [...]. Né sous un gouvernement doux, vivant dans une société éclairée où le souvenir des factions était lointain et où le despotisme qui les avait réprimées n'était plus présent ou du moins sensible, il accommoda légèrement l'humanité à son désir.
- Les lumières et les salons — Anthologie établie et présentée par Pierre Berès, Charles-Augustin Sainte-Beuve, éd. Hermann (éditeurs des sciences et des arts), coll. « Collection savoir : lettres », 1992 (ISBN 2-7056-6178-6), partie Montesquieu, 18 et 25 octobre. Causeries du lundi, t. VII, p. 123
Le livre de Montesquieu, avec tous ses défauts, allait déjouer les craintes et surpasser les espérances de ses amis mêmes. Il y a des ouvrages qu'il ne faut pas voir de trop près : ce sont des monuments.
- Concernant L'Esprit des lois.
- Les lumières et les salons — Anthologie établie et présentée par Pierre Berès, Charles-Augustin Sainte-Beuve, éd. Hermann (éditeurs des sciences et des arts), coll. « Collection savoir : lettres », 1992 (ISBN 2-7056-6178-6), partie Montesquieu, 18 et 25 octobre. Causeries du lundi, t. VII, p. 124
Sa plus grande qualité, c'est le calme. Il ne l'empêche pas d'être vif. La façon d'écrire de Montesquieu me rappelle le pas de cavalerie appelé galop lent. Quel noble rythme, et avec un esprit éclatant sans qu'il le brandisse.
- Dictionnaire égoïste de la littérature française, Charles Dantzig, éd. Grasset, 2005, p. 554