Les Berbères (en berbère: pl. ⵉⵎⴰⵣⵉⵖⴻⵏ /Imaziɣen/, sing. ⴰⵎⴰⵣⵉⵖ /Amaziɣ/) sont un groupe ethnique autochtone d'Afrique du Nord. Connus dans l'Antiquité sous les noms de Libyens (peuples libyques), Maures, Gétules, Garamantes ou encore Numide).
Citations au sujet des Berbères
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Les Maghrébins ne sont nullement des Arabes. Ce sont des Berbères, ou plutot - car les influences orientales y furent fortes (phéniciennes avec Carthage, turques avec l'Empire ottoman) - des Méditerranéens occidentaux (en arabe maghreb signifie "occident") islamisés par la conquête arabe et qui parlent (il existe des zones de survivance berbère, en Kabylie, par exemple) une langue incompréhensible à Damas : l'arabe dialectal. De la même façon que les Français sont des Celtes (et autres) latinisés, les Maghrébins sont des Berbères mâtinés de Libanais et de Turcs, arabisés et quelque peu francisés. Aujourd'hui divisé en trois pays différents, le Maghreb a également subi une forte influence française.
Il n'y a pas d'Arabes en Afrique du Nord; il n'y a que des Berbères à divers degrés d'arabisation. [...] La prédominance de la religion musulmane et la langue arabe qui lui sert de véhicule avait fait croire aux Européens, en particulier à l'époque de la conquête de l'Algérie, que l'Afrique septentrionale était exclusivement peuplée d'Arabes; mais un examen, même superficiel, suffit pour se convaincre que beaucoup de populations indigènes ne parlent pas l'arabe et le comprennent à peine. Isolées dans les massifs montagneux ou dans les oasis, c'est-à-dire dans les régions les moins accessibles, elles se sont longtemps dérobées à l'observation scientifique des Européens pour les mêmes causes qui les avaient soustraites à la domination politique des Arabes. On a finalement reconnu que l'Afrique septentrionale est véritablement une Berbérie ou la mince couche arabe repose sur un substratum autotochtone à peine modifié.
Augustin Bernard, 1935, dans
L'Algérie et son passé, paru Picard, Paris, 1951, p.19, André Berthier.
Rien n'est plus visible aujourd'hui que cette diversité [de la population] quand on parcourt l'Algérie. Je me rappelle combien j'en fus frappé un jour que j'assistais à un grand marché qui se tenait à Souk-Ahras. [...] Mais ce qui m'étonnait surtout, pendant que je regardais cette foule, c'était d'y rencontrer, sous la chéchia, tant de bonnes figures que je croyais reconnaitre. J'y remarquais à tous les pas de petits hommes trapus, aux yeux bleus, aux cheveux blonds ou rouges, à la face large, à la bouche rieuse, qui ressemblaient tout à fait aux habitants de nos villages. "Prenez une djemaa kabyle en séance, ôtez les burnous, revêtez tout ce monde de blouses bleues ou de vêtements de drap, et vous aurez un conseil municipal, ou siègent des paysans français."
L'Afrique romaine. Promenades archéologiques en Algérie et en Tunisie (1895),
Gaston Boissier, éd. Hachette, 1912, préface, p. 5
Je me suis dit souvent, quand j'assistais à une réunion d'indigènes, à quelque marché ou à quelque fête, que j'avais là, devant mes yeux, le reste de tous ceux qui ont peuplé l'Afrique du Nord. Evidemment les Carthaginois n'ont pas disparu en corps, après la ruine de Carthage. Ce flot de Romains qui, pendant sept siècles, n'a pas cessé d'aborder dans les ports africains, n'a pas repris la mer un beau jour, à l'arrivée des Vandales, pour retourner en Italie. Et les Vandales qui étaient venus avec leurs femmes et leurs enfants, pour s'établir solidement dans le pays, personne ne nous dit qu'ils en soient jamais sortis. Les Byzantins aussi ont du laisser plus d'un de leurs soldats dans les forteresses bâties par Solomon avec les débris des monuments antiques. De tout cela il n'est rien resté que des Berbères, tout s'est absorbé en eux.
L'Afrique romaine. Promenades archéologiques en Algérie et en Tunisie (1895),
Gaston Boissier, éd. Hachette, 1912, p. 358
Condamner les Berbères à un rôle historique passif, c’est à dire quasiment nul, en ne voyant en eux qu’une infatigable piétaille et une bonne cavalerie au service de dominateurs étrangers, même si on reconnaît que ces contingents furent les vrais conquérants de l’Espagne au VIIIème siècle et de l’Égypte au Xème siècle, n’est qu’une aberration non dépourvue de racisme. Elle doit être rejetée.
Les Berbères : mémoire et identité,
Gabriel Camps, éd. Errance, 1987, p. 12
[I]l n’y a aujourd’hui ni une langue berbère, dans le sens où celle-ci serait le reflet d’une communauté ayant conscience de son unité, ni un peuple berbère et encore moins une race berbère. Sur ces aspects négatifs tous les spécialistes sont d’accord… et cependant les Berbères existent.
[L]'Afrique du Nord est peuplée de Méditerranéens, anthropologiquement identiques aux Italiens du Sud de la Péninsule, aux Espagnols, aux insulaires de la Méditerranée occidentale, aux Provençaux, aux Languedociens. Au Maroc, en Algérie, en Tunisie et en Libye, on reconnait aussi facilement que dans les pays européens du Sud, une variété dite atlanto-méditerranéenne, assez grande et robuste, et une variété ibéro-insulaire, plus gracile. Qu'ils se disent Arabes ou Berbères, les Maghrébins appartiennent pour 80% à ces deux variétés du type méditerranéen, le reste est constitué, comme en Europe, d'Alpins [...] ou d'Arménoïdes [...]. En nombre infime s'ajoutent à ce stock quelques individus conservant les caractères du type préhistorique de Mechta-Afalou et quelques métis issus d'éléments négroïdes plus ou moins anciens.
« Berbères. Mythe ou réalité ? » (1996), dans
Les Cultures du Maghreb,
Gabriel Camps, éd. L'Harmatan, 1996, p. 35-36
[O]n constate qu'en premier lieu, il est impossible de distinguer, au point de vue anthropologique, Arabes et Berbères, qu'en deuxième lieu l'Afrique du Nord présente une grande diversité de types, qu'en troisième lieu l'Afrique du Nord se rattache en partie à un ensemble humain que l'on peut considérer comme méditerranéen et qui ne s'éloigne pas considérablement de ce que l'on peut trouver dans diverses régions de France.
Le problème démographique nord-africain (1947),
Louis Chevalier, éd. Presses universitaires de France, 1947, p. 189
La race kabyle que je viens de visiter, plutôt en voyageur qu'en ennemi, est belle. Les hommes sont tous d'un tempérament sec et maigre, d'une taille plus élevée que la moyenne, et généralement bien faits. Leur figure est expressive; leur regard vif et pénétrant [...]. Les vieux marabouts ont des figures graves et vénérables; malgré soi, on est porté à les respecter. Les chefs, surtout les jeunes, ont les traits fins et distingués; leur visage est souvent d'une pâleur aristocratique.
général Jean Cler, 30 septembre 1842, Cherchell, dans Le voyage en Algérie, paru chez Robert Laffont, 2008, p.135-136, Franck Laurent.
La proximité génétique entre le nord de l’Afrique et les groupes sud-ouest européens conduisent à l’hypothèse d’une origine commune entre ces populations. Deux hypothèses sont actuellement discutées. Cette origine commune pourrait dater du Paléolithique Supérieur avec l’expansion d’Hommes anatomiquement modernes depuis le Proche-Orient et s’étendant le long des deux rives de la Méditerranée. Elle pourrait aussi avoir eu lieu au cours de la diffusion Néolithique depuis le Proche-Orient, il y a 10 000 ans av. J.-C.
Clotilde Coudray, 2006, dans Diversité génétique des populations Berbères et peuplement du nord de l'Afrique, paru Revue Anthropo, Vol. 11 - 2006, Volume spécial, XXVIIème colloque GALF, Clotilde Coudray.
