Guy de Maupassant
Guy de Maupassant (1850–1893) est un écrivain français, auteur de romans, de nouvelles et de contes.
Nouvelle
modifierPuis, un calme profond, une attente épouvantée et silencieuse avait plané sur la cité. Beaucoup de bourgeois bedonnants, émasculés par le commerce, attendaient anxieusement les vainqueurs, tremblant qu'on ne considérât comme une arme leurs broches à rôtir ou leurs grands couteaux de cuisine.
- Boule de suif (1880), Guy de Maupassant, éd. Gallimard, coll. « folio classique », 2007 (ISBN 978-2-07-041119-1), p. 33
Mais Cornudet releva brusquement la tête, et parcourant la société d'un luisant et terrible : — « Je vous dis à tous que vous venez de faire une infamie » ! — Il se leva, gagna la porte, répéta encore une fois : « Une infamie ! » et disparut.
- Boule de suif (1880), Guy de Maupassant, éd. Gallimard, coll. « folio classique », 2007 (ISBN 978-2-07-041119-1), p. 85
- Le Horla, Guy de Maupassant, éd. Albin Michel, coll. « Livre de poche », 1979 (ISBN 2-253-00539-8), p. 26 (texte intégral sur Wikisource)
- Le Horla, Guy de Maupassant, éd. Albin Michel, coll. « Le livre de poche », 1967, p. 5 (texte intégral sur Wikisource)
- « Le Horla », Guy de Maupassant, dans Le Horla (suivi de L’héritage), éd. Librio, coll. « Imaginaire », 2003 (ISBN 2-290-33477-4), p. 10 (texte intégral sur Wikisource)
- « Le Horla », Guy de Maupassant, dans Le Horla (suivi de L’héritage), éd. Librio, coll. « Imaginaire », 2003 (ISBN 2-290-33477-4), p. 10 (texte intégral sur Wikisource)
- « Le Horla », Guy de Maupassant, dans Le Horla (suivi de L’héritage), éd. Librio, coll. « Imaginaire », 2003 (ISBN 2-290-33477-4), p. 16 (texte intégral sur Wikisource)
- Citation choisie pour le 16 septembre 2011.
- Maupassant cite Voltaire.
- « Le Horla », Guy de Maupassant, dans Le Horla (suivi de L’héritage), éd. Librio, coll. « Imaginaire », 2003 (ISBN 2-290-33477-4), p. 18 (texte intégral sur Wikisource)
- « Le Horla », Guy de Maupassant, dans Le Horla (suivi de L’héritage), éd. Librio, coll. « Imaginaire », 2003 (ISBN 2-290-33477-4), p. 25 (texte intégral sur Wikisource)
- (en) Le Horla, Guy de Maupassant, éd. Elibron, coll. « Folio classique », 1999 (ISBN 9780543898302), p. 25 (texte intégral sur Wikisource)
- Tirade conservée du fait qu’elle eût été écrite alors que Maupassant sombrait dans la folie.
- « Le Horla », Guy de Maupassant, dans Le Horla, éd. Bibliographie de la France, 1887, p. 68 (texte intégral sur Wikisource)
Roman
modifier- De retour de son voyage de noces en Corse, regardant l’abeille de la ruche de bronze (pendule d’Empire), Jeanne est « traversée par un élan d’affliction ». Cette phrase se rapproche du proverbe « Le cœur a ses raisons que la raison ignore/ne connaît point ».
- Une vie (1883), Guy de Maupassant, éd. Hachette, coll. « Bibliolycée », juin 2009 (ISBN 978-2-01-281411-0), chap. VI, p. 93 §4 l. 2 (texte intégral sur Wikisource)
- Ultime phrase du roman inspirée par Flaubert dans une lettre adressée à Maupassant en 1878 : « Les choses ne sont jamais ni aussi mauvaises ni aussi bonnes qu’on croit ».
