« Musique » : différence entre les versions

Contenu supprimé Contenu ajouté
Clelie Mascaret (discussion | contributions)
Clelie Mascaret (discussion | contributions)
Ligne 62 :
{{Citation|citation=Une clameur nouvelle, plus forte et plus longue, s’éleva d’entre les deux tutélaires colonnes de granit, pendant que la barque royale abordait à la Piazzetta noire de peuple. Quand le bruit cessait, la foule épaisse avait des remous ; et les galeries du Palais des Doges s’emplissaient d’une rumeur confuse, pareille au bourdonnement illusoire qui anime les volutes des conques marines. Puis, tout à coup, la clameur rejaillissait dans l’air limpide, montait se briser contre la légère forêt marmoréenne, franchissait les têtes des hautes statues, atteignait les pinacles et les croix, se dispersait dans le lointain crépusculaire. Puis, c’était une autre pause pendant laquelle, imperturbable, dominant l’agitation inférieure, continuait l’harmonie multiple des architectures sacrées et profanes où couraient comme une agile mélodie les modulations ioniques de la Bibliothèque et s’élançait comme un cri mystique la cime de la tour nue. Et cette musique silencieuse des lignes immobiles était si puissante qu’elle créait le fantôme presque visible d’une vie plus belle et plus riche, superposé au spectacle de la multitude inquiète. Celle-ci sentait la divinité de l’heure ; et, lorsqu’elle acclamait cette forme nouvelle de la royauté abordant au rivage antique, cette fraîche Reine blonde qu’illuminait un inextinguible sourire, peut-être exhalait-elle son obscure aspiration à dépasser l’étroitesse de la vie vulgaire et à recueillir les dons de l’éternelle Poésie épars sur les pierres et sur les eaux.}}
{{Réf Livre|titre=Le Feu|auteur=[[Gabriele D'Annunzio]]|éditeur=La Revue de Paris|Traducteur=Georges Hérelle|année=1900|page=3|chapitre=I. L'épiphanie du feu}}
 
{{Citation|citation=Doué d’une extraordinaire faculté verbale, il arrivait à traduire instantanément par les mots jusqu’aux faits les plus compliqués de sa sensibilité, avec une exactitude et un relief si vifs que parfois, sitôt exprimés, rendus objectifs par la propriété isolatrice du style, ils semblaient ne plus lui appartenir. Sa voix limpide et pénétrante, qui pour ainsi dire dessinait d’un contour précis la figure musicale de chaque mot, donnait plus de relief encore à cette singulière qualité de sa parole. Aussi tous ceux qui l’entendaient pour la première fois éprouvaient-ils un sentiment ambigu, mêlé d’admiration et d’aversion, parce qu’il se manifestait lui-même sous des formes si fortement marquées qu’elles semblaient résulter d’une volonté constante d’établir entre lui et les étrangers une différence profonde et infranchissable. Mais, comme sa sensibilité égalait son intelligence, il était facile à tous ceux qui le fréquentaient et l’aimaient de recevoir à travers le cristal de son verbe la chaleur de son âme passionnée et véhémente. Ceux-là savaient combien était illimité son pouvoir de sentir et de rêver, et de quelle combustion sortaient les belles images en lesquelles il avait coutume de convertir la substance de sa vie intérieure.}}
{{Réf Livre|titre=Le Feu|auteur=[[Gabriele D'Annunzio]]|éditeur=La Revue de Paris|Traducteur=Georges Hérelle|année=1900|page=9|chapitre=I. L'épiphanie du feu}}
 
==== [[André Pieyre de Mandiargues]], ''La Marge'', 1967 ====