« Roger Martin du Gard » : différence entre les versions

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==== sur le bourgeois ====
{{citation|citation= «&thinsp;Comme il semble être à l'aise dans son luxe&thinsp;», songeait Jacques. «&thinsp;La vanité de Père <nowiki>[Papa]</nowiki>... La vanité aristocratique du Bourgeois&thinsp;!... Quelle race&thinsp;!... On dirait, ma parole, qu'ils prennent pour une supériorité, non seulement leur fortune, mais leur habitude de bien vivre, leur goût du confort, de la &ldquo;qualité&rdquo;! Ça devient pour eux un mérite personnel&thinsp;! Un mérite qui leur crée des droits sociaux&thinsp;! Et ils trouvent parfaitement légitime cette &ldquo;considération&rdquo; dont ils jouissent&thinsp;! Légitimes, leur autorité, l'asservissement d'autrui&thinsp;! Oui, ils trouvent tout naturel de &ldquo;posséder&rdquo;! Et ils trouvent tout naturel que ce qu'ils possèdent soit inattaquable, protégé par les lois contre la convoitise de ceux qui n'ont rien&thinsp;! Généreux, oh, sans doute&thinsp;! Tant que cette générosité est un luxe de plus&thinsp;: une générosité qui fait partie des dépenses superflues...» Et Jacques <nowiki>[s']</nowiki>évoquait la vie précaire de ses amis suisses<ref>Une communauté internationale d'exilés socialistes et communistes à Genève</ref> qui, privés du superflu, s'entre-partageaient le nécessaire, et pour qui l'entraide était toujours un risque de manquer du minimum.}}
{{Réf Livre|titre=Les Thibault |auteur= Roger Martin du Gard |année d'origine= 1936 |éditeur= Gallimard |collection= Folio |année= 1980 |tome= III&#x2162;, ''L'été 1914'' |page= 132-133 |chapitre= XIV&#x2169;&#x2163; }}
 
==== Sur les causes de la guerre mondiale ====
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<p>Pourquoi pensa-t-il soudain au gendarme qui était venu, un matin de cet hiver, à l'heure où il allait partir pour l'hôpital, changer l'ordre de mobilisation de son livret&thinsp;? Il se souvint qu'il n'avait même pas eu la curiosité de regarder quelle était sa nouvelle affectation. Après le départ du gendarme, il avait jeté le livret dans quelque tiroir &mdash; il ne savait même plus où...
<p>&mdash; Tu n'as pas l'air de comprendre, Antoine. Nous sommes arrivés au moment où, si tous font comme toi, si tous laissent les choses aller, la catastrophe est inévitable. Déjà, à l'heure actuelle, il suffirait, pour la déclencher, d'un rien, d'un stupide coup de feu sur la frontière austro-serbe...}}
{{Réf Livre|titre=Les Thibault |auteur= Roger Martin du Gard |année d'origine= 1936 |éditeur= Gallimard |collection= Folio |année= 1980 |tome= III&#x2162;, ''L'été 1914'' |page= 138 |chapitre= XV&#x2169;&#x2164; }}
 
