Schizophrénie

trouble psychiatrique

La schizophrénie est une maladie mentale caractérisée par une dissociation de la personnalité, affectant le rapport du malade avec la réalité. Elle se manifeste principalement par des hallucinations auditives, un délire paranoïde, un discours déconstruit et des schémas de pensée désorganisés.

Catherine Azoulay

modifier
La psychose « réussie » permet de voir s'estomper la menace suicidaire grâce à la reconstruction psychique délirante dressant un rempart solide contre l'effondrement mélancolique.
  • Processus de la schizophrénie (2002), Catherine Azoulay/Catherine Chabert/Jean Gortais/Philippe Jeammet, éd. Dunod, coll. « Psycho Sup », 2002  (ISBN 2-10-004780-9), chap. II « Approche psycho-pathologique et clinique de la schizophrénie (Catherine Azoulay) », 1. Formes et caractéristiques de la schizophrénie, p. 124


Racamier (1992) insiste quant à lui sur la force libidinale du système défensif des psychotiques mais aussi du délire permettant au fonctionnement psychique d'assurer sa survie. Pour cet auteur, dans la schizophrénie, l'activation du fantasme d'auto-engendrement entraîne une sorte d'explosion interne, fulgurante, anéantissante et triomphante et constitue ce qu'il appelle « un évènement psychique blanc : une éblouissante déflagration psychique. Ce qu'on prend pour la catastrophe, c'est exactement cet évènement psychique blanc qui fait le vide et fascine à jamais » (l'évènement psychique blanc n'équivaut pas à la psychose blanche de Donnet et Green, mais on y retrouve cette notion importante d'un court-circuit psychique « follement excitant et terriblement sidérant »).
L'évènement psychique blanc, reprend Racamier, est un cas majeur d'« orgasmes du moi », préludes aux développements délirants. Les hallucinations aussi ont un caractère orgastique.

  • Processus de la schizophrénie (2002), Catherine Azoulay/Catherine Chabert/Jean Gortais/Philippe Jeammet, éd. Dunod, coll. « Psycho Sup », 2002  (ISBN 2-10-004780-9), chap. II « Approche psycho-pathologique et clinique de la schizophrénie (Catherine Azoulay) », 1. Formes et caractéristiques de la schizophrénie, p. 97


[...] si l'état psychotique est celui où le moi conscient est submergé par l'inconscient collectif, cet accident sera d'autant plus à redouter que le moi est plus faible. Plus exactement, il s'agit d'un rapport de forces — comme celui de la vague et de la digue ; ce qui permet à Jung de suggérer une discrimination encore, qui pourrait être grosse de conséquences, entre deux sortes de schizophrénies : l'une où il faut incriminer la faiblesse du moi, l'autre qui procéderait d'une force exeptionnelle de l'inconscient.
[...] Il est des cas sévères, où il importe surtout de « fortifier le moi » [...]. Ce à quoi du moins il nous avertit de prendre garde, c'est à un moi apparemment fort parce qu'il est concentré, excessivement rationnel, obstiné ; cette raideur doit être suspecte ; elle risque de dissimuler en réalité un moi faible qui se tient par là sur la défensive ; c'est alors qu'on parle, trop facilement peut-être, de psychose latente ; mais c'est alors du moins qu'une effraction brusque des forces inconscientes peut déterminer bel et bien l'éclatement d'une psychose.

  • L'Œuvre de Jung et la psychologie complexe (1963), Charles Baudouin, éd. Payot & Rivages, coll. « Petite Bibliothèque Payot », 2002  (ISBN 2-228-89570-9), partie I. Idées directrices, chap. II. Les structures de l'inconscient — L'inconscient collectif, Application à la psychiatre, p. 90


