La Danse de Gengis Cohn
livre de Romain Gary
La Danse de Gengis Cohn est un roman de Romain Gary, écrit en 1967 et publié par Gallimard.
Partie 1 : Le dibbuk
modifierChapitre I : Je me présente
modifier Mon nom est Cohn, Gengis Cohn. Naturellement, Gengis est un pseudonyme : mon, vrai prénom était Moïché, mais Gengis allait mieux avec mon genre de drôlerie. Je suis un comique juif et j'étais très connu jadis, dans les cabarets yiddish : d'abord au Schwarze Schickse de Berlin, ensuite au Motke Ganeff de Varsovie, et enfin à Auschwitz.
- La Danse de Gengis Cohn, Romain Gary, éd. Gallimard, 1995 (ISBN 2-07-039302-X), p. 11 (voir la fiche de référence de l'œuvre)
Lorsque la police avoue son impuissance, je me sens tout regaillardi : il y a de l'espoir.
- La Danse de Gengis Cohn, Romain Gary, éd. Gallimard, 1995 (ISBN 2-07-039302-X), p. 16 (voir la fiche de référence de l'œuvre)
Chapitre III : Je tiens à préciser un point d'histoire
modifierLe rire est le propre de l'homme.
- La Danse de Gengis Cohn, Romain Gary, éd. Gallimard, 1995 (ISBN 2-07-039302-X), p. 38 (voir la fiche de référence de l'œuvre)
- Citation choisie pour le 9 septembre 2009.
À Berlin, nous avons en ce moment un rabbin – il est venu de Londres – le rabbin David Weiz. Eh bien, il a confié au journal anglais que ce qui le surprend et l'attriste un peu, c'est, je cite, – « cette façon qu'ont les Berlinois de le montrer du doigt et de rire de lui lorsqu'il sort de la synagogue et rentre à la maison, tout le long du chemin ». Vous voyez que je n'invente rien et que notre devoir à nous autres, comiques juifs – tous les six millions – est de rester là, à faire rigoler les Allemands jusqu'à ce qu'ils disposent enfin d'armes plus puissantes que le rire.
- La Danse de Gengis Cohn, Romain Gary, éd. Gallimard, 1995 (ISBN 2-07-039302-X), p. 42 (voir la fiche de référence de l'œuvre)
Chapitre IV : Le rire est le propre de l'homme
modifierC'est assez curieux, les chefs-d'œuvres, vous ne trouvez pas ? Vous ne trouvez pas qu'ils ont quelque chose de dégueulasse ? Je dis ça comme ça, à propos de bottes. Mettez-vous dans un trou qu'on vous aura fait creuser en famille, regardez les mitrailleuses et pensez à la Joconde. Vous verrez que ce sourire... Tfou. Ignoble.
- La Danse de Gengis Cohn, Romain Gary, éd. Gallimard, 1995 (ISBN 2-07-039302-X), p. 45 (voir la fiche de référence de l'œuvre)
Lorsque Hitler avait ordonné l'extermination des romanichels, on dit que de très nombreux tzigoïner avaient eux-mêmes tué leurs femmes et leurs enfants, volant ainsi les SS de l'unique satisfaction qu'ils pouvaient puiser de leur contact avec une race inférieure. Les tziganes volent tout, c'est bien connu.
- La Danse de Gengis Cohn, Romain Gary, éd. Gallimard, 1995 (ISBN 2-07-039302-X), p. 47 (voir la fiche de référence de l'œuvre)
Nous savons que Dieu n'est pas inaccessible à la pitié. Il a ses moments de distraction, comme tout le monde : parfois, il oublie un homme, et ça fait une vie heureuse.
- La Danse de Gengis Cohn, Romain Gary, éd. Gallimard, 1995 (ISBN 2-07-039302-X), p. 48 (voir la fiche de référence de l'œuvre)
Chapitre IX : Schwarze Schickse
modifierLa différence entre les Allemands héritiers d'une immense culture et les Simbas incultes, c'est que les Simbas mangeaient leurs victimes, tandis que les Allemands les transformaient en savon. Ce besoin de propreté, c'est la culture.
