Leïla Sebbar

écrivaine française
Article en cours de rédaction
Cet article est inachevé. Son état est provisoire et sera modifié. Une version améliorée est en préparation.
  • Veuillez prendre son état actuel avec prudence : Le plan et le contenu peuvent être incomplets, ou en révision.
  • Pour participer à cette amélioration, il vous est recommandé de consulter la page de discussion au préalable.
Cette page est une ébauche. N'hésitez pas à la modifier en ajoutant des citations admissibles !

Leïla Sebbar, née le 19 novembre 1941 en Algérie, est une écrivaine française.

Citations

modifier

Lettres parisiennes : autopsie de l'exil, 1986

modifier
Pour moi, la fiction c'est la suture qui masque la blessure, l'écart, entre les deux rives. Je suis là, à la croisée, enfin sereine, à ma place, en somme, puisque je suis une croisée qui cherche une filiation et qui écris dans une lignée, toujours la même, reliée à l'histoire, à la mémoire, à l'identité, à la tradition et à la transmission, je veux dire à la recherche d'une ascendance et d'une descendance, d'une place dans l'histoire d'une famille, d'une communauté, d'un peuple au regard de l'Histoire et de l'univers. C'est dans la fiction que je me sens sujet libre (de père, de mère, de clan, de dogmes…) et forte de la charge de l'exil. C'est là et seulement là que je me rassemble corps et âme et que je fais le pont entre les deux rives, en amont et en aval.
  • Paris, 27 avril 1984.


Le silence des rives, 1993

modifier
Qui viendra sur l'autre rive, dans la chambre blanche où je suis seul, depuis combien de jours, murmurer à mon oreille la prière des morts ? Qui me dira les mots de ma mère ?
  • Le silence des rives, Leïla Sebbar, éd. Stock, 1993  (ISBN 2-234-02553-2), partie I, p. 7


Qui me dira les mots de ma mère ? Dans la chambre blanche où je suis seul, qui viendra murmurer la prière des morts ? Et parlera la langue de ma terre à mon oreille, dans le silence de l'autre rive ?
  • Le silence des rives, Leïla Sebbar, éd. Stock, 1993  (ISBN 2-234-02553-2), partie II, p. 53


Qui me dira les mots de ma mère ? Qui saura, dans la chambre blanche où on me laisse seul, réciter la prière des morts ? Je ne vois personne et personne n'entend quand j'appelle, de l'autre côté de la mer.
  • Le silence des rives, Leïla Sebbar, éd. Stock, 1993  (ISBN 2-234-02553-2), partie III, p. 99


Dans la chambre blanche, sur l'autre rive, il n'est pas seul. Un homme, assis contre l'agonisant, murmure à son oreille la prière des morts, dans la langue de sa mère. Il la répète trois fois.
  • Le silence des rives, Leïla Sebbar, éd. Stock, 1993  (ISBN 2-234-02553-2), p. 147


Le baiser, 1997

modifier
Je n'ai pas compris les mots éclatés qui se dispersaient d'une bouche à l'autre, dans le désordre. J'avais sept ans, je ne savais pas encore que ce pays n'était pas le pays de mon père, que ce camp forestier, il ne l'aimait pas parce que c'était : « le camp de la honte », comme je l'entendais dire entre les pièces de linge, les femmes se parlaient sans se voir, elles parlaient beaucoup et moi, caché entre les draps, j'écoutais sans comprendre, je n'ai pas oublié, elles répétaient entre elles : « le camp du châtiment... C'est Dieu qui l'a voulu ».
  • « Monologue du soldat », Revue des mondes musulmans et de la Méditerranée, no70 « Épreuves d'écritures maghrébines », 1993 [texte intégral] [1]
  • « Monologue du soldat », dans Le baiser, Leïla Sebbar, éd. Hachette, 1997  (ISBN 9782012095267), p. 10-11


