René Guénon, né le 15 novembre 1886 à Blois (Loir-et-Cher) et mort le 7 janvier 1951 au Caire, est un penseur français, auteur d'une trentaine d'ouvrages (pour certains d'entre eux publiés à titre posthume) ayant trait, principalement, à la métaphysique et à l'ésotérisme.
Cette œuvre, qui s'oppose à la modernité au nom de la « Tradition », sagesse immémoriale et transcendante, a modifié en profondeur la réception de l'ésotérisme en Occident dans la seconde moitié du XXe siècle, et a eu une influence marquante sur des auteurs aussi divers que Mircea Eliade, Raymond Queneau ou encore André Breton.
Ne sommes-nous pas arrivés à cette époque redoutable annoncée par les Livres sacrés de l’Inde, « où les castes seront mêlées, où la famille même n’existera plus » ? Il suffit de regarder autour de soi pour se convaincre que cet état est bien réellement celui du monde actuel, et pour constater partout cette déchéance profonde que l’Évangile appelle « l’abomination de la désolation ».
La Crise du monde moderne, René Guénon, éd. Gallimard folio essais, 1994, chap. L’Âge sombre, p. 39
L’homme moderne, au lieu de chercher à s’élever à la vérité, prétend la faire descendre à son niveau.
La Crise du monde moderne, René Guénon, éd. Gallimard folio essais, 1994, chap. L’individualisme, p. 119
Dans un tel monde, il n’y a plus aucune place pour l’intelligence ni pour tout ce qui est purement intérieur, car ce sont là des choses qui ne se voient ni ne se touchent, qui ne se comptent ni ne se pèsent ; il n’y a de place que pour l’action extérieure sous toutes ses formes, y compris les plus dépourvues de toute signification.
La Crise du monde moderne, René Guénon, éd. Gallimard folio essais, 1994, chap. Une civilisation matérielle, p. 161
La plupart des Européens n’ont pas exactement évalué l’importance de l’apport qu’ils ont reçu de la civilisation islamique, ni compris la nature de leurs emprunts à cette civilisation dans le passé et certains vont jusqu’à totalement méconnaître tout ce qui s’y rapporte. [...] s'il est généralement connu que l'Espagne est restée sous la loi islamique pendant plusieurs siècles, on ne dit jamais qu'il en fut de même d'autres pays, tels que la Sicile et la partie la plus méridionale de la France actuelle. [...] Le plus étrange [...], c'est de voir les Européens se considérer comme les héritiers directs de la civilisation héllénique, alors que la vérité des faits infirme cette prétention. La réalité tirée de l'histoire même établit que la science et la philosophie grecques ont été transmises aux Européens par des intermédiaires musulmans. En d'autre termes, le patrimoine intellectuel des Héllènes n'est parvenu à l'Occident qu'après avoir été sérieusement étudié par le Proche-Orient, et n'étaient les savants de l'Islam et ses philosophes, les Européens seraient restés dans l'ignorance totale de ces connaissances pendant fort longtemps, si tant est qu'ils soient jamais parvenus à les connaitre. Il convient de faire remarquer que nous parlons ici de l'influence de la civilisation islamique et non spécialement arabe comme on le dit quelquefois à tort. Car la plupart de ceux qui ont exercé cette influence en Occident n'étaient pas de race arabe.
Aperçus sur l’ésotérisme islamique et le taoïsme, René Guénon, éd. Gallimard, 1973, Influence de la civilisation islamique en Occident (1950), p. 76-77
On ne peut le définir, ni le « classer ».
Il ne fut pas un orientaliste, bien que — ou peut-être parce que — nul ne connaissait mieux que lui l'Orient; il ne fut pas un historien des religions, bien que nul ne sût mieux que lui mettre en évidence leur fond commun comme les différences de leurs perspectives; il ne fut pas un sociologue, bien que nul n'ait analysé plus profondément les causes des maux dont souffre la société moderne [...]; il ne fut pas un poète [...] il ne fut pas un occultiste bien qu'il abordât des sujets qu'on englobait avant lui, sous la dénomination d'occultisme; il n'était surtout pas un philosophe, bien qu'il eût enseigné la philosophie et qu'il sût démontrer l'inanité de tel de ses systèmes lorsqu'il le rencontrait sur sa route.
[…] Il a d'ailleurs écrit lui-même qu'aucune étiquette ayant cours dans le monde occidental ne saurait lui convenir.