Michel Meyer

philosophe et philologue belge

Michel Meyer est un philosophe belge né en 1950.

De la problématologie, 1986 modifier

[…] les sociétés qui se sont acharnées dans le dénigrement philosophique l’ont fait chaque fois en période de déclin. La raison en est simple : l’abandon de la pensée critique et rationnelle, qui pousse les individus dans les bras de nouvelles religions et de sectes diverses, se nourrit de la déstructuration de la pensée sous toutes ses formes et de la vie qu’elle exprime.
Le rejet de la philosophie a rarement été autre chose que l’indice de la décadence, dans la mesure où se manifeste par là un scepticisme grandissant pour la systématicité, en l’occurrence celle du pensable. Mais la fragmentation anticipe des déchirures bien plus grandes, impliquant une recherche compensatoire d’intuitions visionnaires, infondées, avant de déboucher purement et simplement sur l’obscurantisme et le culte du charlatanisme intellectuel.
  • De la problématologie (1986), Michel Meyer, éd. Pierre Mardaga, coll. « Le Livre de poche/Biblio essais », 1994  (ISBN 2-253-94190-5), chap. I. Qu’est-ce qu’un problème philosophique ?, 1. Le nihilisme intellectuel et l’époque contemporaine, p. 38-39


Que celui qui prétend avoir déjà les réponses sans s’être interrogé, sans les avoir interrogées, frémisse. Il est celui qui obéira le moment venu, quitte à signer son propre arrêt de mort. Il est l’homme de l’acceptation, de la hiérarchie, celui dont toute Autorité se régale. Voué à être manipulé, il est aussi celui qui, s’il le peut, fera du questionneur la proie de sa faiblesse devenue force. Il se vengera du questionneur qu’il n’a pas su être en reconnaissant en lui ce qui le met en question de façon vitale, existentielle. Je crains cet homme-là par-dessus tout, car il est l’ennemi de la culture, sauf s’il peut inlassablement la reproduire et s’en prévaloir pour s’imposer socialement. Et s’il ne le peut plus, il sera l’intellectuel des pouvoirs d’oppression. Le procès de Socrate est alors inévitable, de ce même Socrate avec lequel nous avons commencé à philosopher, et sans lequel nous ne pouvons conclure, si conclure peut avoir un quelconque sens ici.
  • De la problématologie (1986), Michel Meyer, éd. Pierre Mardaga, coll. « Le Livre de poche/Biblio essais », 1994  (ISBN 2-253-94190-5), partie Conclusion : Peut-il encore y avoir une métaphysique ?, p. 348


Vous pouvez également consulter les articles suivants sur les autres projets Wikimédia :