- Une vie (1883), Guy de Maupassant, éd. Gallimard, coll. « folio classique », 1974 (ISBN 2-07-041084-6), chap. XIV, p. 278 (texte intégral sur Wikisource)
- Bel-Ami (1885), Guy de Maupassant, éd. Ollendorf, 1901, chap. 1ère partie, VI, p. 159 (texte intégral sur Wikisource)
- Bel-Ami (1885), Guy de Maupassant, éd. Ollendorf, 1901, chap. 1ère partie, VIII, p. 215 (texte intégral sur Wikisource)
- Bel-Ami (1885), Guy de Maupassant, éd. Ollendorf, 1901, chap. 2ème partie, I, p. 253 (texte intégral sur Wikisource)
- Bel-Ami (1885), Guy de Maupassant, éd. Ollendorf, 1901, chap. 2ème partie, II, p. 265 (texte intégral sur Wikisource)
- Bel-Ami (1885), Guy de Maupassant, éd. Ollendorf, 1901, chap. 2ème partie, II, p. 267 (texte intégral sur Wikisource)
- Bel-Ami (1885), Guy de Maupassant, éd. Ollendorf, 1901, chap. 2ème partie, IV, p. 306 (texte intégral sur Wikisource)
- Bel-Ami (1885), Guy de Maupassant, éd. Ollendorf, 1901, chap. 2ème partie, V, p. 344 (texte intégral sur Wikisource)
- Pierre et Jean, Guy de Maupassant, éd. Paul Ollendorff, 1888, Préface, p. XV (texte intégral sur Wikisource)
- Pierre et Jean, Guy de Maupassant, éd. Paul Ollendorff, 1888, Préface, p. XIX (texte intégral sur Wikisource)
- Pierre et Jean, Guy de Maupassant, éd. Paul Ollendorff, 1888, Préface, p. XVIII (texte intégral sur Wikisource)
- Pierre et Jean, Guy de Maupassant, éd. Paul Ollendorff, 1888, Préface, p. XVIII (texte intégral sur Wikisource)
- Pierre et Jean (1888), Guy de Maupassant, éd. Gallimard, 1982 (ISBN 2070374149), p. 60 (texte intégral sur Wikisource)
Récit de voyage
modifier- Au Soleil (1884), Guy de Maupassant, éd. Pocket Classiques, 1998, Province d'Alger, p. 65-66
- Sur l'eau (1888), Guy de Maupassant, éd. Société d'éditions littéraires et artistiques, 1904, p. 74
- Sur l'eau (1888), Guy de Maupassant, éd. Société d'éditions littéraires et artistiques, 1904, p. 77
La Vie errante, 1890
modifierLassitude
J’ai quitté Paris et même la France, parce que la tour Eiffel finissait par m’ennuyer trop.
Non seulement on la voyait de partout, mais on la trouvait partout, faite de toutes les matières connues, exposée à toutes les vitres, cauchemar inévitable et torturant.
Ce n’est pas elle uniquement d’ailleurs qui m’a donné une irrésistible envie de vivre seul pendant quelque temps, mais tout ce qu’on a fait autour d’elle, dedans, dessus, aux environs.
- La Vie errante, Guy de Maupassant, éd. P. Ollendorff, 1890, Lassitude, p. 1
- La Vie errante, Guy de Maupassant, éd. P. Ollendorff, 1890, Lassitude, p. 5
[...] pas un ami qui dîne chez lui ou qui consente à dîner chez vous.
Quand on l’invite, il accepte à la condition qu’on banquettera sur la tour Eiffel. C’est plus gai. Et tous, comme par suite d’un mot d’ordre, ils vous y convient ainsi tous les jours de la semaine, soit pour déjeuner, soit pour dîner.
Dans cette chaleur, dans cette poussière, dans cette puanteur, dans cette foule de populaire en goguette et en transpiration, dans ces papiers gras traînant et voltigeant partout, dans cette odeur de charcuterie et de vin répandu sur les bancs, dans ces haleines de trois cent mille bouches soufflant le relent de leurs nourritures, dans le coudoiement, dans le frôlement, dans l’emmêlement de toute cette chair échauffée, dans cette sueur confondue de tous les peuples semant leurs puces sur les sièges et par les chemins, je trouvais bien légitime qu’on allât manger une fois ou deux, avec dégoût et curiosité, la cuisine de cantine des gargotiers aériens, mais je jugeais stupéfiant qu’on pût dîner, tous les soirs, dans cette crasse et dans cette cohue, comme le faisait la bonne société, la société délicate, la société d’élite, la société fine et maniérée qui, d’ordinaire, a des nausées devant le peuple qui peine et sent la fatigue humaine.
- La Vie errante, Guy de Maupassant, éd. P. Ollendorff, 1890, Lassitude, p. 5
La Côte italienne
N’allez point dans ce port, canotiers-caboteurs qui aimez garder sans tache les voiles blanches de vos petits navires.
Savone est gentille pourtant, bien italienne, avec des rues étroites, amusantes, pleines de marchands agités, de fruits étalés par terre, de tomates écarlates, de courges rondes, de raisins noirs ou jaunes et transparents comme s’ils avaient bu de la lumière, de salades vertes épluchées à la hâte et dont les feuilles semées à foison sur les pavés ont l’air d’un envahissement de la ville par les jardins.