Imagine, mon ami, ce que c'est que de voir couchés au soleil, se promenant dans les rues, raccommodant des savates, des personnages consulaires, des Catons, des Brutus, auxquels il ne manque même pas l'air dédaigneux que devaient avoir les maîtres du monde; ces gens-ci ne possèdent qu'une couverture, dans laquelle ils marchent, dorment et sont enterrés, et ils ont l'air aussi satisfait que Cicéron le devait être de sa chaise curule. Je te le dis, vous ne pourrez jamais croire à ce que je rapporterai parce que ce sera bien loin de la vérité et de la noblesse de ces natures. L'antique n'a rien de plus beau.
- Delacroix écrit à Pierret ce qu'il voit à Tanger en 1832
Correspondance générale d'Eugène Delacroix,
Eugène Delacroix, éd. Plon, 1935, t. 1, Lettre à Pierret, 1832, p. 319
Vous vous croyez à Rome ou à Athènes, moins l'atticisme, mais les manteaux, les toges, et mille accidents des plus antiques. Un gredin, qui raccommode une empeigne pour quelques sous, a l'habit et la tournure de Brutus ou de Caton d'Utique.
- Delacroix écrit à Bertin ce qu'il voit à Meknès en 1832
Correspondance générale d'Eugène Delacroix,
Eugène Delacroix, éd. Plon, 1935, t. 1, Lettre à Armand Bertin, 2 avril 1832, p. 328
Ramsès était leucoderme (à peau blanche), de type méditerranéen proche de celui des Berbères africains.
- Conclusions scientifiques de l'étude de la momie de Ramsès II au musée de l'Homme à Paris en 1976-77
Plus qu’une simple « population transitionnelle » entre Europe et Afrique, les Berbères semblent se placer à un carrefour d’influences provenant des populations d’Afrique sub-saharienne, du Proche-Orient et de l’Europe, tout en se rapprochant d’ailleurs plus de cette dernière population que d’aucune autre. Les Berbères semblent ancrés en Afrique
du Nord depuis des temps fort éloignés, au vu des données paléoanthropologiques et archéologiques. Il est cependant impossible de dire à partir des résultats de cette étude s’ils sont les descendants d’une population apparue in situ en Afrique du Nord, de culture paléolithique ibéro-maurusienne (-16 000 ans), puis mésolithique capsienne, ou s’ils sont issus de populations orientales ayant migré dans cette région durant la transition néolithique (-9500, -7000 ans).
J.-M. Dugoujon, 2005, dans
Diversité des allotypes des immunoglobulines d’une population berbère de la vallée de Tacheddirt, paru
BMSAP, Tome 17, Fascicule 1-2 (2005), J.-M. Dugoujon.
À une époque aussi rapprochée de nous que le XVIe siècle, la Berbérie presque toute entière était encore fidèle à la langue et à l'esprit de Massinissa. Au XVIe siècle, c'est-à-dire quelque neuf cents ans après que les premiers envahisseurs arabes eurent déposé dans le pays le germe vivace de leur culture, ces Berbères sont extraordinairement conservateurs et misonéistes.
Emile Félix Gautier, 1927, L'islamisation de l'Afrique du Nord. Les siècles obscurs du Moghreb, dans
Le problème démographique nord-afr, paru chez Puf, 1947, p.195, Louis Chevallier.
Le mot Berbères, emprunté par le français à l'arabe et par ce dernier au latin, a perdu très tôt son sens primitif d'« étranger à la civilisation gréco-romaine ». Il désigne aujourd'hui stricto sensu un groupe linguistique nord-africain : les berbérophones, ensemble de tribus qui ont parlé ou parlent encore des dialectes apparentés à un fonds commun, la « langue » berbère. Dans l'usage courant, qui continue la tradition arabe, on appelle Berbères l'ensemble des populations du Maghreb. Toutefois, l'usage devient fautif, lorsqu'il parle de race berbère. Il n'existe pas en effet de race berbère, les berbérophones présentant des types ethniques bien divers. L'observation la plus simple permet d'opposer un type kabyle, un type mzabite et un type targui, que la vieille enquête de Bertholon et Chantre (1913) avait reconnus comme des groupes purs à côté de croisements divers. Aucune étude de groupes sanguins ne s'est jusqu'ici révélée concluante. Les Berbères ne sont donc pas définissables par des critères raciaux.
Au point de vue zoologique, depuis le début de l'époque tertiaire, l'Afrique du Nord, au nord du Sahara, fait partie de l'Europe. Cela est vrai à la fois des animaux et des races humaines. Les Berbères de l'Afrique du Nord sont identiques comme race aux Espagnols et aux Italiens du Sud, et les anciens Égyptiens, ainsi que leurs descendants les fellahs, sont simplement des variétés bien marquées de la race méditerranéenne.
Le déclin de la Grande Race (1916),
Madison Grant, éd. L'Homme Libre, 2002, chap. V-La race méditerranéenne, p. 137
La Berbérie appartient plus à la Méditerranée occidentale qu'à l'Afrique.
Stéphane Gsell, 1913, Histoire ancienne de l'Afrique du nord, dans
Le problème démographique nord-afr, paru chez Puf, 1947, p.195, Louis Chevallier.
Chez les Berbères, en particulier chez les Kabyles du Rif au Maroc puis dans la Djurdjura, à Enfida, et avant tout parmi les tribus des Chavias dans le massif des Aurès, on constate un apport de la race nordique, ou bien plutôt nordique et falique, que l'on peut attribuer à des invasions préhistoriques. Dans cette région, les blonds représentent, semble-t-il, un cinquième à un tiers de la population.
- L'œuvre de Hans Gunther servit de référence à la doctrine raciale du IIIe Reich
Les peuples de l'Europe (1927),
Hans Günther, éd. Éditions du Lore, 2006, p. 173-174
Le Kabyle n’est pas un sémite, mais un méditerranéen confiné par l’histoire dans les montagnes du Djurdjura, et dont la sensibilité est proche de celle des peuples latins. [...] A la différence de l’Arabe, le Kabyle n’a pas le culte de son passé historique qu’il n’oppose pas à l’histoire de France. Le jeune Kabyle n’a pas de dieux, ni la civilisation musulmane, ni le culte de Mahomet : c’est une table rase.
- Augustin Ibazizen, dans un article de la Nouvelle revue des jeunes (1930) , analysant "L’évolution de la jeunesse kabyle".
Algérie: le passé revisité, Chems-Eddine Chitour, éd. Casbah Éditions, 1998, p. 152
L’histoire ancienne de notre pays et la géopolitique attestent que les Berbères, premiers occupants de l’Afrique du Nord, installés depuis trois ou quatre mille ans, appartenaient à la "civilisation de l’olivier". Ils étaient bel et bien des Méditerranéens d’Occident.
Le testament d'un Berbère: un itinéraire spirituel et politique,
Augustin Ibazizen, éd. Table ronde, 1979, p. 320
Depuis le début des temps historiques, des populations très diverses se sont établies au Maghreb. Si on laisse de coté celles qui, en règle générale, ont échappé à la fusion avec les populations indigènes ou assimilées, tels les Européens installés depuis les années 1830 ou les Juifs venus en vagues successives depuis l'Antiquité, on notera l'immigration de Sémites (Phéniciens, Arabes), d'Indo-Européens (Latins, Vandales, Grecs), de Turcs et de Noirs. Mais si ces différents éléments se sont mélangés aux populations locales, ils sont venus en trop petit nombre pour modifier les conditions ethniques de l'Afrique du Nord. Les Vandales étaient 80.000. L'immigration arabe n'a pas été non plus considérable. [...] Ces remarques nous amènent à penser que les populations occupant aujourd'hui la Berbérie sont, compte tenu de quelques métissages, les mêmes qui l'occupaient au début des temps historiques.