- La Danse de Gengis Cohn, Romain Gary, éd. Gallimard, 1995 (ISBN 2-07-039302-X), p. 79 (voir la fiche de référence de l'œuvre)
Chapitre XI : Un cœur simple
modifierIl est permis d'avoir de l'idéal, des aspirations et de se donner beaucoup de mal pour essayer de les réaliser. On peut attendre le messie, chercher le sauveur, l'homme providentiel, le surhomme, sans se faire traiter de tous les noms. Ou alors, il n'y a qu'à dire que l'humanité est une frigide et une détraquée, condamnée à l'échec. Car enfin, il n'y a pas que l'Allemagne qui rêve, désire, attend, essaie, échoue, recommence, essaie toujours et n'aboutit jamais. On peut avoir le goût de l'absolu, de la possession totale – de la solution finale, si vous voulez – sans jamais y parvenir, mais sans se décourager. L'espoir, c'est ça qui compte.
- La Danse de Gengis Cohn, Romain Gary, éd. Gallimard, 1995 (ISBN 2-07-039302-X), p. 89 (voir la fiche de référence de l'œuvre)
Chapitre XII : Le retour aux sources
modifier[...] le renouveau a toujours été d'abord un retour aux sources.
- La Danse de Gengis Cohn, Romain Gary, éd. Gallimard, 1995 (ISBN 2-07-039302-X), p. 96 (voir la fiche de référence de l'œuvre)
Chapitre XIII : Elle est au-dessus de mes moyens
modifierLes jeunes, ils sont venus au monde avec la bombe atomique, ils ont des soleils dans les yeux ! Pour eux, vos camps d'extermination, ça fait pedzouille ! Ils en ont assez de bricolages ! Ils en ont soupé de nos bricoles juives, de nos petits pipis ! Cessez donc de vous accrocher à votre magot, à votre petit capital de souffrance, d'essayer de vous rendre plus intéressant que les autres. Les privilégiés, les peuples élus, il n'y en aura bientôt plus. Ils sont deux milliards, mon ami. Alors, qui cherchez-vous à impressionner, avec vos six millions ?
- La Danse de Gengis Cohn, Romain Gary, éd. Gallimard, 1995 (ISBN 2-07-039302-X), p. 103 (voir la fiche de référence de l'œuvre)
Chaptitre XVII : On nous l'avait caché
modifier – Lily ? Mais elle ne rêve que de paix.
– C'est le rêve le plus sanglant, vous devriez le savoir.
– C'est le rêve le plus sanglant, vous devriez le savoir.
- La Danse de Gengis Cohn, Romain Gary, éd. Gallimard, 1995 (ISBN 2-07-039302-X), p. 132 (voir la fiche de référence de l'œuvre)
Chapitre XVIII : Il lui faut un homme providentiel
modifier[...] les envoyés spéciaux anglais sont particulièrement excités, vous pensez bien, ils n'ont que ça en tête, les atrocités allemandes. Les bombardements de Londres, ils ne nous les ont jamais pardonnés. Vingt après, le Sunday Times a encore la hutzpé de publier un supplément illustré sur « l'antisémitisme en Allemagne ». Quel antisémitisme ? Il ne reste que trente mille Juifs vivants en Allemagne, vous croyez que c'est avec ça qu'on peut se refaire, se redonner une idéologie ?
- La Danse de Gengis Cohn, Romain Gary, éd. Gallimard, 1995 (ISBN 2-07-039302-X), p. 143 (voir la fiche de référence de l'œuvre)
J'ai froid dans le dos. Je sens soudain qu'un danger terrible plane sur ceux de ma race : des nazis qui ne seraient pas antisémites. Vous imaginez un peu le mal que ça peut nous faire, un Hitler qui ne serait pas du tout contre les Juifs, au contraire, qui serait seulement contre les nègres ? Les Allemands ont failli nous avoir. Heureusement qu'ils étaient racistes.
- La Danse de Gengis Cohn, Romain Gary, éd. Gallimard, 1995 (ISBN 2-07-039302-X), p. 146 (voir la fiche de référence de l'œuvre)
Partie 2 : Dans la forêt de Geist
modifierChapitre XXI : La princesse de légende
modifierMais je vais vous dire quelque chose, entre nous, dans le plus grand secret : Dieu n'est pas un homme.