- La Vie errante, Guy de Maupassant, éd. P. Ollendorff, 1890, La Côte italienne, p. 28
- La Vie errante, Guy de Maupassant, éd. P. Ollendorff, 1890, La Côte italienne, p. 29
Gênes, de la haute mer.
Au fond du golfe, la ville se soulève comme si elle sortait des flots, au pied de la montagne. Le long des deux côtes qui s’arrondissent autour d’elle pour l’enfermer, la protéger et la caresser, dirait-on, quinze petites cités, des voisines, des vassales, des servantes, reflètent et baignent dans l’eau leurs maisons claires.
- La Vie errante, Guy de Maupassant, éd. P. Ollendorff, 1890, La Côte italienne, p. 32
On pénètre dans l’avant-port, énorme bassin admirablement abrité où circulent, cherchant pratique, une flotte de remorqueurs, puis, après avoir contourné la jetée Est, c’est le port lui-même, plein d’un peuple de navires, de ces jolis navires du Midi et de l’Orient, aux nuances charmantes, tartanes, balancelles, mahonnes, peints, voilés et mâtés avec une fantaisie imprévue, porteurs de madones bleues et dorées, de saints debout sur la proue et d’animaux bizarres, qui sont aussi des protecteurs sacrés.
Toute cette flotte à bonnes vierges et à talismans est alignée le long des quais, tournant vers le centre des bassins leurs nez inégaux et pointus. Puis apparaissent, classés par compagnies, de puissants vapeurs en fer, étroits et hauts, avec des formes colossales et fines. Il y a encore au milieu de ces pèlerins de la mer des navires tout blancs, de grands trois-mâts ou des bricks, vêtus comme les Arabes d’une robe éclatante sur qui glisse le soleil.
- Il est ici question de la ville de Gênes.
- La Vie errante, Guy de Maupassant, éd. P. Ollendorff, 1890, La Côte italienne, p. 33
On éprouve à Gênes ce qu’on éprouve à Florence et encore plus à Venise, l’impression d’une très aristocrate cité tombée au pouvoir d’une populace.
Ici surgit la pensée des rudes seigneurs qui se battaient ou trafiquaient sur la mer, puis, avec l’argent de leurs conquêtes, de leurs captures ou de leur commerce, se faisaient construire les étonnants palais de marbre dont les rues principales sont encore bordées.
- La Vie errante, Guy de Maupassant, éd. P. Ollendorff, 1890, La Côte italienne, p. 34
Quand on pénètre dans ces demeures magnifiques, odieusement peinturlurées par les descendants de ces grands citoyens de la plus fière des républiques, et qu’on compare le style, les cours, les jardins, les portiques, les galeries intérieures, toute la décorative et superbe ordonnance, avec l’opulente barbarie des plus beaux hôtels du Paris moderne, avec ces palais de millionnaires qui ne savent toucher qu’à l’argent, qui sont impuissants à concevoir, à désirer une belle chose nouvelle et à la faire naître avec leur or, on comprend alors que la vraie distinction de l’intelligence, que le sens de la beauté rare des moindres formes, de la perfection des proportions et des lignes, ont disparu de notre société démocratisée, mélange de riches financiers sans goût et de parvenus sans traditions.
- Il est ici question de la ville de Gênes.
- La Vie errante, Guy de Maupassant, éd. P. Ollendorff, 1890, La Côte italienne, p. 34
Entrez dans les vieux palais de Gênes, vous y verrez une succession de cours d’honneur à galeries et à colonnades et d’escaliers de marbre incroyablement beaux, tous différemment dessinés et conçus par de vrais artistes, pour des hommes au regard instruit et difficile.
Entrez dans les anciens châteaux de France, vous y trouverez les mêmes efforts vers l’incessante rénovation du style et de l’ornement.
Entrez ensuite dans les plus riches demeures du Paris actuel, vous y admirerez de curieux objets anciens soigneusement catalogués, étiquetés, exposés sous verre suivant leur valeur connue, cotée, affirmée par des experts, mais pas une fois vous ne resterez surpris par l’originale et neuve invention des différentes parties de la demeure elle-même.
- La Vie errante, Guy de Maupassant, éd. P. Ollendorff, 1890, La Côte italienne, p. 35
- La Vie errante, Guy de Maupassant, éd. P. Ollendorff, 1890, La Côte italienne, p. 42
- La Vie errante, Guy de Maupassant, éd. P. Ollendorff, 1890, La Côte italienne, p. 47
Tunis
En vérité, Tunis n’est ni une ville française, ni une ville arabe, c’est une ville juive. C’est un des rares points du monde où le juif semble chez lui comme dans une patrie, où il est le maître presque ostensiblement, où il montre une assurance tranquille, bien qu’un peu tremblante encore.