Les Berbères ont toujours été un peuple puissant, redoutable, brave et nombreux; un vrai peuple comme tant d’autres dans le monde, tels que les Arabes, les Persans, les Grecs et les Romains. [...] Citons ensuite les vertus qui font honneur à l'homme et qui étaient devenues pour les Berbères une seconde nature ; leur empressement à s'acquérir des qualités louables, la noblesse d'âme qui les porta au premier rang parmi les nations, les actions par lesquelles ils méritèrent les louanges de l'univers, bravoure et promptitude à défendre leurs hôtes et clients, fidélité aux promesses, aux engagements et aux traités, patience dans l'adversité, fermeté dans les grandes afflictions, douceur de caractère, indulgence pour les défauts d'autrui, éloignement pour la vengeance, bonté pour les malheureux, respect pour les vieillards et les hommes dévots, empressement à soulager les infortunés, industrie, hospitalité, charité, magnanimité, haine de l'oppression, valeur déployée contre les empires qui les menaçaient, victoires remportées sur les princes de la terre, dévouement à la cause de Dieu et de sa religion; voilà, pour les Berbères, une foule de titres à une haute illustration.
Histoire des Berbères et des dynasties musulmanes de l'Afrique Septentrionale (1378),
Ibn Khaldoun, éd. Imprimerie du Gouvernement, 1852, t. 1, p. 199-200
Maintenant, le fait réel, fait qui nous dispense de toute hypothèse, est ceci : les Berbères sont les enfants de Canaan, fils de Cham, fils de Noé, ainsi que nous l'avons déjà énoncé en traitant des grandes divisions de l'espèce humaine. Leur aïeul se nommait Mazîgh ; leurs frères étaient les Gergéséens (Agrikech); les Philistins, enfants de Casluhim, fils de Misraïm, fils de Cham, étaient leurs parents. Le roi, chez eux, portait le titre de Goliath (Djalout). Il y eut en Syrie, entre les Philistins et et les Israélites des guerres rapportées par l'histoire, et pendant lesquelles les descendants de Canaan et les Gergéséens soutinrent les Philistins contre les enfants d'Israël. Cette dernière circonstance aura probablement induit en erreur la personne qui représenta Goliath comme Berbère, tandis qu'il faisait partie des Philistins, parents des Berbères. On ne doit admettre aucune autre opinion que la nôtre; elle est la seule qui soit vraie et de laquelle on ne peut s'écarter.
Histoire des Berbères et des dynasties musulmanes de l'Afrique Septentrionale (1378),
Ibn Khaldoun, éd. Imprimerie du Gouvernement, 1852, t. 1, p. 184
Jusqu'au VIIIe siècle de notre ère, au moins, le nom de Mauri fut appliqué aux habitants de la Berbérie; et ceux-ci, après les Romains, en vinrent à se désigner ainsi eux-mêmes. La conquête de l'Espagne se fit sous la direction de chefs arabes, mais comme elle fut menée grâce aux troupes de Berbères islamisés levées dans tout le Maghreb, le nom de Mauri passa dans la péninsule avec les hommes et devint Moro, servant à désigner non seulement les Berbères mais aussi, à tort, les conquérants arabes.
La génétique montre que l'ancienne Égypte était en partie, et même largement
Berbère.
Histoire des Berbères,
Bernard Lugan, éd. Bernard Lugan, 2012, p. 27
Au contraire de ce qui se passe pour la majorité des colonies [...], la population indigène de l'Afrique Mineure et les immigrants ne sont racialement pas bien différents les uns des autres. En effet, les indigènes sont des Berbères et des Arabes, les immigrants principalement des Espagnols, des Français et des Italiens. Or non seulement les Berbères et les Arabes sont des Europoïdes, mais, comme les Espagnols, comme une partie des Français et des Italiens, ils appartiennent à la même race méditerranéenne.
Le Kabyle, personne n'en doute, n'a été amené dans le pays ni par la conquête musulmane, ni par celle des Romains. Ce n'est ni un Vandale, ni un Carthaginois; c'est le vieux Numide, le descendant des sujets de Masinissa, de Syphax et de Jugurtha .
« La société berbère » (1873), dans
Mélanges d'histoire et de voyages (1878),
Ernest Renan, éd. Calmann Lévy, 1890, p. 321
Les Berbères, dont une partie conservent encore la peau claire et souvent même les yeux bleus, ne remontent pas aux raids ultérieurs des Vandales, mais bien à la très ancienne vague atlanto nordique. De nombreux chasseurs Kabyles, par exemple, sont aujourd'hui encore irréfutablement d'origine nordique. Ainsi, dix pour cent de la population dans les environs de Constantine, et encore davantage dans le Djebel Scheschor, sont des Berbères blonds.
L'Europe a toujours énormément emprunté (et prêté) à ses voisins. Pour ce qui concerne l'apport des populations habitant les rives du sud de la Méditerranée, on peut à peine parler d'extériorité. Les terres d'Afrique du Nord font partie de l'Empire romain, et les Berbères qui les habitent fournissent à ce dernier des empereurs comme, plus tard, des Pères de l'Église. Dans l'Espagne occupée par les Maures s'épanouit une civilisation musulmane tolérante, par l'intermédiaire de laquelle passe aux autres Européens une bonne partie de l'héritage grec classique.
[L]a race méditerranéenne occupe toute l'Afrique du Nord, région ou elle est plus peut-être chez elle qu'en Europe. [...] Dans ce vaste territoire, la race la plus répandue est la méditerranéenne. Mais les races alpines et nordique y pénètrent aussi par place. En outre, par l'Est, sont venues les représentants de deux races, dont l'habitat normal est l'Asie mineure : la sud-orientale et l'anatolienne. Vers le Sud enfin, à travers le Sahara ou par la vallée du Nil, les Blancs d'Afrique sont entrés en contact avec les Noirs et se sont largement croisés avec eux. La composition anthropologique de l'Afrique du Nord offre donc une certaine complexité.
Les races humaines (1944),
Henri Vallois, éd. Presses universitaires de France, 1967, p. 35-36
L'anthropologie, l'iconographie et l'onomastique révèlent que, dans l'Antiquité, la population égyptienne était d'un type nord-africain, semblable à celui des Berbères, variable suivant la latitude, ceux du nord étant plus méditerranéens, tandis que leurs compatriotes de la frontière méridionale présentaient quelques particularités sub-sahariennes, comme une peau très foncée ou même, tout au sud, des cheveux crépus.
- Dimitri Laboury est chercheur qualifié du Fonds National de la Recherche Scientifique de Belgique (FNRS) à l’Université de Liège (Belgique)
L'Égypte pharaonique,
Dimitri Laboury, éd. Le Cavalier Bleu, coll. « Idées reçues », 2001, p. 62-63
La génétique montre que l'ancienne Égypte était en partie, et même largement berbère.
Histoire des Berbères,
Bernard Lugan, éd. Bernard Lugan, 2012, p. 27
Il faut peut-être rappeler que le punique est né de la rencontre de deux mondes, l'un autochtone, l'autre oriental, qu'il est un métissage ethnique, culturel ou les deux à la fois et non une simple transplantation de la civilisation phénicienne dans une terre africaine libyco-berbère encore plongée dans la nuit primitive.
Thagaste, Souk Ahras, Patrie de saint Augustin,
Nacéra Benseddik, éd. Inas, 2004, p. 25
Des princes berbères épousèrent des femmes de la société carthaginoise qui fut largement ouverte aux autochtones de sorte que, très tôt, il fut difficile de distinguer un Carthaginois d'origine purement phénicienne d'un carthaginois d'origine purement libyque. C'est pourquoi le terme punique, appliqué habituellement aux carthaginois, convient davantage encore aux Berbères fortement marqués par les influences de la civilisation carthaginoise.
« La civilisation punique »,
M'hamed Hassine Fantar,
Histoire et Archéologie (les dossiers d'archéologie), nº 69, décembre 82/janvier 83, p. 16
Les carthaginois ne sont pas seulement des Phéniciens venus s'installer à l'ouest, comme on l'a souvent dit. Plusieurs données invitent à leur reconnaître une spécificité. [...] En réalité, la civilisation carthaginoise est le produit d'une hybridation. L'élément phénicien s'est mélangé à l'élément autochtone, qui apparait sous le nom de "libou",
"les libyens".