Catherine Chabert

modifier
Si l'enfermement et son cortège de symptômes constituent le premier temps dans l'éclosion de la maladie — peut-être une tentative désespérée pour lutter contre la dissolution du moi — le second temps met régulièrement au jour des assises narcissiques fondamentalement défaillantes à l'origine d'une perte de la subjectivité parfois tragique. Autant la centration narcissique offre un recours profitable, bénéfique par exemple pour les sujets qui demeurent psychiquement vivants, autant cette centration se découvre inopérante et désorganisante chez les schizophrènes. Au point que l'hypothèse a pu être vérifiée selon laquelle plus les traces d'investissement narcissique sont présentes plus le pronostic sera favorable dans la mesure où le processus thérapeutique pourra s'étayer et étayer cet investissement essentiel.
  • Processus de la schizophrénie (2002), Catherine Azoulay/Catherine Chabert/Jean Gortais/Philippe Jeammet, éd. Dunod, coll. « Psycho Sup », 2002  (ISBN 2-10-004780-9), chap. IV « Quelques réflexions métapsychologiques (Catherine Chabert) », 1. Continuité ou discontinuité des concepts psychanalytiques dans l'approche psychopathologique de la psychose, p. 180


Le Champ de la perversion narcissique

Dans le chapitre VI du rapport « Les paradoxes des schizophrènes », P.-C. Racamier (1978) conclut par cette phrase (qui est tout un programme) : « Nous nous sommes déjà demandé de quelle perversion la psychose schizophrénique est l'envers, sans doute pouvons-nous désormais répondre à cette question, ancienne comme les premières découvertes de S. Freud : la schizophrénie est l'envers d'une perversion narcissique. »
  • Le pervers narcissique et son complice, Alberto Eiguer, éd. Dunot, coll. « Psychismes », 1989  (ISBN 2 10 002843 X), partie I. Le Champ de la perversion narcissique, chap. Définition et description générale, Séduction narcissique, p. 26


Applications à la psychopathologie

Les traits généraux de la perversion narcissique se retrouvent chez le psychotique avec des différences dues à la structure propre à chaque variante clinique : schizophrénie, paranoïa, psychose maniaco-dépressive. Si le paranoïaque est plus habile parce qu'il possède un degré de savoir et de pensée suffisamment développé, ou est plus habitué à induire des vécus, le schizophrène n'est pas moins efficace parce que déconcertant et paroxystique. Le schizophrène a le désordre interne en plus, mais il risque de faire de la perversion narcissique un mode défensif de restitution, équivalent au délire, et de ce fait, de rendre le travail thérapique plus ardu.
  • Le pervers narcissique et son complice, Alberto Eiguer, éd. Dunot, coll. « Psychismes », 1989  (ISBN 2 10 002843 X), partie II. Applications à la psychopathologie, chap. Psychose et perversion narcissique, Emprise régressive et emprise fonctionnelle, p. 83


Les rapports entre psychose et perversion narcissique sont étroits. P.-C. Racamier (1978) a insisté sur la présence de pervers narcissiques parmi les proches du psychotique ; nous lui devons également la formule de la perversion narcissique comme revers de la schizophrénie : cette perversion narcissique serait celle d'un autre, de la mère du patient le plus fréquemment.
Cependant le psychotique même agit souvent sur le mode pervers, à la sortie de l'épisode critique notamment.

  • Le pervers narcissique et son complice, Alberto Eiguer, éd. Dunot, coll. « Psychismes », 1989  (ISBN 2 10 002843 X), partie II. Applications à la psychopathologie, chap. Psychose et perversion narcissique, Emprise régressive et emprise fonctionnelle, p. 83


Jean Gortais

modifier
Kraepelin emploi le terme de psychische Schwäche, qui peut être traduit par « affaiblissement psychique », pour désigner cette aggravation tendancielle. Le trait pathologique majeur commun à ces formes est la dissociation.
  • Il est ici question de démence précoce.
  • Processus de la schizophrénie (2002), Catherine Azoulay/Catherine Chabert/Jean Gortais/Philippe Jeammet, éd. Dunod, coll. « Psycho Sup », 2002  (ISBN 2-10-004780-9), chap. I « Approche historique d'une psychopathologie psychanalytique de la schizophrénie (Jean Gortais) », 2. De la démence précoce, p. 8


