Pierre Soulages

peintre et graveur français

Pierre Soulages, né le 24 décembre 1919 à Rodez et mort le 25 octobre 2022 à Nîmes, est un artiste peintre et graveur français. Associé depuis la fin des années 1940 à l'art abstrait, il est particulièrement connu pour son usage des reflets de la couleur noire, qu'il appelle « noir-lumière » ou « outrenoir ».

Citations modifier

Je n'appartenais à aucun groupe. Je n'étais lié d'amitié qu’avec Hartung et Atlan. Atlan voulait introduire dans la peinture quelque chose qui appartenait à la nature. Je n'étais pas d'accord, nous en discutions. Atlan m'intéressait parce que je m'apercevais que l'on pouvait avoir avec lui des conversations enrichissantes. Il était très cultivé, aimait la philosophie, la littérature. Nous nous considérions tous les trois comme des sortes de francs-tireurs.


Une peinture est un tout organisé, un ensemble de formes (lignes, surfaces colorées) sur lequel viennent se faire et se défaire les sens qu’on lui prête.
  • 1948, catalogue de l’exposition Französische abstrakte Malerei.


Pour un peintre les problèmes qui se posent ne précédent pas les solutions. Ils naissent de l’œuvre, avec elle. Je ne crois apprendre ce que je cherche qu’en peignant ; cela n’exclut pas que ma peinture soit précédée d’une envie, d’un besoin de certaines formes plutôt que d’autres, mais ce n’est que peintes que ces formes me renseignent sur cette envie. C’est à ce moment là que j’en tire les modifications, les précisions qui me paraissent nécessaires, et aussi les formes suivantes qui m’obligent à remettre les premières en question.


L’expérience que le peintre a du monde pénètre l’œuvre. La peinture étant une expérience poétique, le monde y est transfiguré : le tableau est une métaphore.


Le noir est antérieur à la lumière. Avant la lumière, le monde et les choses étaient dans la plus totale obscurité. Avec la lumière sont nées les couleurs. Le noir leur est antérieur. Antérieur aussi pour chacun de nous, avant de naître, "avant d'avoir vu le jour".
  • Le dictionnaire des mots et expressions de couleur, XXe-XXIe siècle : le noir, Annie Mollard-Desfour (préface de Pierre Soulages), éd. CNRS, 2005  (ISBN 2-271-06321-3), chap. Préface : Le noir, la lumière, la peinture, p. 13


Le mot qui désigne une couleur ne rend pas compte de ce qu’elle est réellement. Il laisse ignorer l’éclat ou la matité, la transparence ou l’opacité, l’état de surface, lisse, strié, rugueux… Et aussi la forme, angulaire, arrondie… Il nous cache sa dimension et sa quantité. Toutes choses qui en changent la qualité.
  • Le dictionnaire des mots et expressions de couleur, XXe-XXIe siècle : le noir, Annie Mollard-Desfour (préface de Pierre Soulages), éd. CNRS, 2005  (ISBN 2-271-06321-3), chap. Préface : Le noir, la lumière, la peinture, p. 13


L’appeler noire c’est dissocier l’ensemble, l’amputer, le réduire, le détruire. C’est voir avec ce que l’on a dans la tête et pas avec les yeux.
  • Le dictionnaire des mots et expressions de couleur, XXe-XXIe siècle : le noir, Annie Mollard-Desfour (préface de Pierre Soulages), éd. CNRS, 2005  (ISBN 2-271-06321-3), chap. Préface : Le noir, la lumière, la peinture, p. 13-14


Pour ne pas les limiter à un phénomène optique j'ai inventé le mot Outrenoir, au-delà du noir, une lumière transmutée par le noir et, comme Outre-Rhin et Outre-Manche désignent un autre pays, Outrenoir désigne aussi un autre pays, un autre champs mental que celui du simple noir.
  • Le dictionnaire des mots et expressions de couleur, XXe-XXIe siècle : le noir, Annie Mollard-Desfour (préface de Pierre Soulages), éd. CNRS, 2005  (ISBN 2-271-06321-3), chap. Préface : Le noir, la lumière, la peinture, p. 14


Citations sur modifier

Léopold Sédar Senghor modifier

 
La première fois que je vis un tableau de Pierre Soulages, ce fut un choc. Je reçus, au creux de l’estomac, un coup qui me fit vaciller, comme le boxeur touché, qui soudain s’abîme. C’est exactement l’impression que j’avais éprouvée à la première vue d’un masque dan. Ce n’est pas hasard, les peintures de Soulages me rappellent toujours les sculptures, voire les peintures négro-africaines. C’est le même mépris de toute vaine élégance, qui ne va pas sans élégance, la même évidence, qui s’impose, la même saisie du spectateur à la racine de la vie.


Il y a des artistes, tel Picasso, dont le génie est de créer et détruire sans fin. Soulages est de ceux, comme l’a montré James Johnson Sweeney, qui approfondissent le monde qu’ils ont créé, qui l’épanouissent en multipliant leur modèle pour recréer et varier sans fin. "San fin", je dis : jusqu’à la mort, avec laquelle tout grand artiste est confronté sa vie durant – pour prévaloir contre elle.
  • « La puissance créatrice de Soulages », Éthiopiques, no2, 1975 , discours prononcé le 29 novembre 1974 lors de l’inauguration de l’exposition au musée dynamique de Dakar.
  • D’une rive à l’autre, Michaël de Saint-Cheron et Mathieu Séguéla, éd. Actes Sud, 2019  (ISBN 978-2-330-12823-4), chap. La puissance créatrice de Soulages / Léopold Sédar Senghor, p. 40


  • D’une rive à l’autre, Michaël de Saint-Cheron et Mathieu Séguéla, éd. Actes Sud, 2019  (ISBN 978-2-330-12823-4), chap. La puissance créatrice de Soulages / Léopold Sédar Senghor, p. 49


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