« L'identité carthaginoise est faite de couches multiples »,
M'hamed Hassine Fantar,
Les Cahiers de Science & Vie, nº 104, mai 2008, p. 25
Nous considérons les Carthaginois comme une part essentielle de notre identité. Mais cette identité n'est pas monolithique; elle est plurielle. Ses composantes carthaginoises, romaines (n'oubliez pas que nos ancêtres ont parlé latin pendant sept siècles), vandales, byzantines et bien sûr et surtout arabes sans oublier le socle autochtone, ce socle berbère qui est très souvent désigné aujourd'hui métonymiquement par l'ethnologue Amazigh. Notre arabité est importante, mais notre histoire ne commence pas avec la conquête arabe.
« L'identité carthaginoise est faite de couches multiples »,
M'hamed Hassine Fantar,
Les Cahiers de Science & Vie, nº 104, mai 2008, p. 26
Annibal dut à ses Numides ses principales victoires. Scipion, ayant conquis l'Espagne et fait alliance avec Masinissa, ôta aux Carthaginois cette supériorité. Ce fut la cavalerie numide qui gagna la bataille de Zama, et finit la guerre.
La pénétration de la civilisation romaine dans l'élite de la population africaine a permis à des Africains, Berbères de race, d'accéder aux postes les plus en vue de la société impériale. Il est bien remarquable que dans la littérature latine du second siècle, deux Africains soient au premier rang : Fronton de Cirta et Apulée de Madaure.
L'Afrique du Nord française dans l'histoire (1937),
Eugène Albertini, éd. Hachette, 1937, préface, p. 90
Après ce que nous avons dit d'une façon générale sur le peuplement de l'Afrique romaine, il est vraisemblable que, dans la grande majorité des cas, quand nous nous trouvons en présence d'un écrivain latin d'Afrique, nous avons affaire non à un descendant d'immigrés [italiens], mais à un Berbère romanisé.
L'Afrique romaine (1937),
Eugène Albertini, éd. Auspices du gouvernement général de l'algérie, 1937, p. 54
Augustin aurait ignoré le vieux fonds berbère de son pays natal quand il a écrit que la lingua punica était le dialecte des paysans de la région d'Hippone. Le débat ouvert il y a plus de 50 ans sur la question ne pourra être clos aussi longtemps que la thèse de la prépondérance punique dans ce vieux pays numide sera contredite par les données archéologiques.[...] Que leur noms fût libyque, punique ou latin, les habitants de Thagaste, cité libyco-punique d'une région qui n'avait pas connu de colonisation romaine, étaient berbères. L'ancrage culturel d'Augustin peut-il donc ainsi, en l'absence de traces écrites des fondements ancestraux de sa personnalité, être restreint à sa seule latinité, a silentio et par défaut en quelque sorte ? Comme tout Africain romanisé, Augustin a dû vraisemblablement assumer une individualité plus complexe qu'on ne veut l'admettre.
Thagaste, Souk Ahras, Patrie de saint Augustin,
Nacéra Benseddik, éd. Inas, 2004, p. 25
Puisqu'il est admis que Rome s'était contentée d'un appareil adminimstratif très simple et qu'elle avait, faute d'un peuplement laissé l'Afrique aux Africains, ceux-ci ont formé le principal élément de la population des villes, des bourgs, des hameaux et des fermes.[...] Les Berbères romanisés avaient été loin dans l'assimilation. Ils avaient adopté la langue, les mœurs, même l'esprit de Rome qui put recruter chez eux des chevaliers, des sénateurs et susciter une élite intellectuelle représentée par Apulée, Fronton, Tertullien, saint Augustin. On ne dira jamais assez combien ces Berbères furent profondément christianisés. Le nombre des églises est un sujet d'étonnement car on en voit toujours plusieurs dans un bourg de moyenne étendue. Ce sont ces Berbères nombreux assimilés et christianisés que vint heurter l'invasion islamique.
L'Algérie et son passé (1951),
André Berthier, éd. Picard, 1951, p. 25
Vers le début du IIIe siècle, Caracalla conféra le droit de cité à tous les hommes libres vivant sur les territoires organisés en communes. Les magistrats municipaux furent en grand nombre admis dans l'ordre des chevaliers. D'importantes carrières militaires ou administratives s'ouvrirent à eux. Leurs fils entrèrent souvent dans l'ordre sénatorial qui ouvrait l'accès aux plus hautes magistratures. L'élévation d'une famille était l'œuvre d'une suite de générations. Le chef maurétanien Lucius Quietus remporta des victoires sur les Daces, les Parthes, les Juifs. Un personnage de Cirta fut le premier Africain qui parvint au consulat sous Titus. Un siècle après, les Cirtéens furent nombreux au Sénat. L'Afrique donna deux empereurs, Septime Sévère né à Leptis Magna et Macrin, originaire de Caesarea. Un préfet de Rome, à la fin du IVe siècle, avouait avec orgueil : "A mon avis, notre race est priviligiée et comme prédestinée, tant elle est féconde en gens de mérite et tous ces enfants qu'elle a produits et formés, elle les voit arriver aux plus hautes situations".
L'Algérie et son passé (1951),
André Berthier, éd. Picard, 1951, p. 50
La littérature chrétienne d'Afrique a été l'initiatrice de la littérature latine chrétienne en Occident ou l'Église dans les premiers temps a parlé et écrit le grec.
L'Algérie et son passé (1951),
André Berthier, éd. Picard, 1951, p. 94
Il a donc existé en Afrique, pendant toute la durée de l'empire, une classe lettrée fort instruite, très distinguée, dont le latin était devenue la langue ordinaire. [...] Les Africains n'employaient pas la langue du vainqueur uniquement par nécessité, pour communiquer avec lui et débattre les intérêts communs; ils s'en étaient tellement imprégnés, ils se l'étaient rendue si familière, qu'ils en avaient fait l'expression naturelle de leurs sentiments et de leurs pensées; une littérature était née chez eux qui a été pendant quatre siècles l'admiration du monde. C'est ce qui prouve que la culture romaine n'y était pas seulement en superficie, qu'elle avait jeté des racines profondes, au moins dans les villes et parmi les gens éclairés.
L'Afrique romaine. Promenades archéologiques en Algérie et en Tunisie (1895),
Gaston Boissier, éd. Hachette, 1912, préface, p. 313
Berbère, né en 354 à Tagaste, en Africa, [Saint-Augustin] mourra évêque d'Hippone en 430, alors que les Vandales assiègent la ville. L'éclat exceptionnel de son œuvre (La Cité de Dieu, les Confessions), ses contradictions mêmes, son désir d'associer la foi et l'intelligence, c'est-à-dire, en gros, la civilisation antique et la civilisation chrétienne, le vieux vin et le nouveau, ces tentatives conscientes font de lui, sous un certain angle, un rationaliste. La foi domine tout chez lui. Il dit cependant : credo ut intelligam, je crois pour comprendre. Il dit encore : Si fallor, sum - si je me trompe, j'existe; Si dubitat, vivit - s'il doute, il vit. Il serait abusif de voir dans ses affirmations, longtemps à l'avance, le Cogito ergo sum de Descartes; il est évident toutefois qu'elles l'évoquent. Sans doute, l'avenir a-t-il réservé sa plus grande attention à saint Augustin théologien, et à ses afirmations sur la prédestination. N'empêche que l'augustinisme a donné sa couleur, ses possibilités de mouvement et de discussion au christianisme occidental, ne serait-ce qu'en insistant sur la forte nécessité de ne s'engager dans la foi qu'en connaissance de cause, après une profonde réflexion personnelle, avec la volonté d'agir en conséquence.
Le christianisme africain fut riche en martyrs et en écrivains : Tertullien, Arnobe, Cyprien. Le plus grand de tous fût Augustin, qui devint l'un des maîtres de la pensée occidentale pour de nombreux siècles. Issu d'une famille de Thagaste (Souk-Ahras), évêque d'Hippone, Père de l'Église, saint Augustin atteint une stature universelle qui transcende et sa province et l'Empire et son temps. Il n'est pas indifférent que le plus grand penseur de l'Occident latin, l'auteur de la Cité de Dieu et des Confessions, fût un Berbère chrétien. .