Les secrets de la guerre, les femmes et les hommes du camp forestier les voulaient secrets, je les ai surpris dans la confusion. Je savais qu'il me fallait absolument les retenir dans l'ombre des bois et des draps frappés par le mistral. Combien de pages mentales, clandestines ? Je ne voulais pas les écrire, il me semblait que j'aurais trahi ou que le sens se serait ainsi perdu. Les mots de la guerre qui avait enfermé mon père dans le camp forestier où il entendait les cigales étrangères comme des ennemis, ces mots ont écrit une histoire que je ne veux pas écrire aujourd'hui, tant que je suis encore un soldat dans la guerre des autres. Je ne sais pas quand je l'écrirai, ni si je l'écrirai, l'histoire de mon père captif.
  • « Monologue du soldat », dans Le baiser, Leïla Sebbar, éd. Hachette, 1997  (ISBN 9782012095267), p. 14-15


Je ne parle pas la langue de mon père, 2003

modifier
Je n'apprendrai pas la langue de mon père. Je veux l'entendre, au hasard de mes pérégrinations. Entendre la voix de l'étranger bien-aimé, la voix de la terre et du corps de mon père que j'écris dans la langue de ma mère.
  • Je ne parle pas la langue de mon père, Leïla Sebbar, éd. Julliard, 2003  (ISBN 2-260-01615-4), p. 125


L'arabe comme un chant secret, 2007

modifier
Et moi, dans cette histoire de corps, d'âme et de langue ? Fille d'un victime et d'une bourreau… Prise au piège. Tourmentée. Entre un masculin féminin et un féminin masculin. Qui est le père, qui est la mère ? Produit neutre, ni fille ni fils, enfant d'une union contre nature ? Fuguer dans la géographie physique et mentale pour échapper à la folie. Fuguer. Se sauver loin, de l'autre côté de la mer. Dans l'exil. Dans le silence des bibliothèques et des livres des autres. […] Privée de la terre natale, de la mémoire des père et mère, de l'intégrité du corps féminin, domestique, terrestre, séparée de la langue du père jamais parlée, la langue de ma mère me serre de plus près. Je suis dans les livres de la langue maternelle, dans le symbole institutionnel de la langue écrite pour toujours dans le labyrinthe de la bibliothèque.
  • « Le corps de mon père dans la langue de mère », Cahiers intersignes « Paradoxes du féminin en Islam », 1991 
  • « Le corps de mon père dans la langue de mère », dans L'arabe comme un chant secret, Leïla Sebbar, éd. Bleu autour, 2007  (ISBN 978-2-912019-75-2), p. 27


Des femmes arabes parlent entre elles dans un triste square de la terre française. Je marche encore et encore, seule, dans les mots déplacés, les voix des femmes qui bavardent dans l'exil, la terre de béton, la nouvelle terre où j'écris le corps de mon père dans la langue de ma mère, la langue de la France, ma langue agitée, violente et pudique, je suis poursuivie et séduite par la voix, les voix des femmes arabes qui ne se taisent pas.
  • « Le corps de mon père dans la langue de mère », dans L'arabe comme un chant secret, Leïla Sebbar, éd. Bleu autour, 2007  (ISBN 978-2-912019-75-2), p. 27-28


Les livres ne me quitteront pas. Ils ne m'ont pas apaisée, ceux que je lis, revenant à la langue de ma mère. […] Et les frères de mon père en langue arabe, je les lis, traduits, et, sous la langue française, j'entends la langue de la mère de mon père, elle n'est plus muette. Je peux désormais l'écouter, en clandestine, du côté des femmes arabes de la banlieue française. Je n'ai pas le sens des mots, j'ai seulement la voix de la langue des femmes.
  • « Le silence de la langue de mon père, l’arabe », Études littéraires, vol. 33, no3 « Algérie à plus d’une langue », 2001, p. 123 [texte intégral, lien DOI] .
  • « Le silence de la langue de mon père, l’arabe », dans L'arabe comme un chant secret, Leïla Sebbar, éd. Bleu autour, 2007  (ISBN 978-2-912019-75-2), p. 49


J'écris. Des livres. J'écris la violence du silence imposé, de l'exil, de la division, j'écris la terre de mon père, colonisée, maltraitée (aujourd'hui encore), déportée sauvagement, je l'écris dans la langue de ma mère. C'est ainsi que je peux vivre, dans la fiction, fille de mon père et de ma mère. Je trace mes routes algériennes dans la France.
  • « Le silence de la langue de mon père, l’arabe », dans L'arabe comme un chant secret, Leïla Sebbar, éd. Bleu autour, 2007  (ISBN 978-2-912019-75-2), p. 50


