« Gilbert Keith Chesterton » : différence entre les versions

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Saint Thomas du Créateur
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|jour= 21
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=== ''Le Club des métiers bizarres'', 1905 ===
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|ISBN=978-2-8251-4011-6
|page=152, 153
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=== ''Saint Thomas du Créateur'', 1933 ===
{{citation|
Ce petit livre n'aborde qu'une seule fois une question de ce genre lorsque j'ai noté, ici ou là, ma conviction que le schisme du seizième siècle n'était rien d'autre qu'une révolte tardive des pessimistes du treizième : un retour de flamme contre [[Aristote]] du vieux rigorisme se réclamant d'[[Augustin d'Hippone|Augustin]] : il doit être compris comme l'esquisse d'un portrait dont le fond est un paysage, non comme celle d'un paysage animé de personnages.
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{{Réf Livre
|titre=Saint Thomas du Créateur
|auteur=Gilbert Keith Chesterton
|éditeur=Dominique Martin Morin
|année=2011
|année d'origine=1933
|page=16
|ISBN=978-2-85652-325-4
}}
 
{{citation|
Le dix-neuvième siècle, parce qu'il avait tué toute féerie, s'était attaché à la légende de saint [[François d'Assise|François]]. Le vingtième s'attache déjà à la théologie rationnelle de saint Thomas parce qu'il a fait fi de la raison. Dans un monde trop sérieux, le christianisme réapparut sous la figure d'un vagabond. Dans un monde devenu par trop barbare, le christianisme a pris la forme d'un professeur de logique. L'univers de [[Herbert Spencer|Spencer]] avait besoin d'être guéri d'une indigestion, celui d'[[Albert Einstein|Einstein]] d'être protégé du vertige.
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{{Réf Livre
|titre=Saint Thomas du Créateur
|auteur=Gilbert Keith Chesterton
|éditeur=Dominique Martin Morin
|année=2011
|année d'origine=1933
|page=13, 24
|ISBN=978-2-85652-325-4
}}
 
{{citation|
Saint François aimait à ce dire le Troubadour de Dieu mais ne se contentait pas du dieu des troubadours. Saint Thomas ne conduisit pas le Christ à Aristote, mais Aristote au Christ.
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{{Réf Livre
|titre=Saint Thomas du Créateur
|auteur=Gilbert Keith Chesterton
|éditeur=Dominique Martin Morin
|année=2011
|année d'origine=1933
|page=26, 27
|ISBN=978-2-85652-325-4
}}
 
 
{{citation|
Oui, le contraste est flagrant et parfois comique entre ces deux compagnons, l'un gros l'autre sec, l'un grand l'autre petit ; entre le vagabond et l'étudiant, le commis et l'aristocrate, l'ennemi et l'amoureux des livres, le plus abrupt de tous les missionnaires et le plus doux de tous les professeurs. Il n'en reste pas moins que le fait majeur qui domine le Moyen Âge fut qu'ils travaillèrent à la même œuvre, l'un par la pensée, l'autre dans les rues. Ils n'introduisaient rien de neuf dans le christianisme, au sens d'y glisser un relent de paganisme ou d'hérésie. Au contraire, ils rechristianisaient la chrétienté. Ils ramenèrent le christianisme malgré certaines tendances historiques pétrifiées par maintes écoles et autorités considérables de l'Église. Ils utilisèrent des instruments et des armes qui paraissaient à beaucoup paganisantes ou hérétiques. La nature fut pour saint François ce qu'Aristote fut pour saint Thomas. Certains estimaient qu'ils avaient recours à une divinité et un sage païens. Ce que tous deux firent en réalité constituent l'objet principal de ce livre. Il est bon de pouvoir comparer Thomas à un saint plus connu et moins intimidant car cela permet de considérer son œuvre de la façon la plus simple. Il paraîtra paradoxal, peut-être, de déclarer que ces deux saints nous ont délivrés d'un cauchemar effrayant, le pur spiritualisme. Il est à craindre que je sois mal compris si je professe que, par son amour des animaux, saint François nous a sauvés d'être bouddhistes et que, par son amour de la philosophie grecque, saint Thomas nous a protégés d'être platoniciens. Le mieux donc est de dire la vérité sous sa forme la plus simple : ces deux grands saints ont réaffirmé l'Incarnation et ramené Dieu sur terre.
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{{Réf Livre
|titre=Saint Thomas du Créateur
|auteur=Gilbert Keith Chesterton
|éditeur=Dominique Martin Morin
|année=2011
|année d'origine=1933
|page=27
|ISBN=978-2-85652-325-4
}}
 
