Marguerite Yourcenar

femme de lettres française naturalisée américaine en 1947 (1903-1987)

Marguerite Yourcenar, de son vrai nom Marguerite Cleenewerck de Crayencour (Bruxelles, 8 juin 1903Mount Desert Island, États-Unis, 17 décembre 1987) est une écrivaine française. Elle fut la première femme à entrer à l'Académie française.

Marguerite Yourcenar en 1982.

Citations

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Alexis ou le Traité du Vain Combat, 1929

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Voir le recueil de citations : Alexis ou le Traité du vain combat

Denier du rêve, 1934

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Un grossissement de plus, et ces visages se décomposeraient en mouvements d'atomes, aussi indifférents à ce baiser que nous pouvons l'être aux amours démesurées des astres.
  • « Denier du rêve » (1934), dans Œuvres romanesques, Marguerite Yourcenar, éd. Gallimard, coll. « Bibliothèque de la Pléiade », 1982  (ISBN 2-07-011018-4), p. 246


Nouvelles orientales, 1938

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Voir le recueil de citations : Nouvelles orientales

Mémoires d'Hadrien, 1951

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Voir le recueil de citations : Mémoires d'Hadrien

L'Œuvre au noir, 1968

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Voir le recueil de citations : L'Œuvre au noir

Le Labyrinthe du monde

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(…) je m’arrête, prise de vertige devant l’inextricable enchevêtrement d’incidents et de circonstances qui plus ou moins nous déterminent tous.
  • Souvenirs pieux, Marguerite Yourcenar, éd. Gallimard, coll. « Folio », 1980, p. 11


Le fait reste que, même pour les moins gourmets, les moins gourmands ou les moins goinfres, vivre ensemble, c’est en partie manger ensemble.
  • Souvenirs pieux, Marguerite Yourcenar, éd. Gallimard, coll. « Folio », 1980, p. 21


Pendant ce temps, la terre tournait.
  • Souvenirs pieux, Marguerite Yourcenar, éd. Gallimard, coll. « Folio », 1980, p. 28


J’avais l’imperceptible recul du chien qui détourne le cou quand on lui présente un collier.
  • Souvenirs pieux, Marguerite Yourcenar, éd. Gallimard, coll. « Folio », 1980, p. 52


Cette femme assurément douée d’agréments (…).
  • Souvenirs pieux, Marguerite Yourcenar, éd. Gallimard, coll. « Folio », 1980, p. 121


Ce qui surnage comme toujours, c’est l’infinie pitié pour le peu que nous sommes, et, contradictoirement, le respect et la curiosité de ces fragiles et complexes structures, posées comme sur pilotis à la surface de l’abîme, et dont aucune n’est tout à fait pareille à aucune autre.
  • Souvenirs pieux, Marguerite Yourcenar, éd. Gallimard, coll. « Folio », 1980, p. 157


Comme toujours, chaque fois qu’il se tourne vers le monde extérieur, la vie est là, avec son imprévu, sa foncière tristesse, sa décevante douceur, et sa presque insupportable plénitude.
  • Souvenirs pieux, Marguerite Yourcenar, éd. Gallimard, coll. « Folio », 1980, p. 166


Il se souvient d’avoir écrit quelque part qu’il n’y avait devant la vie et la mort que deux attitudes valables, le christianisme et le stoïcisme.
  • Souvenirs pieux, Marguerite Yourcenar, éd. Gallimard, coll. « Folio », 1980, p. 170


(…) cette époque qui nous semble à distance épaisse et inerte, suspendue comme un énorme remblai au bord de l’abîme du XXè siècle.
  • Souvenirs pieux, Marguerite Yourcenar, éd. Gallimard, coll. « Folio », 1980, p. 257


Mon visage commence à se dessiner sur l’écran du temps.
  • Souvenirs pieux, Marguerite Yourcenar, éd. Gallimard, coll. « Folio », 1980, p. 363


C'est par l'effet de notre arrogance, qui sans cesse refuse aux hommes du passé des perceptions pareilles aux nôtres, que nous dédaignons de voir dans les fresques des cavernes autre chose que les produits d'une magie utilitaire : les rapports entre l'homme et la bête, d'une part, entre l'homme de son art, de l'autre, sont plus complexes et vont plus loin.
  • Archives du Nord, Marguerite Yourcenar, éd. Gallimard, coll. « Folio », 1977  (ISBN 978-2-07-037328-4), partie I, chap. La nuit des temps, p. 23


