« Joyce Mansour » : différence entre les versions

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=== ''Infiniment... sur le gazon'', 1963 ===
{{Citation|citation=« Tu aurais pu attendre de me mettre en terre avant de me narguer comme ça, tous les jours à l'heure de la sieste. Moi qui n'ai jamais regardé un autre homme que ton père », disait-elle quand je me levais précipitamment sans entamer le dessert pour appeler l'ascenseur, répondre au téléphone, fermer la fenêtre, m'habiller, me déshabiller, m'agiter enfin en attendant l'arrivée bruyante de mon amant. La vieille se plaignait mais, le moment venu, c'était toujours elle qui ouvrait la porte à Arnaud. Bégayante, la langue alourdie par une épaisse couche de honte, ma mère aux jambes de crapaud et sexe à grosses mailles ne pouvait s'empêcher de le saluer avec le cérémonial dû à un roi. « Elle se surpasse, ta vieille », dit Arnaud le jour où elle lui offrit spontanément là, dans l'entrée, sous la lampe en fer forgé et le portrait du général, la pipe et les pantoufles de mon père. Geste qui n'empêcha nullement celui-ci de se promener, vêtu seulement des cuisses poilues de sa brune compagne drapées artistiquement autour de son cou et, de son éternelle cigarette, vite allumée, salement éteinte, jamais posée sans intention de faire mal, nu sous les yeux horrifiés de ma mère.}} {{Réf Article|titre=Infiniment... sur le gazon|auteur=Joyce Mansour|publication=La Brèche|numéro=4|date=Février 1963|page=62}}
 
=== ''Illusions de vol'', 1964 ===
{{Citation|citation=Il m'arrive souvent que je me cache : je braque mes yeux myopes sur le virage menteur et je pars au galop, sous les voûtes du vieux miroir, portée par la métate du vertige. Alors je te vois autre que tu n'es ; envoûtée par le faux autant que par le vrai, je me couche de tout mon long, la tête en bas de la côte hivernale et je rêve.}} {{Réf Article|titre=Illusions de vol |auteur=Joyce Mansour|publication=La Brèche|numéro=6|date=Juin 1964|page=22}}
 
{{Citation|citation=<poem>Je me souviens de nos jeux de fin d'après-midi. En péril mortel devant sa soeur ennemie, le roi noir la menaça de ses crochets sans toutefois se décider à mordre, par une répugnance que je ne me charge pas d'expliquer.
« Échec au roi ».
Le sol quadrillé était fort mal éclairé par la fenêtre donnant sur la baie et mon roi n'avait plus sa tour, son terrier, dont le rôle est de quelque valeur tant dans l'attaque directe que dans la défense.
« Dommage que les pions-soldats ne puissent être renouvelés après consommation ».</poem>}} {{Réf Article|titre=Illusions de vol |auteur=Joyce Mansour|publication=La Brèche|numéro=6|date=Juin 1964|page=22}}
 
{{Citation|citation=<poem>Le vieil homme ouvrit une armoire et me tendit, un à un à travers l'échiquier, des verges, des phallus de jade grandeur nature, d'autres en plastique munis de plumes gluantes. J'observai ce défilé de sexes masculins sans proférer la moindre réplique. Déçu par mon silence et mon évidente incompréhension, le savant rangea les pénis dans leurs écrins de velours. Dorothée entra toute mouillée de la baie.
Je ne vis plus le vieil homme... ou plutôt si parfois il nous advint encore de jouer aux échecs dans le salon glacial, je ne devais plus être pour lui qu'un adversaire. Je quittai Majorque sans regrets et ne tardai pas d'apprendre la mort du savant.</poem>}} {{Réf Article|titre=Illusions de vol |auteur=Joyce Mansour|publication=La Brèche|numéro=6|date=Juin 1964|page=23}}
 
{{Citation|citation=Tout à coup les mots « joy-stick » percèrent la brume. Le « joy-stick » : manche à balai du sabbat moderne, désir sublimé de mon ami mort, vol des sorcières sur leurs manches à désir, sexe onirique de l'avionconsolador, voleur volant dans les « outer spaces », désir bruyant d'un grand timide...}} {{Réf Article|titre=Illusions de vol |auteur=Joyce Mansour|publication=La Brèche|numéro=6|date=Juin 1964|page=24}}
 
{{Citation|citation=<poem>Tu m'as prise dans tes bras toute chargée de fièvre, nous avons pris l'avion (le vol, le vol, mon amour) et je me souvenais des yeux du savant enfoncés jusqu'aux pupilles dans la banquise rouge-cardinal : « Toi, surtout, Joyce, tu dois comprendre... »
Evidemment. Joyce : « joy-stick ». Suis-je toujours kleptomane ?</poem>}} {{Réf Article|titre=Illusions de vol |auteur=Joyce Mansour|publication=La Brèche|numéro=6|date=Juin 1964|page=24}}
 
{{interprojet|w=Joyce Mansour}}