{{citation|
Quelques grands personnages ont marqué l'histoire : saint Thomas d'Aquin est l'un d'eux. Il est vrai de dire qu'il est un très grand homme qui a réconcilié religion et raison ; ouvert les voies à l'expérimentation scientifique ; rendu aux sens leur dignité de fenêtres de l'âme et à la raison son droit divin à se nourrir de fait ; affirmé que la foi devait s'assimiler à la substantifique moelle de la plus dense et de la plus pragmatique des philosophies païennes. C'est un fait, l'Aquinate livrait bataille en stratège digne de [[Napoléon]] pour la vraie lumière et la vraie libéralité, si on le compare avec ses rivaux ou d'ailleurs ceux qui lui succédèrent ou l'évincèrent. Ceux qui, pour diverses raisons, ont cru devoir accepter la Réforme devaient néanmoins faire face a cette évidence que le Scolastique était le vrai réformateur et que les réformateurs protestants n'étaient en comparaison que des réactionnaires.
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{{Réf Livre
|titre=Saint Thomas du Créateur
|auteur=Gilbert Keith Chesterton
|éditeur=Dominique Martin Morin
|année=2011
|année d'origine=1933
|page=30
|ISBN=978-2-85652-325-4
}}
 
{{citation|
Albert le souabe, bien nommé Le Grand, est le fondateur de la science moderne. Il a contribué plus que quiconque a préparer le mouvement qui a fait de l'alchimie, la chimie et de l'astrologie, l'astronomie. En son temps et en ce sens, il fut presque le premier astronome. La légende, curieusement, en a presque fait le dernier des astrologues. Les historiens sérieux abandonnent enfin l'idée absurde que l'Église médiévale persécutait les scientifiques comme sorciers, idée qui n'était pas loin d'être l'exact contraire de la vérité.
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{{Réf Livre
|titre=Saint Thomas du Créateur
|auteur=Gilbert Keith Chesterton
|éditeur=Dominique Martin Morin
|année=2011
|année d'origine=1933
|page=57
|ISBN=978-2-85652-325-4
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{{citation|
Il savait, comme tout bon professeur, que le cancre n'est pas toujours un cancre. Il s'amusa d'apprendre le surnom de Bœuf muet que les camarades du cancre lui avaient donné. Tout cela était assez naturel. Ce qui le fut moins, ce fut le ton et la force et presque la violence de son exclamation lorsqu'il se décida à dire son sentiment. Car l'Aquinate était encore considéré comme l'un de ses étudiants des plus obscurs, des plus effacés et des moins brillants et prometteurs, lorsque le Grand Albert parla enfin et lança sa prophétie fameuse : « Vous l'appelez le Bœuf muet. Et moi je vous dis qu'un jour le mugissement de ce Bœuf remplira l'univers. »
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{{Réf Livre
|titre=Saint Thomas du Créateur
|auteur=Gilbert Keith Chesterton
|éditeur=Dominique Martin Morin
|année=2011
|année d'origine=1933
|page=61
|ISBN=978-2-85652-325-4
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{{citation|
La vérité est que l'Église catholique commença par être platonicienne — peut-être même trop. L'air doré de la Grèce que respirèrent les grands théologiens grecs étaient saturé de [[Platon]]. Les Pères de l'Église furent plus authentiquement néo-platoniciens que les néo-néo-platoniciens de la Renaissance. Chrysostome ou Basile pensent tout naturellement ''Logos'' ou ''Sofia'', qui est le mot des philosophes, comme n'importe quel tenant d'une religion actuelle pense question sociale, progrès et crise économique mondiale. L'évolution intellectuelle de saint Augustin, qui fut platonicien avant d'être manichéen et manichéen avant d'être catholique, suit une courbe naturelle. C'est ici exactement que l'on peut apercevoir la première faille, le signe avant-coureur du danger d'être trop platonicien.
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{{Réf Livre
|titre=Saint Thomas du Créateur
|auteur=Gilbert Keith Chesterton
|éditeur=Dominique Martin Morin
|année=2011
|année d'origine=1933
|page=67
|ISBN=978-2-85652-325-4
}}
 