C’est lui surtout qui est intéressant à voir, à observer dans ce labyrinthe de ruelles étroites où circule, s’agite, pullule la population la plus colorée, bigarrée, drapée, pavoisée, miroitante, soyeuse et décorative, de tout ce rivage oriental.
Où sommes-nous ? sur une terre arabe ou dans la capitale éblouissante d’Arlequin, d’un Arlequin qui s’est amusé à costumer son peuple avec une fantaisie étourdissante. Il a dû passer par Londres, par Paris, par Saint-Pétersbourg, ce costumier divin qui, revenu plein de dédain des pays du Nord, bariola ses sujets avec un goût sans défaillances et une imagination sans limites. Non seulement il voulut donner à leurs vêtements des formes gracieuses, originales et gaies, mais il employa, pour les nuancer, toutes les teintes créées, composées, rêvées par les plus délicats aquarellistes.
- La Vie errante, Guy de Maupassant, éd. P. Ollendorff, 1890, Tunis, p. 144-145
Un de ces souks a un caractère si bizarre, que le souvenir en reste extravagant et persistant comme celui d’un songe. C’est le souk des parfums.
En d’étroites cases pareilles, si étroites qu’elles font penser aux cellules d’une ruche, alignés d’un bout à l’autre et sur les deux côtés d’une galerie un peu sombre, des hommes au teint transparent, presque tous jeunes, couverts de vêtements clairs, et assis comme des bouddhas, gardent une rigidité saisissante dans un cadre de longs cierges suspendus, formant autour de leur tête et de leurs épaules un dessin mystique et régulier.
Les cierges d’en haut, plus courts, s’arrondissent sur le turban ; d’autres, plus longs viennent aux épaules ; les grands tombent le long des bras. Et, cependant, la forme symétrique de cette étrange décoration varie un peu de boutique en boutique. Les vendeurs, pâles, sans gestes, sans paroles, semblent eux-mêmes des hommes de cire en une chapelle de cire. Autour de leurs genoux, de leurs pieds, à la portée des mains si un acheteur se présente, tous les parfums imaginables sont enfermés en de toutes petites boites, en de toutes petites fioles, en de tout petits sacs.
- La Vie errante, Guy de Maupassant, éd. P. Ollendorff, 1890, Tunis, p. 150
- La Vie errante, Guy de Maupassant, éd. P. Ollendorff, 1890, Tunis, p. 160
Nous songions à regagner l’hôtel quand l’agent de police indigène nous proposa de nous conduire tout simplement dans un bouge, dans un lieu d’amour dont il ferait ouvrir la porte d’autorité.
Et nous voici encore le suivant à tâtons dans des ruelles noires inoubliables, allumant des allumettes pour ne pas tomber, trébuchant tout de même en des trous, heurtant les maisons de la main et de l’épaule et entendant parfois des voix, des bruits de musique, des rumeurs de fête sauvage sortir des murs, étouffés, comme lointains, effrayants d’assourdissement et de mystère. Nous sommes en plein dans le quartier de la débauche.
- La Vie errante, Guy de Maupassant, éd. P. Ollendorff, 1890, Tunis, p. 161
Elles chantent en tapant sur la darbouka avec leurs mains rougies par le henné, et les musiciens juifs les accompagnent sur de petites guitares, des tambourins et des flûtes aiguës.
Tout le monde écoute, sans parler, sans jamais rire, avec une gravité auguste.
Où sommes-nous ? Dans le temple de quelque religion barbare, ou dans une maison publique ?
Dans une maison publique ? Oui, nous sommes dans une maison publique, et rien au monde ne m’a donné une sensation plus imprévue, plus franche, plus colorée que l’entrée dans cette longue pièce basse, où ces filles parées dirait-on pour un culte sacré attendent le caprice d’un de ces hommes graves qui semblent murmurer le Coran jusqu’au milieu des débauches.
On m’en montre un, assis devant sa minuscule tasse de café, les yeux levés, pleins de recueillement. C’est lui qui a retenu l’idole ; et presque tous les autres sont des invités. Il leur offre des rafraîchissements et de la musique, et la vue de cette belle fille jusqu’à l’heure où il les priera de rentrer chacun chez soi. Et ils s’en iront en le saluant avec des gestes majestueux. Il est beau, cet homme de goût, jeune, grand, avec une peau transparente d’Arabe des villes que rend plus claire la barbe noire, soyeuse et un peu luisante, rare sur les joues.
- La Vie errante, Guy de Maupassant, éd. P. Ollendorff, 1890, Tunis, p. 166
- La Vie errante, Guy de Maupassant, éd. P. Ollendorff, 1890, Tunis, p. 167
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