Les Berbères : mémoire et identité,
Gabriel Camps, éd. Errance, 1987, p. 124
L'évangélisation de l'Afrique fut-elle aussi importante et profonde que le font croire les prestigieuses figures d'Augustin et, avant lui, de Cyprien et de Tertullien ? Le schisme donatiste, qui est présenté souvent comme une manifestation de la résistance africaine, n'était-il pas en raison même de son importance, une preuve de la profondeur et de l'extension des conversions à la nouvelle religion ? Mais le christianisme n'était-il pas cantonné dans les seules villes et finalement confondu avec une nouvelle forme d'assimilation ? On doit s'inscrire en faux contre cette vue restrictive. Les longues listes épiscopales des conciles africains, les basiliques de simples bourgades dont nous ignorons, jusqu'au nom, les épitaphes d'humbles paysans et même de chefs berbères dans des régions apparemment peu romanisées, comme la chaine des Babors [...] sont autant de témoignages d'un évangélisation qui, en certains points, semble même avoir dépassé les limites de la domination impériale. L'évangélisation franchit également les limites chronologiques de la domination romaine, elle se poursuit pendant les époques vandale et byzantine.
Les Berbères : mémoire et identité,
Gabriel Camps, éd. Errance, 1987, p. 128-129
De tous les pères de l'église, saint Augustin fût le plus admiré et le plus influent au Moyen Age. [...] Augustin était un indigène Nord-Africain dont la famille n'était pas romaine, mais berbère. [...] C'était un génie, un géant intellectuel.
- (en) Of all the fathers of the church, St. Ausgustine was the most admired and the most influential during the Middle Ages. [...] Augustine was an outsider - a native North African whose family was not Roman but Berber. [...] He was a genius - an intellectual giant.
The Civilization of the Middle Ages,
Norman Cantor (trad. Wikiquote), éd. Harper, 1993, p. 74
Débarassés de Rome, puis de Bysance, la Rome de l'Orient, de sa tutelle, des ses légionnaires et de ses percepteurs, les Berbères ont puisé dans le christianisme, qu'ils conservaient avec ferveur, la force d'en perpétuer les traditions, la langue et jusqu'au nom qu'ils portaient, quand survinrent les envahisseurs musulmans, et qui avaient fait d'eux les "Roumis" [...]. Cette force a brisé l'élan des conquérants, retardé le succès de leur conquête et elle les a contraints, victorieux, à composer avec elle. Leurs premières monnaies furent frappées en latin in nomine Dei misericordis; et ce n'est qu'après l'irruption des hordes hilaliennes, au XIe siècle, que les dernières communautés chrétiennes se sont dissoutes.
Ces Berbères ont été puissamment chrétiens jusque dans les campagnes et dans ces lointains villages ou l'on trouve jusqu'à deux ou trois basiliques. Ils utilisent le latin pour leurs inscriptions. Les fondateurs de la première littérature chrétienne ont été Tertullien et ce pur berbère Saint-Augustin. Les premières traductions de la Bible en latin ont été faites en Afrique. Les émigrants berbères d'alors qui ont leur quartier à Rome, contribuent à répandre le christianisme.
Le problème démographique nord-africain (1947),
Louis Chevalier, éd. Presses universitaires de France, 1947, p. 194
Contrairement aux résultats universels de la foi islamique, en Kabylie nous découvrons la sainte loi du travail
obéie, la femme à peu près réhabilitée, de nombreux usages où respirent l'égalité, la fraternité, la commisération chrétienne. [...] Plus on creuse dans ce vieux tronc, plus, sous l'écorce musulmane, on trouve de sève chrétienne. On reconnaît alors que le peuple kabyle, en partie autochtone, en partie germain d'origine, autrefois chrétien tout entier, ne s'est pas complètement transfiguré dans sa religion nouvelle. Sous le coup du cimeterre, il a accepté le Koran, mais il ne l'a point embrassé; il s'est revêtu du dogme ainsi que d'un burnous; mais il a gardé, par dessous sa forme sociale antérieure, et ce n'est pas uniquement dans les tatouages de sa figure qu'il étale devant nous, à son insu, le symbole de la Croix.
Mœurs et coutumes de l'AlgérieTell, Kabylie, Sahara,
Eugène Daumas, éd. Hachette, 1858, p. 254-255
Les origines et le développement du christianisme en Afrique du Nord s'inscrivent dans une double histoire. C'est d'abord celle de Rome, qui avait pris pied sur ces rivages en 146 avant notre ère, à la fin de la troisième guerre contre sa rivale Carthage ; Rome, la capitale d'un empire dont les diverses mutations politiques, économiques et religieuses avaient leurs répercussions dans les provinces occupées. C'est surtout l'histoire de ces Africains, berbères et numides, établis de la Libye au Maroc actuels, la Djeziret el-Maghreb, étendue sur deux mille kilomètres, baignée par trois rivages et soudée au socle saharien.
Berbères: [...] Les plus connus d'entre eux étaient l'auteur romain Apulée, l'empereur romain Septime Sévère, et Saint-Augustin dont la mère était berbère.
- (en) Berbers : [...] The best known of them were the Roman author Apuleius, the Roman emperor Septimius Severus, and St. Augustine, whose mother was a Berber.
Encyclopedia Americana,
Encyclopedia Americana, éd. Scholastic Library Publishing, 2005, vol. 3, Article Berbères, p. 569
Si l'on doute de l'effet produit sur les intelligences [par l'islamisation], il suffit de comparer ce que fut le peuple berbère et, généralement parlant, les peuples habitant l'Afrique du Nord, avant leur conquête par l'Islam et ce qu'ils sont devenus depuis. Presque tous les Pères latins sont des Africains. Tertullien de Carthage, le Numide Arnobe de Sicca et son élève Lactance, saint Cyprien de Carthage, Victorinus l'Africain, le Berbère saint Augustin, bref toute cette glorieuse tête de colonne de la patristique latine [...], que de dons splendides de l'Afrique à l'Église de Rome pendant que celle-ci n'avait encore à mettre en balance que saint Ambroise et saint Jérôme !
Le philosophe et la théologie (1960),
Étienne Gilson, éd. Vrin, 2005, p. 175-176
Il est vraisemblable que la plupart [des écrivains d'Afrique] furent des Berbères romanisés qui exprimèrent dans la langue du conquérant ce que le libyque ou même le punique eussent été incapable de traduire.
Tertullien était le fils d'un centurion de la cohorte proconsulaire. [...] Nous ignorons les conditions de sa conversion [au christianisme]. Elle dut être provoquée, comme tous les acte de sa vie, par sa logique passionnée. Dès qu'il voyait une vérité, il s'y livrait corps et âme, sans ménagement, sans compromission. C'était un extrémiste et un minoritaire. Il n'aimait pas les doctrines triomphantes qui pactisent avec le siècle. Son esprit se complaisait dans l'absolu, son tempérament dans la lutte. Avec cela, pamphlétaire admirable, armé pour la polémique comme pas un et s'y donnant tout entier. Un Berbère converti, mais qui, sous le placage chrétien, gardait toutes les passions, toute l'intransigeance, toute l'indiscipline du Berbère.
Berceau de la latinité chrétienne, patrie de Tertullien, de Minucius Felix, de Cyprien, d'Arnobe, de Lactance, d'Optat de Milève, de Marius Victorinus, et aussi de Tyconius, de Donat, et chez les Païens de Martianus Capella, de Macrobe peut-être; avec une population ou au vieux fond berbère étaient venus se fondre Puniques, Romains et bientôt Germains, l'Afrique romaine est une terre de choix pour qui veut connaître les grandeurs et aussi hélas ! les malheurs d'une époque riche en imprévus de toutes sortes, l'ère des grandes invasions barbares. Au début du Ve siècle encore, à cause de son grand évêque d'Hipponne, terre de schismes et d'hérésies, signes évidents de la vitalité de sa culture, lieu de passage de voyageurs et de réfugiés, l'Afrique reste un haut-lieux de la vie latine.