L'une des caractéristiques remarquables de la contribution de Bleuler tient tout particulièrement à la place qu'il donne à un mécanisme typique de la schizophrénie et qu'il désigne par le terme de Spaltung qui traduit une opération de scission au sein même du psychisme.
  • Processus de la schizophrénie (2002), Catherine Azoulay/Catherine Chabert/Jean Gortais/Philippe Jeammet, éd. Dunod, coll. « Psycho Sup », 2002  (ISBN 2-10-004780-9), chap. I « Approche historique d'une psychopathologie psychanalytique de la schizophrénie (Jean Gortais) », 3. De la Spaltung à la schizophrénie, p. 11


Etymologiquement, le mot schizophrénie comporte les racines grecques schizein, qui signifie « fendre, scinder », et phrein, qui signifie « l'âme, l'esprit ».
  • Processus de la schizophrénie (2002), Catherine Azoulay/Catherine Chabert/Jean Gortais/Philippe Jeammet, éd. Dunod, coll. « Psycho Sup », 2002  (ISBN 2-10-004780-9), chap. I « Approche historique d'une psychopathologie psychanalytique de la schizophrénie (Jean Gortais) », 3. De la Spaltung à la schizophrénie, p. 11


Pour Bleuler, l'étiologie de la schizophrénie comporte une dimension psychogénétique qui ouvre sur des potentialités thérapeutiques. En proposant le terme de Spaltung plutôt que celui de dissociation, Bleuler va avancer une conception structurale, dans la mesure où l'accent est alors sur le processus de coupure et de scission interne et non sur les signes dissociatifs symptomatiques.
  • Processus de la schizophrénie (2002), Catherine Azoulay/Catherine Chabert/Jean Gortais/Philippe Jeammet, éd. Dunod, coll. « Psycho Sup », 2002  (ISBN 2-10-004780-9), chap. I « Approche historique d'une psychopathologie psychanalytique de la schizophrénie (Jean Gortais) », 3. De la Spaltung à la schizophrénie, p. 12


Dans la schizophrénie, selon [Freud], la différenciation entre représentation de mot et représentation de chose est mise à mal en raison de la façon dont le schizophrène traite les mots comme des choses. Se pose alors ici la question d'un échec de la fonction d'abstraction et de l'étroitesse voire de l'impossibilité d'accès à la polysémie du langage. Lorsque les mots peuvent être pris pour des choses, ils sont alors susceptibles de devenir magiques ou terrifiants.
  • Processus de la schizophrénie (2002), Catherine Azoulay/Catherine Chabert/Jean Gortais/Philippe Jeammet, éd. Dunod, coll. « Psycho Sup », 2002  (ISBN 2-10-004780-9), chap. I « Approche historique d'une psychopathologie psychanalytique de la schizophrénie (Jean Gortais) », 4. Narcissisme et perte de réalité, p. 17


Dans la névrose un fragment de la réalité est évité sur le mode de la fuite ; dans la psychose, il est reconstruit. Ou : dans la psychose, la fuite initiale est suivie d'une phase active, celle de la reconstruction, dans la névrose, l'obéissance initiale est suivie, après coup, d'une tentative de fuite. Ou encore : la névrose ne désire pas la réalité, elle veut seulement ne rien savoir d'elle ; la psychose la désire et cherche à la remplacer.
  • Extrait du second texte freudien élaboré à ce sujet, « La perte de réalité dans la névrose et dans la psychose » (1924).
  • Processus de la schizophrénie (2002), Catherine Azoulay/Catherine Chabert/Jean Gortais/Philippe Jeammet, éd. Dunod, coll. « Psycho Sup », 2002  (ISBN 2-10-004780-9), chap. I « Approche historique d'une psychopathologie psychanalytique de la schizophrénie (Jean Gortais) », 4. Narcissisme et perte de réalité, p. 18


Si, pour Klein (1957), le morcellement constitue l'un des traits caractéristiques de la schizophrénie, elle retient également « l'élément confusionnel » qui lui paraît très important : « Le schizophrène a non seulement l'impression d'être morcelé mais d'être incorporé aux autres. Il est incapable de distinguer les bonnes et les mauvaises parties de soi, le bon et le mauvais objet, la réalité interne et externe. Aussi ne peut-il ni se comprendre ni se fier à lui-même. »
  • Processus de la schizophrénie (2002), Catherine Azoulay/Catherine Chabert/Jean Gortais/Philippe Jeammet, éd. Dunod, coll. « Psycho Sup », 2002  (ISBN 2-10-004780-9), chap. I « Approche historique d'une psychopathologie psychanalytique de la schizophrénie (Jean Gortais) », 7. L'objet interne à l'épreuve des angoisses primitives, p. 26


