Antoine Blondin

journaliste français

Antoine Blondin, né le 11 avril 1922 à Paris et mort le 7 juin 1991 à Paris, est un écrivain français. Romancier et journaliste, il est connu également sous le pseudonyme Tenorio et reste associé au mouvement des Hussards.

Citations d'Antoine Blondin modifier

Un singe en hiver, 1959 modifier

Au second verre, de Vermouth cette fois, j'ai senti renaître le vieux désir de lier connaissance avec les autres, ce sentiment d'avoir beaucoup de choses à leur communiquer, et l'illusion qu'on pourrait s'arranger pour vivre si l'on était assuré d'une marge où l'existence s'échauffe et brille dans ses plus modestes manifestations. On prétend que ces alchimistes se réunissent pour se saouler. La vérité est que l'état d'ivresse ne fait pas l'objet de leurs cérémonies extrêmement subtiles : il en est la conséquence et la rançon.


Je ne suis pas un individu triste. Je suis un triste individu. J'ai beau me dire que le calvados d'Esnault pousse à l'angoisse, tous les états d'âme ne viennent pas du foie. Le casque des soucis me tombe sur la tête, jusqu'aux sourcils. Je ne voudrais pas que le jour se lève…


Une épreuve de force était ouverte devant laquelle il ne pouvait se dérober. « Vieux, pensa-t-il, prépare-toi. Je ne suis pas venu pour te détruire mais pour te réveiller. Je suis un de ces avions porteurs de bombes, qui attendent leur signal rouge, et mon objectif est à deux mètres de moi. »


Quentin inspire le respect ; mais il l'éclaire pour moi d'un jour nouveau. Ce qui est respectable chez les gens âgés n'est pas ce vaste passé qu'on baptise expérience, c'est cet avenir précaire qui impose à travers eux l'imminence de la mort et les familiarise avec de grands mystères. Là, il me semble que mon ami a baissé les bras un peu vite.


L'Ironie du sport, 1988 modifier

Le rugby, tel qu'il est, ne manque pas de chaleur. il possède spontanément la dimension pittoresque. Si paradoxal que cela puisse paraître, on aime d'abord l'ovale pour sa rondeur. La majesté lui est donnée par surcroît, quand on s'est pénétré de toutes les valeurs qu'il libère.

  • L'Ironie du sport, Antoine Blondin, éd. éditions François Bourin, 1988  (ISBN 2-87686-008-2), p. 109


Tom Simpson avait été champion du monde après avoir introduit la panique dans le cérémonial cycliste à force d'aller trop ardemment au-devant des Dieux. Ceux qui apprécient les marges offertes par ce sport l'aimaient pour ce qu'il apportait de désinvolture dans la probité, de gravité dans la passion. On se plaisait à penser qu'il avait noué la cravate d'Eton au guidon d'un engin où beaucoup voient encore le gagne-pain du facteur. Quand il s'avéra le premier anglais à s'emparer du maillot jaune, ce qui était une conquête pour lui devint un conquête pour nous. C'est dire qu'il était notre fierté.

  • L'Ironie du sport, Antoine Blondin, éd. éditions François Bourin, 1988  (ISBN 2-87686-008-2), p. 264


L'abîme ouvert par Simpson dans la montée du Ventoux, le vide qu'il laisse au classement général, le vol de cet hélicoptère qui se posait comme une question, ne font que nous rendre plus sensibles la solitude et la pudeur qui sont la loi des familles, la difficulté de communiquer avec des êtres que nous revendiquons.

  • L'Ironie du sport, Antoine Blondin, éd. éditions François Bourin, 1988  (ISBN 2-87686-008-2), p. 265


Au moment où l'on brandit la menace d'un sport définitivement broyé par les grandes machineries d'État, ce qui fut le comportement et l'attitude de Colette Besson dégage une leçon chaleureuse qui n'est pas loin d'avoir une saveur d'école buissonnière. On retrouve sur ces bancs glorieux d'autres francs-tireurs médaillés de Mexico, comme Hemery, Doubell, Fosbury ou même Gammoudi, qui n'émargent pas à un enseignement systématique traditionnel et, à la lumière des larmes de Colette Besson, il était permis de se demander si ce qu'on avait été amené à lui reprocher naguère ça n'était pas précisément une certaine forme d'amateurisme absolu. On était également tenté de souhaiter que se perpétuât cette race de champion de l'entreprise privée.

  • L'Ironie du sport, Antoine Blondin, éd. éditions François Bourin, 1988  (ISBN 2-87686-008-2), p. 275, 276


Cependant, à l'autre bout de la ville, au sein d'un autre élément qu'elle est parvenue à maîtriser avec une légèreté de légende, une écolière roumaine de quatorze ans, Nadia Comaneci, peuple les trois dimensions de l'air qu'on peut respirer à Montréal, qu'elle laisse encore respirer aux 15 000 spectateurs haletants d'un forum qu'elle suffit à remplir, aux dizaines de millions de téléspectateurs que la seule apparition de son petit maillot immaculé détourne de tous leurs devoirs.

  • L'Ironie du sport, Antoine Blondin, éd. éditions François Bourin, 1988  (ISBN 2-87686-008-2), p. 369


Gymnaste, ballerine, sylphide ? On ne sait comment qualifier cette Lolita olympique qui semble avec une grâce implacable triompher de la loi commune de la pesanteur sans un effort d'accommodement. Lovée aux barres asymétriques, elle passe de l'une à l'autre dans un éclair souple de perruche. A la poutre, elle se fait palombe en lisière d'un toit. Quand elle est au sol, ses mouvements n'amusent pas le tapis, ils l'enchantent, en fond un tapis volant. Sous son effleurement, le cheval d'arçons, c'était Pégase, des ailes lui ont poussé. Nadia s'envole, Nadia nous quitte, la fille de l'air joue la fille de l'air. Ne cherchez plus l'ange blanc, le voilà ! On ne juge pas les anges. Certes, la jeune écolière roumaine a obtenu la note, jamais vue, de la perfection. Ce record-là ne pourra, par définition, être battu mais il est de peu d'importance au regard de la performance qualitative que Nadia Comaneci vient d'établir. Celui-ci aura la vie plus dure encore aux yeux du souvenir.

  • L'Ironie du sport, Antoine Blondin, éd. éditions François Bourin, 1988  (ISBN 2-87686-008-2), p. 369, 370


Citations sur Antoine Blondin modifier

Il écrivait en excellent français ce qui lui passait par la tête, au lieu d'écrire ce qui passe successivement par le crâne d'André Siegfried et les pieds de Georges Duhamel – et se nomme humanisme.
  • « Le fondateur du blondinisme », dans Les écrivains sont-ils bêtes ?, Roger Nimier, éd. Rivages, 1990, p. 60


Oui, je crois qu'il faut, au bilan du XXe siècle, inscrire ce magicien au même niveau que les abonnés Proust et Céline. Certes, son œuvre est aussi mince que son visage, mais tant mieux : le caviar doit s'apprécier en petite quantité. Blondin est notre Fitzgerald. Il marie la mélancolie et la fête, il cache de la profondeur dans les plaisanteries, il ne pleure pas, il n'éclate pas de rire, il fabrique juste de la beauté. Nous lui devons tout simplement quelques unes des plus cristallines pages de la littérature française : la dernière page de l'Humeur vagabonde, la première page de l'Europe buissonnière, la page 63 de Un singe en hiver et la page 74 de Monsieur Jadis suffisent à le hisser au même niveau que Baudelaire et Verlaine.


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