L'Algérie antique ne manque pas de champions. Avant Rome, ce furent des hommes d'action : les rois numides, Syphax et surtout Massinissa, l'aguellid au règne semi-séculaire qui façonna son pays et lui ouvrit les portes de l'avenir. Au temps de Rome, des hommes de parole et de pensée : Apulée de Madaure, soupçonné d'etre magicien, ce qu'il fut bien, mais par la magie de son verbe, et surtout Augustin de Thagaste, qui admirait le "philosophe platonicien" de Madaure et aurait inscrit son nom au-dessus du sien sur la liste des grands esprits de l'Antiquité, si le destin - lui dira la volonté divine - n'en avait décidé autrement.
« Augustin, un itinéraire algérien »,
Serge Lancel,
Les dossiers d'archéologie, nº 286, septembre 2003, p. 82
Pour la première fois, l'empire se trouvait aux mains d'un provincial [Septime Sévère], romanisé certes, mais qui, issu d'une famille berbère de Leptis Magna, en Tripolitaine, gardait de solides attaches africaines. [...] L'avènement du premier Prince africain - à propos duquel on a pu parler de "revanche d'Hannibal" - inaugure une période de quarante années d'une grande importance pour l'histoire ultérieure de Rome. Bien entendu parce que Sévère a sauvé l'Empire de l'anarchie. Mais aussi parce que les réformes politiques, militaires, économiques et sociales que lui ont imposées à la fois les circonstances et les conditions mêmes de son arrivée au pouvoir, autant que son tempérament personnel et l'influence de son entourage, ont orienté l'Urbs, ses institutions et même sa culture vers ce que les historiens allemands appellent la "Spätantike", pour nous l'"Empire tardif".
Histoire de Rome,
Marcel Le Glay, éd. Hachette, 1992, t. 2, Au secours de Rome, un empereur africain, p. 336-337
C'est paradoxalement en Afrique du Nord, donc dans un pays aujourd'hui totalement islamisé, qu'est né le christianisme occidental latin. [...] En Afrique du Nord, dès la seconde moitié du IIe siècle, prit son essor dans tous les milieux sociaux la communauté chrétienne occidentale la plus abondante et la plus dynamique, d'emblée de langue latine. C'est là aussi qu'au Ve siècle le christianisme occidental trouva sa personnalité propre, intellectuelle et spirituelle, grâce à la marque indélébile que devaient lui imprimer la pensée et l'œuvre de saint Augustin. [...] Les provinces de l'Afrique romaine comptaient parmi les plus riches de l'immense empire; on y trouvait de multiples villes prospères, ou vivait une élite cultivée, formée le plus souvent de Berbères latinisés comme l'étaient de toute évidence Augustin lui-même et sa famille.
« Saint Augustin et le rayonnement de sa pensée »,
Claude Lepelley (2007), dans
Histoire du Christianisme, sous la direction d'
Alain Corbin, éd. Seuil, 2007, p. 121-122
Les Maures, nation africaine, dont le pays, la Mauritanie, correspondant au Maroc actuel, fut incorporé à l'Empire romain en l'an 42 de notre ère, fournissaient aux armées romaines des cohortes auxiliaires, dont la Notitia dignitatum imperii indique les cantonnements, non seulement dans la Mauritanie Tingitane, leurs pays d'origine, mais aussi dans l'ile de Bretagne, dans l'Illyrie, dans l'Italie, en Pannonie, dans la Gaule et dans diverses parties de l'empire d'Orient. C'est évidemment à un ancien cantonnement de cavaliers maures, les mêmes peut-être qui résidaient, lors de la rédaction de la Notitia dignitatum, à Quadratum, dans la Première Pannonie, qu'une localité du Norique devait le nom d'Ad Mauros sous lequel cet écrit les désigne. Au commencement du Ve siècle, des soldats de cette nation tenaient garnison en Gaule, dans la péninsule armoricaine, et la Noticia dignitatum les appelle, du nom des cités dans lesquelles ils étaient établis, Mauri Veneti et Mauri Osismiaci. La certitude du séjour de Maures en Gaule, sous la domination romaine, et les constatations faites précédemment permettent de fixer le sens du nom de lieu Mauritania, que l'on trouve dans de nombreux textes latins pour désigner les lieux qui portent aujourd'hui le nom de Mortagne (Charentes-Inférieure, Nord, Orne, Vendée) : Mauritania serait une forme basse du nom latin Mauretania, et en France le nom Mortagne désignerait des localités fondées ou occupées, à l'époque romaine, par les soldats maures qui, licenciés sans doute après la chute de l'empire, ont du chercher un asile dans des lieux divers.
Les noms de lieu de la France (1921),
Auguste Longnon, éd. Ayer Publishing, 1973, préface, p. 135-136
L’islamisation de la Berbérie soulève un problème historique que nous n’avons pas l’espoir de résoudre [...]. Ce pays avait été une des terres d’élection du christianisme. Introduit par Carthage et les villes de la côte, il avait gagné les villes de l’intérieur. L’Africain Tertullien disait à la fin du IIe siècle : « Nous sommes presque la majorité dans chaque cité ». L’Église, à cette époque, comptait déjà de nombreux martyrs ; elle devait s’imposer également par ses docteurs. Persécutée, elle se glorifiera de posséder un saint Cyprien ; triomphante, elle fera entendre la grande voix de saint Augustin à la chrétienté tout entière. Au reste, la religion du Christ ne recrutait pas seulement ses adeptes dans les ville [...]. Le nombre étonnant de sanctuaires modestes, de chapelles sommairement édifiées, dont nous rencontrons les ruines à travers les campagnes d’Algérie, exprime la diffusion de l’Évangile chez les ruraux berbères, le ferveur des petites gens dans les hameaux. Or, en moins d’un siècle, les fils de ces chrétiens auront en grande majorité adopté l’islam avec une ardeur capable d’affronter l’épreuve du martyre. L’œuvre de conversion s’achèvera au cours des deux ou trois siècles qui suivront, œuvre
définitive et quasi totale, ne laissant que des îlots infimes dont l’existence semble douteuse [...]. Comment expliquer cette déchristianisation et l’islamisation qui en est le corollaire ?
La Berbérie musulmane et l'Orient au moyen âge (1946),
Georges Marçais, éd. Montaigne, 1946, p. 35-36
Le christianisme africain a été l'agent combien fécond, combien efficace, d'un transfert de culture du sud au nord, d'Afrique en Europe. [...] Je crois que vous devriez, vous Maghrébins [...], vous devriez être assez fiers de cela, d'avoir offert à l'Europe ces maîtres qui l'ont formée [...] qu'ils s'appellent Tertullien, Cyprien, Augustin [...]. De l'Andalousie et de la Campanie jusqu'à l'Angleterre, la chrétienté latine tout entière, l'Europe occidentale tout entière a été de la sorte fécondée, éduquée, cultivée par vos ancêtres selon la chair, sinon l'esprit, vos pères, chers amis maghrébins.
Actes du Deuxiem̀e congres international d'étude des cultures de la mediterranée occidentale,
Henri Irénée Marrou, éd. Société nationale d'édition et de diffusion, 1978, vol. 2, p. 173-176
Si l'empire romain est tombé en décadence, la faute en est à Caracalla; ce dégénéré, fils d'un Berbère et d'une Syrienne a commis la dernière sottise : il est né à Lyon; c'est un Français; comment s'étonner que la constitutio antonina s'inspire des plus abjects principes de 89 !
- 1938, Marrou ironise sur Caracalla
Crise de notre temps et réflexion chrétienne de 1930 à 1975 (recueil),
Henri-Irénée Marrou, éd. Beauchesne, 1978, p. 124
Théologien, j'ai appris de mon maître saint Augustin, ce Berbère, que toutes les nations qui se manifestent dans l'histoire sont nécessairement un mélange, pour nous inextricable, de Cité du Bien et de Cité du Mal.
Crise de notre temps et réflexion chrétienne de 1930 à 1975 (recueil),
Henri-Irénée Marrou, éd. Beauchesne, 1978, p. 177
« Aime et fais ce que tu veux ». Qu'y a t-il à ajouter à cette consigne de saint Augustin, ce bougnoule ?