Nos livres d'école nous ressassaient que ces Gaulois au grand cœur ne craignaient rien, sinon que le ciel ne tombât. Plus courageux ou plus désespérés qu'ils ne l'étaient, nous avons pris l'habitude, depuis 1945, de nous attendre à voir le ciel tomber.
  • Archives du Nord, Marguerite Yourcenar, éd. Gallimard, coll. « Folio », 1977  (ISBN 978-2-07-037328-4), partie I, chap. La nuit des temps, p. 25


Tout a déjà été éprouvé et expérimenté à mille reprises, mais souvent sans avoir été dit, ou sans que les paroles qui le disaient subsistent, ou, si elles le font, nous soient intelligibles ou nous émeuvent encore. Comme les nuages dans le ciel vide, nous nous formons et nous dissipons sur ce fond d'oubli.
  • Archives du Nord, Marguerite Yourcenar, éd. Gallimard, coll. « Folio », 1977  (ISBN 978-2-07-037328-4), partie I, chap. Le réseau, p. 45


S'il est question de tout un ensemble de transmissions plus inanalysables, c'est de la terre entière que nous sommes les légataires universels. Un poète ou un sculpteur grec, un moraliste romain né en Espagne, un peintre issu d'un notaire florentin et d'une servante d'auberge dans un village des Apennins, un essayiste périgourdin sorti d'une mère juive, un romancier russe ou un dramaturge scandinave, un sage hindou ou chinois nous ont peut-être davantage formés que ces hommes et ces femmes dont nous avons été l'un des descendants possibles, un de ces germes dont des milliards se perdent sans fructifier dans les cavernes du corps ou entre les draps des époux.
  • Le passage fait notamment allusion à Sénèque (philosophe romain né à Corduba, actuelle Cordoue, dans la province romaine de Bétique, actuelle Andalousie), à Léonard de Vinci (fils du notaire Pierre de Vinci et de la paysanne Caterina di Meo Lippi, né au village d'Anchiano en Toscane avant d'aller étudier à Florence) et à Michel de Montaigne (auteur des Essais, né dans le Périgord, fils d'Antoinette de Louppes de Villeneuve).
  • Archives du Nord, Marguerite Yourcenar, éd. Gallimard, coll. « Folio », 1977  (ISBN 978-2-07-037328-4), partie I, chap. Le réseau, p. 47


De temps en temps, comme un cortège passant dans une rue tranquille jette les reflets de ses torches sur les vitres d'une maison endormie, et les fait tressaillir du bruit de ses tambours et de ses fifres, l'histoire ainsi projette ses feux sur une famille à peu près sans histoire.
  • Archives du Nord, Marguerite Yourcenar, éd. Gallimard, coll. « Folio », 1977  (ISBN 978-2-07-037328-4), partie I, chap. Le réseau, p. 49


Quand le juge des Plaideurs de Racine offre à sa future bru d'assister en guise de divertissement à une séance de torture, cette charmante Isabelle réagit comme elle le ferait de nos jours, où la même distraction pourrait malheureusement lui être offerte. « Eh, monsieur, peut-on voir souffrir des malheureux ? — Bon, cela fait toujours passer une heure ou deux. » Dialogue typique, où l'on sent que Racine est du côté d'Isabelle.
  • Archives du Nord, Marguerite Yourcenar, éd. Gallimard, coll. « Folio », 1977  (ISBN 978-2-07-037328-4), partie I, chap. Le réseau, p. 74


Dans le fallacieux combat entre l'ordre et la justice, Michel Charles s'est déjà rangé du côté de l'ordre. Il croira toute sa vie qu'un homme bien né, bien élevé, bien lavé, bien nourri et bien abreuvé sans excès, cultivé comme il convient qu'un homme de bonne compagnie le soit de son temps, est non seulement supérieur aux misérables, mais encore d'une autre race, presque d'un autre sang. Même s'il se rencontrait, parmi beaucoup d'erreurs, une petite parcelle de vérité dans cette vue qui, avouée ou tacite, a été celle de toutes les civilisations jusqu'à nos jours, ce qu'elle contient de faux finit toujours par lézarder toute société qui se repose sur elle. Au cours de son existence d'homme privilégié, mais pas nécessairement d'homme heureux, Michel Charles n'a jamais traversé de crise assez forte pour s'apercevoir qu'il était en dernière analyse le semblable de ces rebuts humains, peut-être leur frère. Il ne s'avouera pas non plus que tout homme, un jour ou l'autre, se voit condamné aux travaux forcés à perpétuité.
  • « Archives du Nord » (1977), dans Essais et mémoires, Marguerite Yourcenar, éd. Gallimard, coll. « Bibliothèque de la Pléiade », 1991  (ISBN 2-07-011212-8), partie II, chap. Le jeune Michel Charles, p. 1026