L'Algérie ne me quittera plus. Et je naîtrai à moi-même (il y faudra de longues années, des centaines de pages) de l'union qui m'éblouit sans m'aveugler, l'Algérie avec la France, mon père algérien avec ma mère française. Une histoire si singulière, si étrange, si discrète que je commence à peine à vouloir, pouvoir en parler, en écrire. Mais je n'y viens pas sans détours.
  • « Le retour de l’absente », dans L'arabe comme un chant secret, Leïla Sebbar, éd. Bleu autour, 2007  (ISBN 978-2-912019-75-2), p. 60


Pour arriver à moi, pour dire « je », il m'a fallu marcher longtemps, parler et vivre à distance réelle, proche dans l'imaginaire, il m'a fallu entendre, loin du pays natal, partout où elle se parlait, la voix de la langue de mon père, la voix de l'arabe, la langue étrangère, l'étrangère intime.
  • « Le retour de l’absente », dans L'arabe comme un chant secret, Leïla Sebbar, éd. Bleu autour, 2007  (ISBN 978-2-912019-75-2), p. 63


Je traduis l'Algérie, je traduis mon père dans la langue de ma mère. Je lui fabrique, je me fabrique une famille immense des deux côtés de la mer. Je crois ainsi rétablir une filiation rompue.
  • « Entendre l’arabe comme un chant sacré », dans L'arabe comme un chant secret, Leïla Sebbar, éd. Bleu autour, 2007  (ISBN 978-2-912019-75-2), p. 73


Cette langue arabe que les autres et moi aussi, longtemps, ont cru étrangère, hostile parfois et dangereuse, l'arabe de mon père donne émotion, chant profond à la langue de ma mère.
  • « Entendre l’arabe comme un chant sacré », dans L'arabe comme un chant secret, Leïla Sebbar, éd. Bleu autour, 2007  (ISBN 978-2-912019-75-2), p. 74


Voyage en Algéries autour de ma chambre, 2008

modifier
Toujours ce désir de savoir, deviner, supposer, soupçonner, voir et donner à voir, entendre et sentir. Chercher, rechercher sans méthode ni système, portée par le caprice et le hasard du voyage immobile, de la rencontre imprévue, du messager inconnu, du livre introuvable…
  • Voyage en Algéries autour de ma chambre : abécédaire, Leïla Sebbar, éd. Bleu autour, 2008  (ISBN 978-2-9120-1989-9), chap. Prologue, p. 10


Privée des livres de la bibliothèque de mes père et mère et des livres des bibliothèques lycéennes de Blida et de Kouba à Alger où je suis pensionnaire et liseuse cannibale, lorsque j'arrive à Aix-en-Provence, je nomadise d'une librairie à l'autre, j'entre, je regarde, je feuillette, je lis debout, les libraires ne me surveillent pas, ils ne savent pas que je suis devenue une voleuse de livres. C'est mon pain quotidien que je vole, oui je vole, j'ai volé beaucoup de livres. Je ne vole plus, j'écris.
  • Voyage en Algéries autour de ma chambre : abécédaire, Leïla Sebbar, éd. Bleu autour, 2008  (ISBN 978-2-9120-1989-9), chap. Librairie, p. 118


Dans le linceul blanc noué à la tête et aux pieds, aucune aïeule ne l'aura tissé pour moi, j'entendrai des chants arabo-andalous, judéo-arabes, et Kathleen Ferrier chantant Les leçons des ténèbres de Couperin.
  • Voyage en Algéries autour de ma chambre : abécédaire, Leïla Sebbar, éd. Bleu autour, 2008  (ISBN 978-2-9120-1989-9), chap. Musique, p. 136


Citations sur

modifier

Notes et références

modifier
  1. Texte repris aussi dans Le Ravin de la femme sauvage, 2007, p. 47-52 .

Voir aussi

modifier

Vous pouvez également consulter les articles suivants sur les autres projets Wikimédia :