- François Mauriac, au plus fort de la guerre d'Algérie, ironise en rappelant l'immense apport de l'Afrique du Nord à la civilisation latine et catholique
Des Nord-Africains furent pleinement intégrés au système romain. L'accession d'un Nord-Africain, le Berbère Septime Sévère, en 193, puis de son fils Caracalla, à la dignité impériale, la floraison des villes parmi les plus belles du monde romain, le nombre des savants et écrivains de renom, sans compter le prestige durable dont jouira plus tard le Berbéro-Romain saint Augustin de Thagaste (Souk Ahras), le premier Père de l'Église catholique, sont là pour le marquer.
Dès lors [46 après JC], tout le Maghreb fut inclus dans l'Empire. Mais il n'eut rien à voir avec une colonie au sens moderne du terme. Il y eut bien des expéditions militaires; mais rien qui ressembla jamais à la sanglante conquête de l'Algérie entreprise près de deux millénaires plus tard. Il y eut bien des colons européens, mais jamais de muraille de Chine entre eux et les Berbères du cru, auxquelles il s'assimilaient en une ou deux générations, via le mariage (chose impensable dans l'Algérie française), devenant ainsi des Romano-Africains. [...] L'accession des Nord-Africains à la citoyenneté romaine progressa à partir du Ier siècle jusqu'à l'édit de Caracalla (212), qui fit de tous les hommes libres de l'Empire des citoyens romains. Caracalla était le fils de Septime Sévère, un des plus grands empereurs romains, originaire de Tripolitaine. Au IIIe siècle, près d'un cinquième des sénateurs romains étaient d'ailleurs des Nord-Africains : conçoit-on, dans la première moitié du XXe siècle, un parlement français comprenant 20% de Maghrébins ? De même, on n'imagine pas la littérature latine sans ses écrivains d'origine nord-africaine : Térence, Suétone, Florus, Apulée, Tertullien et, bien sûr, saint Augustin.
« Quand le Maghreb parlait latin »,
Gilbert Meynier,
GEO Histoire, nº 1, avril 2007, p. 28
Lucius Quietus: général romain, Maure d'origine, apprit l'art de la guerre dans les armées romaines, sous l'empire de Domitien et de Nerva; renvoyé ensuite par motif de mécontentement, il fut rappelé sous l'empire de Trajan, vers l'an 110 de J.-C. Lucius, qui avait sous ses ordres un détachement de Maures, se signala dans les guerres que cet empereur eut à soutenir : il recouvra Nisibe, brûla Edesse, et prit Séleucie. Pour récompenser son courage, Trajan l'honora du consulat; et l'on ajoute même qu'il désirait le proposer pour son successeur : mais Adrien, ayant été élevé à l'empire, ôta le commandement des Maures à Lucius Quietus, sur le simple soupçon d'aspirer à la souveraineté; et ce général mourut dans l'obscurité.
Tout donne à penser, sans en avoir de preuves absolues, qu'ils [les grands noms de l'Algérie romaine] sont tous de sang berbère. Eu égard à la modicité de l'apport italien, le métissage ne touche qu'un faible pourcentage de la population.
Saint-Augustin, le Berbère, en fait foi et en est le magistral témoin : la religion chrétienne s'est imposée en Afrique romaine.
Il a fallu des siècles pour que l'Afrique romaine offre à l'humanité un Apulée, un saint Augustin et un Septime Sévère; les deux premiers de sang berbère.
L'Afrique, où devait naître et grandir Augustin, ne comptait pas seulement au nombre des plus riches provinces romaines, et parmi celles qu'on appelait
nutrices Romae; mais elle se trouvait depuis longtemps comme en possession de fournir à l'Empire des personnages considérables par le talent et par la science. L'Adrumétain Salvius avait été le rédacteur de l'Édit perpétuel. Le Maure Opélius Macrinus, un des successeurs de Sévère, était un jurisconsulte distingué. Albinus d'Adrumète, qui prit la pourpre en même temps que Sévère, était un connaisseur érudit. Le consul Eutychius Proculus, natif de
Sicca, avait professé la grammaire. Apulée de Madaure avait été comblé, dans sa patrie, d'assez d'honneurs pour n'avoir désiré ni Rome, ni l'Italie. Enfin, l'Afrique avait vu naître, avec le poète Némésianus, Tertullien et Minucius Félix, Cyprien, Arnobe et Lactance.
Imaginons que dans les écoles de France, il soit proposé aux jeunes issus de l’immigration d’Afrique du Nord une initiation à leurs racines culturelles autres qu’uniquement coraniques (comme ce fut le cas pourtant, et avec les dégâts que l’on sait en maints endroits) et que, parmi les matières et les écrivains enseignés, il y ait non seulement tel poète berbéro maure, mais aussi les papes Victor 1er, Gelasius 1er, Apulée, Fronton, le maître de Marc-Aurèle, l’empereur Septime Sévère, Cyprien, Tertullien, Augustin, bref, la littérature latine, et le christianisme... [...] Ce serait le branle bas de combat général. La dénonciation d’un «néo-colonialisme». Puisque Apulée et Augustin seront dits Romains et non Berbères et que le christianisme sera seulement perçu dans son importation récente alors que l’Église d’Afrique, composée de Berbères chrétiens en majorité, a été au fondement du christianisme européen, du christianisme tout court, donc de l’Occident même, et ce à l’époque où Rome elle-même était encore païenne.
- Docteur, Lucien Oulahbib est chargé de cours en sciences politiques à Paris X et à Lyon III.
Le monde arabe existe-t-il ?,
Lucien Oulahbib, éd. Éditions de Paris, 2007, p. 13
L’Afrique, judaïsée, latinisée, et christianisée n’a pas connu une vie spirituelle et culturelle moindre, bien au contraire, que l'Andalousie dont l’histoire fut d’ailleurs loin d’être homogène du point de vue à la fois politique et culturel car il s’agissait plutôt d’une interaction, voire d’une intrication, dynamique, entre les liens juifs, chrétiens, et islamiques, c’est-à-dire d’origine non uniquement arabe. [...] le passé authentiquement chrétien de la Berbérie qui précéda le moment Andalou, n’a pas à être enseveli, et, surtout, considéré comme étant extérieur, étranger à l’histoire berbère. Certes Augustin pensait sans aucun doute dans la langue latine, culturellement parlant. Mais est-ce que cela veut dire pour autant qu’il faille considérer cette racine, et, plus encore, le lien chrétien au divin comme extérieur à la chair spirituelle Berbère, ce qui laisserait supposer que seuls le fait d’écrire dans la langue arabe et de penser au sein du lien islamique seraient légitime? Et au nom de quoi faudrait-il rattacher nécessairement et exclusivement l’histoire Berbère à l’histoire Arabe ?
Le monde arabe existe-t-il ?,
Lucien Oulahbib, éd. Éditions de Paris, 2007, p. 16
Son étonnante vivacité [à la race berbère] est un des phénomènes de l'histoire les plus dignes d'être étudiés. A l'époque romaine, d'ailleurs, le monde berbère a introduit quelques éléments essentiels dans le mouvement général de la civilisation, en prenant une part considérable à la formation du christianisme latin. [...] [L'hospitalité kabyle] est admirable et montre tout ce qu'il y a d'excellentes qualités de cœur dans la race berbère. Les pages héroiques et touchantes de l'histoire du christianisme africain s'expliquent par cet esprit d'humanité, de douceur.
« La société berbère » (1873), dans
Mélanges d'histoire et de voyages (1878),
Ernest Renan, éd. Calmann Lévy, 1890, p. 322-337
Tes noms sont glorieux au cours de ton histoire,
Syphax. Massinissa qui fut ton plus grand roi,
Mais bientôt va s’écrire un chapitre de gloire :
Le berbère chrétien, le rocher de la foi.
Pour te peindre d’un trait on peut dire qu’en somme,
Pareil à ton soleil, ton rayon est ardent,
C’est un astre nouveau, celui des droits de l’homme.
Qui monte, grâce à toi, dans le ciel d’Occident.
Tertullien, Victor, puis l’Église souffrante,
L’évêque Cyprien, prestigieux martyr,
Enfin saint Augustin, la flamme triomphante,
Le sublime flambeau, splendeur de l’avenir.