C'est toujours un moment grave que celui où un jeune esprit jusque là insoucieux de politique découvre soudain que l'injustice et l'intérêt mal entendu passent et repassent devant lui dans les rues d'une ville avec des effets de cape et d'uniforme, ou s'attablent au café sous l'aspect de bons bourgeois qui ne prennent pas parti.
  • Archives du Nord, Marguerite Yourcenar, éd. Gallimard, coll. « Folio », 1977  (ISBN 978-2-07-037328-4), partie II, chap. Le jeune Michel-Charles, p. 142-143


Néanmoins, à une époque où chacun ment ou déraisonne, où on n'a le choix qu'entre les défenseurs de l'ordre durcis dans leur moralité d'apparat sans pitié ni bonté et des idéologues amenant à force de gaffes l'heure des dictatures, entre les loups bien nourris d'une part et les moutons enragés de l'autre, le jeune homme qui s'amuse à fabriquer un presse-papiers avec des fragments de marbre est peut-être un réaliste.
  • Archives du Nord, Marguerite Yourcenar, éd. Gallimard, coll. « Folio », 1977  (ISBN 978-2-07-037328-4), partie II, chap. Rue Marais, p. 175


À la vérité, toutes les sociétés, quelles qu'elles soient, sont basées sur la possession des choses ; une bonne partie des gens qui se font peindre ont toujours exigé qu'on mît près d'eux leurs bibelots favoris, tout comme aux temps antiques ils auraient demandé qu'on les plaçât dans leurs tombes.
  • Archives du Nord, Marguerite Yourcenar, éd. Gallimard, coll. « Folio », 1977  (ISBN 978-2-07-037328-4), partie II, chap. Rue Marais, p. 183


Pour ces pharisiens qui se croient des chrétiens, aimer autrui comme soi-même est un de ces préceptes qui font du bien quand le curé les débite en chaire ; ceux qui ont faim et soif de la justice sont des émeutiers qui finissent au bagne.
  • Archives du Nord, Marguerite Yourcenar, éd. Gallimard, coll. « Folio », 1977  (ISBN 978-2-07-037328-4), partie II, chap. Rue Marais, p. 184


Les yeux de l'enfant et ceux du vieillard regardent avec la tranquille candeur de qui n'est pas encore entré dans le bal masqué ou en est déjà sorti. Et tout l'intervalle semble un tumulte vain, une agitation à vide, un chaos inutile par lequel on se demande pourquoi on a dû passer.
  • Archives du Nord, Marguerite Yourcenar, éd. Gallimard, coll. « Folio », 1977  (ISBN 978-2-07-037328-4), partie II, chap. Rue Marais, p. 203


Quoi ? L'Éternité, 1988

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Cette porte entrouverte donne à la fois sur la plus concrète réalité et sur le plus fuyant des mystères, qui est le temps. L’éternité n’est sans doute que la même chose autrement, mais les rapports que nous entretenons avec ces deux notions sont à la fois infiniment rapprochées et à jamais susceptibles d’une solution adéquate, comme ceux du diamètre d’un cercle avec sa circonférence.
  • « Quoi ? L’Éternité » (1988), dans Essais et mémoires, Marguerite Yourcenar, éd. Gallimard, coll. « Bibliothèque de la Pléiade », 1991  (ISBN 2-07-011212-8), chap. Necromantia, p. 1127-1128 (lire en ligne)


Un homme obscur

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Il subsistait sans livres, n’ayant trouvé dans la maisonnette qu’une Bible qu’il brûla par poignées un jour où le poêle prenait mal. Mais il lui semblait maintenant que les livres qu’il lui était arrivé de lire (fallait-il juger d’après eux tous les livres ?) lui avaient fourni peu de chose, moins peut-être que l’enthousiasme ou la réflexion qu’il leur avait apportés; il pensait en tout cas qu’il eût été mal de ne pas s’absorber exclusivement dans la lecture du monde qu’il avait, maintenant et pour si peu de temps, sous les yeux et qui, pour ainsi dire, lui était échu en lot. Lire des livres, comme lamper de l’eau-de-vie, eût été une manière de s’étourdir pour ne pas être là. Et d’ailleurs, qu’étaient les livres ?
  • « Un homme obscur », dans Comme l’eau qui coule (Anna, Soror..., Un homme obscur, Une belle matinée), Marguerite Yourcenar, éd. Gallimard, 1982  (ISBN 2-07-021706-X), p. 196 (lire en ligne)


