Henri-Irénée Marrou

historien français

Henri-Irénée Marrou, né à Marseille en 1904 et mort à Bourg-la-Reine en 1977, est un historien antiquisant français spécialiste du christianisme primitif.

Œuvres modifier

De la connaissance historique, 1954 modifier

L'histoire nous libère des entraves, des limitations qu'imposait à notre expérience de l'homme notre mise en situation au sein du devenir, à telle place dans telle société à tel moment de son évolution, — et par là elle devient en quelque sorte un instrument, un moyen de notre liberté.
  • De la connaissance historique, Henri Irénée Marrou, éd. Seuil, 1954, p. 272


Saint Augustin et l'Augustinisme, 1955 modifier

Saint Augustin est donc né le 13 novembre 354 à Thagaste, petite ville de la province de Numidie, aujourd'hui Souk Ahras en Algérie (environ 180 km à l'Est de Constantine et 100 km au Sud d'Annaba) : c'est un Romain d'Afrique. Le calcul des probabilités permet d'inférer qu'il était sans doute de pure race berbère. On s'est livré à ce propos à bien des variations naïves, expliquant par le soleil d'Afrique l'ardeur de son tempérament et l'enflure de son style, — comme si l'érotisme et le baroque étaient inconnus des Nordiques ; ou bien, comme la vie du fellah anhistorique a conservé jusqu'à nos jours bien des traits antiques (les enfants portés sur le dos par leurs grandes sœurs)1, on a fait du pittoresque facile et montré en lui un marabout doué de baraka, un sheikh, siégeant au tribunal du qâdî… Cette couleur locale est parfaitement illusoire : ce qui compte, c'est la civilisation et non les chromosomes.
  • Saint Augustin et l'Augustinisme (1955), Henri-Irénée Marrou, éd. Éditions du Seuil, 1978, p. 11


Crise de notre temps et Réflexion chrétienne, 1978 modifier

Si l'empire romain est tombé en décadence, la faute en est à Caracalla ; ce dégénéré, fils d'un Berbère et d'une Syrienne, a commis la dernière sottise : il est né à Lyon ; c'est un Français ; comment s'étonner que la constitutio antonina s'inspire des plus abjects principes de 89 !
  • Marrou ironise en 1938 sur les fascistes qui considère l'Édit de Caracalla accordant la citoyenneté à tous les hommes libres de l'Empire comme la cause de sa chute.
  • Crise de notre temps et réflexion chrétienne de 1930 à 1975 (recueil), Henri-Irénée Marrou, éd. Beauchesne, 1978, « Le racisme en Italie fasciste », p. 124


Comment ne me sentirais-je pas solidaire de ceux que l'ordonnance du a appelé « les Français Musulmans » ? Les ayant conquis autrefois, nous les avons pris en charge ; aussi bien n'avons-nous jamais hésité à les intégrer à notre nation, aussi longtemps qu'il s'agissait de travailler pour elle dans nos usines et nos chantiers, de combattre ou de mourrir : hier encore, traversant la Beauce, je me suis arrêté devant un cimetière militaire à dénombrer les tombes marquées du croissant de l'Islam — soldats tombés pour la France, sacrifiés pour retarder la retraite de l'été 40…
  • « France ma patrie », texte paru dans le Monde du et dénonçant les méthodes utilisées en Algérie.
  • Crise de notre temps et réflexion chrétienne de 1930 à 1975 (recueil), Henri Irénée Marrou, éd. Beauchesne, 1978, « France ma patrie », p. 176


Théologien, j'ai appris de mon maître saint Augustin, ce Berbère, que toutes les nations qui se manifestent dans l'histoire sont nécessairement un mélange, pour nous inextricable, de Cité du Bien et de Cité du Mal. Mais ce que la théologie, l'histoire et le bon sens m'ont aussi appris, c'est que les civilisations qui laissent le fossé s'élargir entre l'idéal dont elles se réclament et les réalisations qu'elles en proposent, ces civilisations là meurent de leur hypocrisie.
  • « France ma patrie », texte paru dans le Monde du et dénonçant les méthodes utilisées en Algérie.
  • Crise de notre temps et réflexion chrétienne de 1930 à 1975 (recueil), Henri Irénée Marrou, éd. Beauchesne, 1978, « France ma patrie », p. 177


Oui, la grandeur française est en péril. Je m’adresse à tous ceux qui, comme moi, professeur, sont des éducateurs, qui, comme moi, ont des enfants et des petits-enfants : il faut que nous puissions leur parler, sans être couverts d’humiliation, d’Oradour et des procès de Nuremberg ; il faut que nous puissions relire devant eux les belles pages de nos classiques sur l'amour de la patrie, sur notre France, « patronne et témoin (et souvent martyre) » de la liberté dans le monde. Oui, avant qu’on soit engagé plus avant dans le cycle infernal du terrorisme et des représailles, il faut que chacun de nous entende au plus profond, au plus sincère de son cœur, le cri de nos pères : « La patrie est en danger ! »
  • « France ma patrie », texte paru dans le Monde du et dénonçant les méthodes utilisées en Algérie.
  • Crise de notre temps et réflexion chrétienne de 1930 à 1975 (recueil), Henri Irénée Marrou, éd. Beauchesne, 1978, « France ma patrie », p. 178-179


Actes de congrès modifier

Le christianisme africain a été l'agent combien fécond, combien efficace, d'un transfert de culture du sud au nord, d'Afrique en Europe. […] Je crois que vous devriez, vous Maghrébins […], vous devriez être assez fiers de cela, d'avoir offert à l'Europe ces maîtres qui l'ont formée […] qu'ils s'appellent Tertullien, Cyprien, Augustin […]. De l'Andalousie et de la Campanie jusqu'à l'Angleterre, la chrétienté latine tout entière, l'Europe occidentale tout entière a été de la sorte fécondée, éduquée, cultivée par vos ancêtres selon la chair, sinon l'esprit, vos pères, chers amis maghrébins.
  • Actes du Deuxiem̀e congres international d'étude des cultures de la mediterranée occidentale, Henri Irénée Marrou, éd. Société nationale d'édition et de diffusion, 1978, vol. 2, p. 173-176


Citations sur Henri-Irénée Marrou modifier

Que M. Henri Marrou, professeur en Sorbonne, ait toujours eu mauvais esprit, cela apparaît bien dans la passion que, dès sa jeunesse, lui inspirait saint Augustin qui était de race berbère. Choisir entre les saints du calendrier le seul qui compte peut-être des descendants parmi les fellaghas, cela suffit sans doute pour que la police de M. Bourgès-Maunoury aille mettre du désordre dans les papiers de cet historien-philosophe.
  • À la suite de la publication d'un texte dénonçant la torture en Algérie, Henri Marrou eut droit à des perquisitions de la DST à son domicile.
  • Bloc-notes, 1952-1957, François Mauriac, éd. Flammarion, 1958, 20 avril 1956, p. 227


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