Le trouble de pensée dans la schizophrénie ne relève pas tant de la perte de réalité que du « gain de réalité » qui conditionne une première étape de la maladie, « celle où les pensées sont devenues réelles — la conséquence suivante est l'interprétation réelle par des faits faussement conçus comme réels ».
  • Processus de la schizophrénie (2002), Catherine Azoulay/Catherine Chabert/Jean Gortais/Philippe Jeammet, éd. Dunod, coll. « Psycho Sup », 2002  (ISBN 2-10-004780-9), chap. I « Approche historique d'une psychopathologie psychanalytique de la schizophrénie (Jean Gortais) », 9. Schizophrénie et psychologie du moi, p. 32


Le processus schizophrénique, selon P. Federn, s'étaye sur un trouble de la « frontière du moi » : celle-ci n'est pas à entendre dans un sens statique ni comme une ligne de partage également répartie au sein du psychisme. Lorsqu'il avance que la mutilation narcissique dans la schizophrénie est liée avant tout à la « perte d'investissement de la frontière mentale et corporelle du moi », il entend alors insister sur une perte et une mise en échec de la fonction de séparation que le moi exerce habituellement, à l'état vigile, entre la réalité extérieure et le monde psychique interne.
  • Processus de la schizophrénie (2002), Catherine Azoulay/Catherine Chabert/Jean Gortais/Philippe Jeammet, éd. Dunod, coll. « Psycho Sup », 2002  (ISBN 2-10-004780-9), chap. I « Approche historique d'une psychopathologie psychanalytique de la schizophrénie (Jean Gortais) », 9. Schizophrénie et psychologie du moi, p. 33
De même [...] que certains peuvent disparaître, engloutis en quelque sorte par un rôle social, d'autres peuvent être engloutis par une vision intérieure, échappant ainsi à leur entourage. Certaines modifications incompréhensibles de la personnalité, telles des conversations subites et inattendues ou mainte autre perturbation en profondeur, proviennent de l'attraction exercée par une image collective, attraction qui [...] peut déterminer une inflation tellement poussée que la personnalité s'en trouve comme dissoute. Or une telle dissolution de la personnalité constitue une maladie mentale, soit passagère, soit durable, une « dissociation de l'âme » pour laquelle Bleuler a créé la dénomination de « schizophrénie ».
  • Dialectique du Moi et de l'inconscient (1933), Carl Gustav Jung (trad. Docteur Roland Cahen), éd. Gallimard, coll. « Folio Essais », 1964  (ISBN 2-07-032372-2), partie I. Des effets de l'inconscient sur le conscient, chap. II. Les conséquences de l'assimilation de l'inconscient, p. 63


Les paradoxes des schizophrènes

On s'attachera dans ce rapport à montrer que la schizophrénie s'organise de manière aléatoire le long du trajet qui va de la psychose aiguë à la perversion narcissique.
  • Les Schizophrènes (1980), Paul-Claude Racamier, éd. Payot & Rivages, coll. « Petite bibliothèque Payot », 2001  (ISBN 978-2-228-89427-2), partie Les paradoxes des schizophrènes, chap. 2. De plusieurs constantes psychotiques, Où l'on oppose l'anticonflictualité des schizophrènes à l'intraconflictualité des névroses, p. 66


Les schizophrènes ont un besoin absolu de concret. Plus vif est le désaveu qu'ils font de leur réalité — psychique de l'existence même de cette réalité intérieure propre — et plus grand leur appétit de concrétude.
Vivre la schizophrénie consiste à bien à vivre hors de soi.