{{citation|citation=
<p>&mdash; Tu dis&thinsp;: ''psychose'' de guerre...», reprit Antoine. «&thinsp;Ta, ta, ta&thinsp;! Je n'attache pas la même importance que toi à ces facteurs psychiques... La politique, c'est, par essence, le domaine des choses concrètes&thinsp;; un domaine, où les généreux élans des choeursch&oelig;urs sensibles comptent moins encore qu'ailleurs&thinsp;!... Alors, même si les dangers que tu annonces sont réels, nous n'y pouvons rien. Absolument rien. Ni toi, ni moi, ni personne&thinsp;!
<p>Jacques se leva avec impétuosité:
<p>&mdash; Ce n'est pas vrai&thinsp;!&thinsp;», cria-t-il, en proie à une indignation que, cette fois, il ne réussissait pas à contenir. «&thinsp;Comment&thinsp;! Devant une pareille menace, il n'y aurait rien à faire, qu'à plier le dos et à continuer sa petite besogne, en attendant la catastrophe&thinsp;! C'est monstrueux&thinsp;! Heureusement pour les peuples, heureusement pour vous autres, il y a des hommes qui veillent, des hommes qui n'hésiteront pas, demain, à risquer leur vie, s'il le faut, pour préserver l'Europe de...
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<p>&mdash; Des hommes&thinsp;?&thinsp;», fit-il, intrigué. «&thinsp;Quels hommes&thinsp;? Toi&thinsp;?...
<p>Jacques s'approcha du divan. Son irritation était tombée. Il regardait son frère de haut. Ses yeux rayonnaient de fierté, de confiance.
<p>&mdash; Sais-tu seulement qu'il y a, dans le monde, douze millions de travailleurs ''organisés''&thinsp;?&thinsp;», dit-il d'une voix lente, tandis que son front se couvrait de sueur. «&thinsp;Sais-tu que le [[wikipedia:Internationale ouvrière|mouvement socialiste international]] a derrière lui quinze ans de combats, d'efforts, de solidarité, de progression ininterrompue&thinsp;? Qu'il y a, aujourd'hui, d'importants groupes socialistes dans tous les parlements d'Europe&thinsp;? Que ces douze millions de partisans sont répartis sur plus de vingt pays différents&thinsp;? Plus de vingt partis socialistes, qui forment, d'un bout à l'autre du monde, une immense chaîne, une seule masse fraternelle&thinsp;?... Et que leur idée dominante, le noeudn&oelig;ud du pacte, c'est la haine du militarisme, la résolution acharnée de lutter contre la guerre, quelle qu'elle soit, d'où qu'elle vienne&thinsp;? &mdash; parce que la guerre, c'est toujours une manoeuvreman&oelig;uvre capitaliste, dont le peuple...
<p>&mdash; Monsieur est servi&thinsp;», dit Léon en ouvrant la porte.
<p>Jacques, interrompu, s'épongea le front et regagna son fauteuil. Puis, dès que le domestique eut disparu, il murmura en guise de conclusion:
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<p>Pendant quelques secondes, Antoine contempla son frère, sans répondre. La ligne sinueuse de ses sourcils formait, au dessus de son regard encaissé, une barre tendue qui exprimait la concentration de sa pensée.
<p>&mdash; Parfaitement.», articula-t-il enfin, sur un ton énigmatique. }}
{{Réf Livre|titre=Les Thibault |auteur= Roger Martin du Gard |année d'origine= 1936 |éditeur= Gallimard |collection= Folio |année= 1980 |tome= III&#x2162;, ''L'été 1914'' |page= 156 |chapitre= XV&#x2169;&#x2164; }}
 
==== Sur les grèves ouvrières et manifestations socialistes en Russie ====
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<p><nowiki>[...]</nowiki>
<p>«&thinsp;Les grévistes n'ont pas d'armes... Des pavés, des bouteilles, des bidons de pétrole... Pour arrêter les charges ils foutent le feu aux maisons... J'ai vu brûler le pont Semsonievsky... Toute la nuit, partout, ça brûle... Des centaines de morts... Des centaines, des centaines d'arrestations... Tout le monde suspect... Nos journaux sont interdits depuis dimanche... Nos rédacteurs, en prison... C'est la révolution... Il était temps&thinsp;: sans révolution, ce serait la guerre... Ton Poincaré, il a fait du mal chez nous, beaucoup de mal...» }}
{{Réf Livre|titre=Les Thibault |auteur= Roger Martin du Gard |année d'origine= 1936 |éditeur= Gallimard |collection= Folio |année= 1980 |tome= III&#x2162;, ''L'été 1914'' |page= 267 |chapitre= XXVII&#x2169;&#x2169;&#x2166; }}
 
==== ''L'Action française'' ====
{{Citation|citation= Seule, [[wikipedia:L'Action française (quotidien)|''L'Action française'']] manifestait ouvertement son inquiétude. L'occasion était belle d'accuser, plus violemment que jamais, la faiblesse spécifique du gouvernement républicain en matière de politique extérieure, et de flétrir l'antipatriotisme des partis de gauche. Les socialistes étaient particulièrement visés. Non content de répéter, comme chaque jour depuis des années, que [[wikipedia:Jean Jaurès|Jaurès]] était un traître à la solde de l'Allemagne, [[wikipedia:Charles Maurras|Charles Maurras]], exaspéré par les vibrants appels au pacifisme international que multipliait [[wikipedia:L'Humanité|''L'Humanité'']], semblait presque, aujourd'hui, désigner Jaurès au poignard libérateur de quelque [[wikipedia:Charlotte Corday|Charlotte Corday]]&thinsp;: ''Nous ne voudrions déterminer personne à l'assassinat politique,'' écrivait-il, avec une prudente audace. ''Mais que M. Jaurès soit pris de tremblement&thinsp;! Son article est capable de suggérer à quelque énergumène le désir de résoudre par la méthode expérimentale la question de savoir si rien ne serait changé à l'ordre invincible, dans le cas où le sort de [[wikipedia:Gaston Calmette|M. Calmette]] serait subi par M. Jean Jaurès.''}}
{{Réf Livre|titre=Les Thibault |auteur= Roger Martin du Gard |année d'origine= 1936 |éditeur= Gallimard |collection= Folio |année= 1980 |tome= III&#x2162;, ''L'été 1914'' |page= 269-270 |chapitre= XXVIII&#x2169;&#x2169;&#x2167; }}
 
== Notes ==