{{citation|
Il s'était battu pour établir une entente durable entre la philosophie et la science. Il avait réussi comme il avait réussi à déterminer les domaines propres de la foi et de la recherche. Détermination sur laquelle les catholiques s'accordèrent et dont ils ne se départirent jamais sans résultats catastrophiques. Le scientifique poursuivrait librement ses expériences et ses recherches sans prétendre à une connaissance infaillible et irrévocable, qu'il serait contraire à ses principes de revendiquer. L'Église, de son côté, poursuivrait son œuvre d'explication et de définition du donné révélé sans prétendre à le modifier en quoi que ce soit, ce qui serait contraire à ses principes.
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{{Réf Livre
|titre=Saint Thomas du Créateur
|auteur=Gilbert Keith Chesterton
|éditeur=Dominique Martin Morin
|année=2011
|année d'origine=1933
|page=77,78
|ISBN=978-2-85652-325-4
}}
 
{{citation|
À l'intellectuel morbide de la Renaissance qui s'interroge : « Être ou ne pas être ? Telle est la question », le massif docteur médiéval répond d'une voix de tonnerre : « Être ! Tel est la réponse. » Cela vaut qu'on y insiste. Car il ne faudrait pas croire, ce que l'on fait volontiers, que la Renaissance marque le moment où l'on commence à faire confiance à la vie. C'est l'époque au contraire où, pour la première fois, quelques esprits commencèrent à désespérer de la vie. Le Moyen Âge avait mis des freins à l'universel appétit de vivre qui tournait parfois à la fureur de vivre. Les freins furent quelquefois exagérément serrés et il est arrivé que des interdits soient promulgués en termes brutaux, voire carrément féroces. Mais ils servaient à contenir une force naturelle très puissante : la force d'hommes qui veulent vivre. Avant l'apparition de la pensée dite moderne, on n'avait jamais eu à combattre des hommes qui désiraient mourir.
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{{Réf Livre
|titre=Saint Thomas du Créateur
|auteur=Gilbert Keith Chesterton
|éditeur=Dominique Martin Morin
|année=2011
|année d'origine=1933
|page=96
|ISBN=978-2-85652-325-4
}}
 
{{citation|
Seule sur la terre, élevée au-dessus de toutes les roues et libérée de tous les tourbillons de la terre se tient la foi de saint Thomas. Elle s'appuie sur une métaphysique plus savante que celle de l'Orient, et déploie une splendeur qui surpasse celle du paganisme. Elle est absolument unique dans son assertion que la vie est une aventure qui vaut la peine d'être vécue, qui possède un grand commencement et une grande fin. Elle s'enracine dans la joie primordiale d'un Dieu créateur et s'épanouit dans le bonheur éternel du genre humain. Elle s'ouvre sur le chœur colossal où les enfants du Très-Haut entonnent des chants d'allégresse et s'achève en une fraternité mystique, mystérieusement annoncée en des termes qui dansent dans l'esprit comme un air antique : « Car il prendra ses délices avec les enfants des hommes»
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{{Réf Livre
|titre=Saint Thomas du Créateur
|auteur=Gilbert Keith Chesterton
|éditeur=Dominique Martin Morin
|année=2011
|année d'origine=1933
|page=98
|ISBN=978-2-85652-325-4
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{{citation|
« Existe-t-il quelque chose ? » À cette question, Saint-Thomas commence par répondre : « Oui ». S'il commençait par répondre non, ce ne serait pas le commencement mais la fin. C'est ce qu'un certain nombre d'entre nous appelle le bon sens. Ou il n'y a ni philosophes ni philosophies, ni penseurs ni pensées, ni rien, ou il y a un réel jeté entre l'esprit et la réalité. Quant à ce que suppose son premier pas, saint Thomas est moins exigeant que nombre de penseurs, beaucoup moins que la plupart des rationalistes et des matérialistes. Nous allons voir qu'il se satisfait de dire que sa réponse implique la reconnaissance de l'''Ens'' ou Être comme quelque chose d'absolument extérieur à nous. L' ''Ens'' est l' ''Ens''. Les œufs sont les œufs. Il est impossible de soutenir que tous les œufs proviennent d'un merle blanc.
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{{Réf Livre
|titre=Saint Thomas du Créateur
|auteur=Gilbert Keith Chesterton
|éditeur=Dominique Martin Morin
|année=2011
|année d'origine=1933
|page=127
|ISBN=978-2-85652-325-4
}}