  • Les Schizophrènes (1980), Paul-Claude Racamier, éd. Payot & Rivages, coll. « Petite bibliothèque Payot », 2001  (ISBN 978-2-228-89427-2), partie Les paradoxes des schizophrènes, chap. 2. De plusieurs constantes psychotiques, Où l'on oppose l'anticonflictualité des schizophrènes à l'intraconflictualité des névroses, p. 68


Schizogrammes

fusée Combien de fusées mises à feu pour qu'une parvienne au but, et combien de processus paranoïdes enclenchés pour que l'un d'eux arrive à la schizophrénie.


Citations à revoir

modifier
Aujourd’hui, dans un siècle voué au raisonnement et qui a inventé la pensée pour tous, les gens ne savent plus supporter le silence, et ils sont emportés par le fleuve des mots de convention, dont chaque individu, paradoxalement, mésuse à sa façon sous la forme opaque d’un bavardage universel qui n’exprime rien de réel et procède même d’une véritable schizophrénie collective. Il conviendra, bien entendu, de dégager le sens positif de cette schizophrénie, car elle en a forcément un, et de voir comment et pourquoi, par quel progrès, on passe par exemple de l’hébétude de mon grand-père maternel à l’excitation verbeuse de l’homme d’aujourd’hui, stimulé et drogué par l’information.
  • Ma dernière mémoire, Raymond Abellio, éd. Gallimard, 1971, t. I, partie Un faubourg de Toulouse, 1907-1927, p. 94

Vous pouvez également consulter les articles suivants sur les autres projets Wikimédia :

Jean Gortais

modifier
Kraepelin emploi le terme de psychische Schwäche, qui peut être traduit par « affaiblissement psychique », pour désigner cette aggravation tendancielle. Le trait pathologique majeur commun à ces formes est la dissociation.
  • Il est ici question de démence précoce.
  • Processus de la schizophrénie (2002), Catherine Azoulay/Catherine Chabert/Jean Gortais/Philippe Jeammet, éd. Dunod, coll. « Psycho Sup », 2002  (ISBN 2-10-004780-9), chap. I « Approche historique d'une psychopathologie psychanalytique de la schizophrénie (Jean Gortais) », 2. De la démence précoce, p. 8


Pour Kraepelin, la démence précoce se particularise non seulement par des productions délirantes ou des hallucinations, mais aussi par un déficit affectif avec perte de l'unité interne et trouble grave de la volonté et de l'action. Il propose une classification en neuf configurations terminales :
— guérison totale ;
— guérison avec déficit séquellaire modéré ;
— abêtissement simple ;
— faiblesse d'esprit avec incohérence du langage ;
— faiblesse d'esprit hallucinatoire ;
— démence paranoïde ;
— éléments catatoniques associés à un profond déficit mental ;
— stupidité apathique avec émoussement affectif de toute la vie psychique.
Cette classification opère un repérage et une sorte de gradation des différents fonctionnements psychiques dont les plus graves tendent à la désintégration de la personnalité.

  • Processus de la schizophrénie (2002), Catherine Azoulay/Catherine Chabert/Jean Gortais/Philippe Jeammet, éd. Dunod, coll. « Psycho Sup », 2002  (ISBN 2-10-004780-9), chap. I « Approche historique d'une psychopathologie psychanalytique de la schizophrénie (Jean Gortais) », 2. De la démence précoce, p. 8


[...] l'idée du moi est, à mes yeux, l'héritière du conflit que j'appelle originaireconflit entre la préservation narcissique autarcique et l'aspiration objectale antinarcissique. De même que le surmoi est l'héritier du complexe d'Œdipe, pourvu que celui-ci ait été abordé et résolu, de même l'idée du moi est héritière du conflit originaire, si celui-ci a été abordé et résolu.
Là où je veux en venir avec l'idée du moi, c'est à montrer qu'elle constitue l'axe discret sur lequel se rencontrent et se différencient l'image de l'autre et l'image de soi. L'idée du moi fera que jamais ces deux images ne pourront tout à fait ni s'écarteler ni se confondre. Elle demeurera comme un support discret mais essentiel du sens de la réalité psychique de l'objet et de soi-même. Or, c'est cette idée du moi, ce sens du moi, cette image de l'humain, qui se trouve désinvestie à l'origine des éruptions psychotiques et à la base des organisations schizophréniques.