Reste […], aussi indépendant que possible de toute opinion inculquée, le quasi autodidacte nullement simple, mais délesté à l’extrême, se méfiant instinctivement de ce que les livres qu’il feuillette, les musiques qu'il lui arrive d'entendre, les peintures sur lesquelles se posent parfois ses yeux ajoutent à la nudité des choses, indifférent aux grands événements des gazettes, sans préjugé dans tout ce qui touche à la vie des sens, mais aussi sans l’excitation ou les obsessions factices qui sont l’effet de la contrainte ou d’un érotisme acquis, prenant la science et la philosophie pour ce qu’elles sont, et surtout pour ce que sont les savants et les philosophes qu’il rencontre, et levant sur le monde un regard d’autant plus clair qu’il est plus incapable d’orgueil. Il n’y a rien d’autre à dire sur Nathanaël.
  • « Postface d’Un homme obscur », dans Comme l’eau qui coule (Anna, Soror..., Un homme obscur, Une belle matinée), Marguerite Yourcenar, éd. Gallimard, 1982  (ISBN 2-07-021706-X), p. 260-261


Il y a deux sortes d'êtres humains : ceux qui écartent la mort de leur pensée pour mieux et plus librement vivre, et ceux qui, au contraire, se sentent d'autant plus sagement et fortement exister qu'ils la guettent dans chacun des signaux qu'elle leur fait à travers les sensations de leur corps ou les hasards du monde extérieur. Ces deux sortes d'esprits ne s'amalgament pas. Ce que les uns appellent une manie morbide est pour les autres une héroïque discipline. C'est au lecteur à se faire une opinion.
  • « Mishima ou la Vision du vide » (1981), dans Essais et mémoires, Marguerite Yourcenar, éd. Gallimard, coll. « Bibliothèque de la Pléiade », 1991  (ISBN 2-07-011212-8), p. 260


Quoi qu'il arrive, j'apprends. Je gagne à tout coup.
  • « En pèlerin et en étranger » (1981), dans Essais et mémoires, Marguerite Yourcenar, éd. Gallimard, coll. « Bibliothèque de la Pléiade », 1991  (ISBN 2-07-011212-8), chap. XIV. Carnets de notes, 1942-1948, p. 530


On ne voit pas deux fois le même cerisier, ni la même lune découpant un pin. Tout moment est dernier, parce qu'il est unique. Chez le voyageur cette perception s'aiguise par l'absence des routines fallacieusement rassurantes propres au sédentaire, qui font croire que l'existence pour un temps restera ce qu'elle est.
  • « Le Tour de la prison » (1977), dans Essais et mémoires, Marguerite Yourcenar, éd. Gallimard, coll. « Bibliothèque de la Pléiade », 1991  (ISBN 2-07-011212-8), chap. I (« Basho sur la route »), p. 602


Poésie

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Feux, 1936

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Solitude… Je ne crois pas comment ils croient, je ne vis pas comme ils vivent, je n’aime pas comme ils aiment… Je mourrai comme ils meurent.
  • « Feux » (1935), dans Œuvres romanesques (1982), Marguerite Yourcenar, éd. Gallimard, coll. « Bibliothèque de la Pléiade », 1991  (ISBN 2-07-011018-4), p. 1083


L'alcool dégrise. Après quelques gorgées de cognac, je ne pense plus à toi.
  • « Feux » (1935), dans Œuvres romanesques (1982), Marguerite Yourcenar, éd. Gallimard, coll. « Bibliothèque de la Pléiade », 1991  (ISBN 2-07-011018-4), p. 1083


Il n’y a pas d’amour malheureux : on ne possède que ce qu’on ne possède pas. Il n’y a pas d’amour heureux : ce qu’on possède, on ne le possède plus.
  • « Feux » (1935), dans Œuvres romanesques (1982), Marguerite Yourcenar, éd. Gallimard, coll. « Bibliothèque de la Pléiade », 1991  (ISBN 2-07-011018-4), p. 1090