Chut.
Chut.
- La Danse de Gengis Cohn, Romain Gary, éd. Gallimard, 1995 (ISBN 2-07-039302-X), p. 176 (voir la fiche de référence de l'œuvre)
Chapitre XXII : Un couple parfait
modifierDieu, on connaît ses limites, ça ne va jamais très loin, mais avec les hommes, c'est illimité, ils sont capables de tout.
- La Danse de Gengis Cohn, Romain Gary, éd. Gallimard, 1995 (ISBN 2-07-039302-X), p. 181 (voir la fiche de référence de l'œuvre)
Chapitre XXIII : Frère Océan
modifier Je me souviens soudain que de la souffrance du Christ, des milliers de salopards ont tiré de très belles œuvres. Ils s'en sont régalés. Même en descendant plus bas, je me rappelle que des cadavres de Guernica, Picasso a tiré Guernica et Tolstoï a bénéficié de la guerre et de la paix pour son Guerre et Paix. J'ai toujours pensé que si on parle toujours d'Auschwitz, c'est uniquement parce que ça n'a pas encore été effacé par une belle œuvre littéraire.
- La Danse de Gengis Cohn, Romain Gary, éd. Gallimard, 1995 (ISBN 2-07-039302-X), p. 188 (voir la fiche de référence de l'œuvre)
Chapitre XXIV : Tous des impuissants
modifier — C'est là tout le secret. L'absolu, ça ne se mange pas avec les doigts.
- La Danse de Gengis Cohn, Romain Gary, éd. Gallimard, 1995 (ISBN 2-07-039302-X), p. 196 (voir la fiche de référence de l'œuvre)
Chapitre XXV : Le bouc
modifierMon oncle, Anathole Cohn de Lodz, qui est mort dans son lit, m'avait beaucoup étonné parce qu'à ses derniers instants, il s'était mis à rire. Je lui avais demandé ce qu'il avait. « Mes enfants, quand je pense que moi, un pauvre Juif sans éducation, je vais avoir le sort de Jules César ! »
- La Danse de Gengis Cohn, Romain Gary, éd. Gallimard, 1995 (ISBN 2-07-039302-X), p. 206 (voir la fiche de référence de l'œuvre)
Chapitre XXVIII : Encore les natures d'élite
modifierLa nature, je ne sais pas si vous le savez, vit d'espoir. Elle cache une très grande attente dans son sein. Hé oui, elle est un peu rêveuse, elle aussi, elle ne perd pas courage. Elle compte y parvenir, un jour. Y revenir plutôt. Le retour au paradis, à l'Éden de ses débuts. Elle compte beaucoup sur l'homme pour cela. Sur sa disparition, je veux dire.
- La Danse de Gengis Cohn, Romain Gary, éd. Gallimard, 1995 (ISBN 2-07-039302-X), p. 231 (voir la fiche de référence de l'œuvre)
Chapitre XXIX : Schwarze Schikse
modifierJe me demande si ce n'est pas ça, le vrai, le très grand amour : deux êtres qui ne se rencontrent pas.
- La Danse de Gengis Cohn, Romain Gary, éd. Gallimard, 1995 (ISBN 2-07-039302-X), p. 237 (voir la fiche de référence de l'œuvre)
Partie 3 : La tentation de Gengis Cohn
modifierChapitre XXXIX : Le bouquet
modifier« Les nègres sont très fiers, Moshelé, m'avait-il expliqué. Seulement, avec leur peau noire, on voit tout de suite qu'ils sont différents. Alors, évidemment, les autres, ceux qui savent bien qu'ils sont des hommes à part entière, se sentent insultés, humiliés et envieux, et ils tuent parfois un noir pour forcer les autres à capituler et à accepter la fraternité, les obliger à devenir des hommes à part entière. Cette idée que les noirs sont différents, il y a des blancs que ça rend fou d'envie, ils ne peuvent pas accepter l'idée que certains ont eu la chance d'y couper.
- La Danse de Gengis Cohn, Romain Gary, éd. Gallimard, 1995 (ISBN 2-07-039302-X), p. 305 (voir la fiche de référence de l'œuvre)