Rien à craindre. J’ai touché le fond. Je ne puis tomber plus bas que ton cœur.
  • « Feux » (1935), dans Œuvres romanesques (1982), Marguerite Yourcenar, éd. Gallimard, coll. « Bibliothèque de la Pléiade », 1991  (ISBN 2-07-011018-4), p. 1090


Un cœur, c'est peut-être malpropre. C'est de l'ordre de la table d'anatomie et de l'étal de boucher. Je préfère ton corps.
  • « Feux » (1935), dans Œuvres romanesques (1982), Marguerite Yourcenar, éd. Gallimard, coll. « Bibliothèque de la Pléiade », 1991  (ISBN 2-07-011018-4), p. 1097


Rien de plus sale que l'amour-propre.
  • « Feux » (1935), dans Œuvres romanesques (1982), Marguerite Yourcenar, éd. Gallimard, coll. « Bibliothèque de la Pléiade », 1991  (ISBN 2-07-011018-4), p. 1105


Je me refuse à faire de toi un objet, même quand ce serait l'Objet Aimé.
  • « Feux » (1935), dans Œuvres romanesques (1982), Marguerite Yourcenar, éd. Gallimard, coll. « Bibliothèque de la Pléiade », 1991  (ISBN 2-07-011018-4), p. 1105


Aimer les yeux fermés, c’est aimer comme un aveugle. Aimer les yeux ouverts, c’est peut-être aimer comme un fou : c’est éperdument accepter. Je t’aime comme une folle.
  • « Feux » (1935), dans Œuvres romanesques (1982), Marguerite Yourcenar, éd. Gallimard, coll. « Bibliothèque de la Pléiade », 1991  (ISBN 2-07-011018-4), p. 1111


On arrive vierge à tous les événements de sa vie. J’ai peur de ne pas savoir m’y prendre avec ma Douleur.
  • « Feux » (1935), dans Œuvres romanesques (1982), Marguerite Yourcenar, éd. Gallimard, coll. « Bibliothèque de la Pléiade », 1991  (ISBN 2-07-011018-4), p. 1111


Brûlé de plus de feux… Bête fatiguée, un fouet de flammes me cingle les reins. J’ai retrouvé le vrai sens des métaphores de poètes. Je me réveille chaque nuit dans l’incendie de mon propre sang.
  • « Feux » (1935), dans Œuvres romanesques (1982), Marguerite Yourcenar, éd. Gallimard, coll. « Bibliothèque de la Pléiade », 1991  (ISBN 2-07-011018-4), p. 1120


Je ne tomberais pas. J’ai atteint le centre. J’écoute le battement d’on ne sait quelle divine horloge à travers la mince cloison charnelle de la vie pleine de sang, de tressaillements et de souffles. Je suis près du noyau mystérieux des choses comme la nuit on est quelquefois près du cœur.
  • « Feux » (1935), dans Œuvres romanesques (1982), Marguerite Yourcenar, éd. Gallimard, coll. « Bibliothèque de la Pléiade », 1991  (ISBN 2-07-011018-4), p. 1121


Quand je te revois, tout redevient limpide. J’accepte de souffrir.
  • « Feux » (1935), dans Œuvres romanesques (1982), Marguerite Yourcenar, éd. Gallimard, coll. « Bibliothèque de la Pléiade », 1991  (ISBN 2-07-011018-4), p. 1133


Et tu t’en vas ? Tu t’en vas ?… Non, tu ne t’en vas pas : je te garde. Tu me laisses dans les mains ton âme comme un manteau.
  • « Feux » (1935), dans Œuvres romanesques (1982), Marguerite Yourcenar, éd. Gallimard, coll. « Bibliothèque de la Pléiade », 1991  (ISBN 2-07-011018-4), p. 1133


On dit : fou de joie. On devrait dire : sage de douleur.
  • « Feux » (1935), dans Œuvres romanesques (1982), Marguerite Yourcenar, éd. Gallimard, coll. « Bibliothèque de la Pléiade », 1991  (ISBN 2-07-011018-4), p. 1134


Il y’a six jours, il y’a six mois, il y eu six ans, il y aura six siècles… Ah ! mourir pour arrêter le temps…
  • « Feux » (1935), dans Œuvres romanesques (1982), Marguerite Yourcenar, éd. Gallimard, coll. « Bibliothèque de la Pléiade », 1991  (ISBN 2-07-011018-4), p. 1134


L’amour est un châtiment. Nous sommes punis de n’avoir pas pu rester seuls.
  • « Feux » (1935), dans Œuvres romanesques (1982), Marguerite Yourcenar, éd. Gallimard, coll. « Bibliothèque de la Pléiade », 1991  (ISBN 2-07-011018-4), p. 1145


Je ne puis m’empêcher de voir dans mon amour une forme raffinée de la débauche, un stratagème pour passer le temps, pour se passer du Temps. Le plaisir effectue en plein ciel un atterrissage forcé, dans le bruit de moteur fou des derniers soubresauts du cœur. En vol plané, la prière y monte ; l’âme y entraîne le corps dans l’assomption de l’amour. Pour qu’une assomption soit possible, il faut un Dieu. Tu as juste assez de beauté, d’aveuglement et d’exigences pour figurer un tout-puissant. J’ai fait de toi faute de mieux la clef de voûte de mon univers.
  • « Feux » (1935), dans Œuvres romanesques (1982), Marguerite Yourcenar, éd. Gallimard, coll. « Bibliothèque de la Pléiade », 1991  (ISBN 2-07-011018-4), p. 1145


Tes cheveux, tes mains, ton sourire rappellent de loin quelqu’un que j’adore. Qui donc ? Toi-même.
  • « Feux » (1935), dans Œuvres romanesques (1982), Marguerite Yourcenar, éd. Gallimard, coll. « Bibliothèque de la Pléiade », 1991  (ISBN 2-07-011018-4), p. 1145


Qu'il eût été fade d'être heureux !
  • « Feux » (1935), dans Œuvres romanesques (1982), Marguerite Yourcenar, éd. Gallimard, coll. « Bibliothèque de la Pléiade », 1991  (ISBN 2-07-011018-4), p. 1155


Entretiens

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— Je crois d'ailleurs que l'amitié, comme l'amour dont elle participe, demande presqu'autant d'art qu'une figure de danse réussie. Il y faut beaucoup d'élan et beaucoup de retenue, beaucoup d'échanges et de paroles et beaucoup de silences. Et surtout beaucoup de respect.

Qu'entendez vous par respect ?

— Le sentiment de la liberté d'autrui, de la dignité d'autrui, l'acceptation sans illusions, mais aussi sans la moindre hostilité ou le moindre dédain d'un être tel qu'il est. Il y faut aussi (ce qui n'est peut-être pas absolument nécessaire à l'amour, et encore qu'en sais-je ?) une certaine réciprocité.
  • Les Yeux ouverts, entretiens avec Matthieu Galley, Marguerite Yourcenar, éd. du Centurion, 1980  (ISBN 2-227-32022-2), p. 321-322


J'y pense tout le temps [à la mort]. Il y a des moments où je suis tentée de croire qu'au moins une partie de la personnalité survit, et d'autres où je ne le pense pas du tout. Je suis tentée de voir les choses comme le fait Honda, dans le dernier livre de Mishima, celui qu'il a terminé le jour de sa mort. Honda, le personnage principal, réalise qu'il a eu pas mal de chance, d'avoir aimé quatre personnes, mais qu'elles étaient toutes la même personne sous différentes formes, à travers, si vous voulez, des réincarnations différentes. [...] Il réalise que l'essence de ces gens est quelque part dans l'univers et qu'un jour, peut-être dans dix mille ans ou plus, il les retrouvera, sous d'autres formes, sans même les reconnaître. Bien sûr, la réincarnation n'est ici qu'un mot, l'un des nombreux mots possibles pour souligner une certaine continuité. Il est sûr que toutes les évidences physiques indiquent notre annihilation totale, mais si l'on considère aussi les données métaphysiques, on est tenté de dire que cela n'est pas aussi simple que ça.
  • Interview de Marguerite Yourcenar, Susha Guppy, The Paris Review, 1988.
  • Portrait d'une voix, Maurice Delcroix, éd. Gallimard, 2002  (ISBN 2-07-075675-0), p. 399


Citations rapportées

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Citations au sujet de Marguerite Yourcenar

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[…] Le récit de l’existence de Marguerite Yourcenar ne présente qu’un seul intérêt : faire apparaître la recherche inlassable et la réalisation exceptionnelle d’un moi qui rejoint l’universel au-delà de l’anecdotique.
  • Yourcenar Biographie : « qu’il eut été fade d’être heureux » (1998), Michèle Goslar, éd. L’Age d’homme, 2014  (ISBN 978-2-8251-4381-0), chap. Avant-propos, p. 10-11


Voir aussi

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