Ton sang, noble ciment de l'Église africaine
-Ce précieux fleuron de notre chrétienté-
Répandu par amour, en réponse à la haine,
Conserve, sous l’Islam, encore sa pureté.
Le Berbère, Lumière de l'occident,
Vincent Serralda et André Huard, éd. Nouvelles éditions latines, 1987, p. 7-8
Il faut aussi que le Berbère d'aujourd'hui qui connait ses ancêtres, sache et prenne pleinement conscience que par eux, après avoir emprunté des dieux à l'Égypte, à Carthage et à Rome, il s'avança dans le christianisme naissant, sans y être contraint, il versa généreusement son sang pour demeurer chrétien, et comptera toujours parmi ces mêmes ancêtres les plus purs joyaux de l'Église d'Afrique, qui fut l'un des fleurons de l'Occident. [...] Victor 1er, qui pendant dix années occupe le trône de saint Pierre, alors que l'Afrique chrétienne vient à peine d'entrer dans l'histoire, Tertullien, lumière de l'Occident, saint Cyprien, le premier évêque d'Afrique à verser son sang pour l'Église de Jésus-Christ, enfin, le plus prestigieux de tous, saint Augustin. Comme si ces quelques noms ne suffisaient pas à faire rayonner la clarté du flambeau berbère, d'autres encore nous sont offerts, deux papes, des évêques, des écrivains, des martyrs et des saints de tous âges et de toutes conditions.
Le Berbère, Lumière de l'occident,
Vincent Serralda et André Huard, éd. Nouvelles éditions latines, 1987, p. 9
Saint Victor 1er. Un pape berbère ! Il nait en Afrique et occupe, pendant dix années (189-199), sous les empereurs Commode et Septime Sévère, le siège de saint Pierre à Rome. Pour assurer sur sa base la foi catholique, il établit la liste des livres sacrés - car là encore, à cette époque, une certaine fantaisie règne ! Il reconnait quatre Évangiles, ce que saint Irénée établira avec tant de force.
Le Berbère, Lumière de l'occident,
Vincent Serralda et André Huard, éd. Nouvelles éditions latines, 1987, p. 51
647...La Berbérie, comme elle l'avait été jadis au cours de la période punique, va se trouver rattachée à l'Orient. L'Islam éteint ce flambeau du monde occidental et du christianisme.
Le Berbère, Lumière de l'occident,
Vincent Serralda et André Huard, éd. Nouvelles éditions latines, 1987, p. 149
En évoquant ses écrivains, nous constatons que pendant un siècle et demi, de 180 à 340, ils sont quasiment les seuls représentants de la pensée occidentale. [...] Leur doctrine en fait le flambeau de la pensée occidentale. [...] Les Berbères ont éclairé l'Occident. Puissent-ils retrouver toute la vigueur de leur flamme et la répandre à nouveau sur le monde, afin qu'elle devienne l'inséparable apanage du titre de Magrébin.
Le Berbère, Lumière de l'occident,
Vincent Serralda et André Huard, éd. Nouvelles éditions latines, 1987, p. 151
Les Européens doivent apprendre qu’une partie notable de leurs racines chrétiennes latines se trouvent au sud de la Méditerranée. Et les habitants du Maghreb doivent aussi connaître le rôle qu’ont joué leurs ancêtres dans une tradition culturelle et religieuse qui leur apparaît aujourd’hui comme une réalité totalement étrangère à leur terre. Cette prise de conscience peut avoir aussi son importance pour les jeunes Églises d’Afrique qui regardent leurs sources spirituelles comme uniquement européennes, oubliant non seulement les origines orientales de la Bible et les développements de la patristique orientale, mais aussi le rôle de l’Afrique romaine. Le professeur Claude Lepelley réfléchissant sur notre sujet, n’hésite pas à exprimer sa position sous cette forme paradoxale: «Le christianisme occidental n’est pas né en Europe, mais au sud de la Méditerranée». Cette affirmation qui peut étonner est pourtant largement étayée par l’histoire.
C'était encore un Africain que la fortune élevait au trône impérial. M. Opellius Macrinus, né à Césarée en Mauritanie, de parents indigènes, obscurs et pauvres, avait passé, comme Sévère, des luttes du barreau au métier des armes. Suivant l'usage des Maures de basse condition, il avait une oreille percée; et ses détracteurs prétendaient qu'il avait débuté à Rome en qualité de chasseur attaché aux amphithéâtres, pour la fourniture des lions et des panthères de son pays. Si le fait était vrai, il honorait le jeune Macrin, qui, jetant là le fouet et l'épieu pour les livres de droit, avait acquis bientôt le renom d'un jurisconsulte savant et intègre. Il était avocat du fisc impérial, lorsque Caracalla le nomma préfet du prétoire en remplacement de Papinien, et il se conduisit dans cette place difficile avec une droiture qui lui mérita l'estime de tous.
Histoire de la Gaule sous l'administration romaine (1847),
Amédée Thierry, éd. Perrotin, 1847, t. 2, p. 400
[Lollius Urbicus] fut gouverneur de la Grande-Bretagne, et à ce titre, il dirigea l'avance en Ecosse qui conduit à l'établissement d'une nouvelle frontière le long de la ligne du Forth à la Clyde, le Mur d'Antonin, et termina sa carrière publique comme préfet de la ville de Rome. [...] Il faut remarquer que, à aucun autre moment de l'histoire le deuxième ou le troisième fils d'un propriétaire terrien Berbère d'une petite ville de l'intérieur n'aurait pu faire une telle carrière qui le mena en Asie, en Judée, sur le Danube, le Bas-Rhin et la Grande-Bretagne pour aboutir à une position de Préfet dans la capitale de l’empire romain auquel toutes ces provinces appartenaient.
- (en) [Lollius Urbicus] went on to be governor of Britain, in which capacity he conducted the advance into Scotland which led to the establishment of a new frontier along the line from the Forth to the Clyde, the so-called Antonie Wall, and ended his public carrer as prefect of the city of Rome. [...] It needs hardly to be pointed out that at no other period of history could the second or third son of a Berber landowner from y very small town in the interior enjoy a carrer which took him to Asia, Judaea, the Danube, the lowe Rhine and Britain, culminating in a position of great power and honour in the capital of the Empire to which all these regions belonged.
The Roman Empire,
Colin Wells (trad. Wikiquote), éd. Harvard University Press, 1995, p. 225-226
L'Afrique française sort de la barbarie, l'Espagne y retourne ; nous rendons aux Maures d'Afrique ce qu'ils nous avaient donné : la civilisation.
[C]'est avec les montagnards frustes d'Afrique du Nord, les Berbères, que l'Islam a conquis l'Espagne, puis construit l'Égypte Fatimide.
Les Arabes arrivés au XIe siècle [en Afrique du Nord] ont été d'un poids insignifiant sur le plan démographique, mais déterminant sur le plan culturel et socio-économique.
Les Berbères : mémoire et identité,
Gabriel Camps, éd. Errance, 1987, p. 102
Ces hommes [les Maures d'Algérie], que nous méprisons trop, sont les fils de ceux qui couvrirent l'Espagne de monuments qu'elle n'est plus en état d'entretenir, qui allumèrent le flambeau des sciences sur l'Europe barbare, qui nous révélèrent, avant Constantinople et Rome, les écrits des Grecs et des Latins, et nous donnèrent les premières notions de chimie, de médecine et d'astronomie.
Le noble Maure d'Espagne n'est rien moins qu'un pur Arabe du désert, il appartient pour moitié à la race berbère [...] et il s'imprègne si abondamment de sang gothique qu'aujourd'hui encore une partie de l'aristocratie du Maroc peut faire remonter sa généalogie à des aïeux germaniques.
En 720, ils occupèrent la Septimanie, comme dépendance du royaume gothique. Ils avaient donc franchi les Pyrénées, encore une grande barrière. La Gaule s'ouvrait devant eux. Allaient-ils la conquérir, comme l'Asie, l'Afrique, l'Espagne, et détruire du même coup les États germaniques et la religion chrétienne? Déjà ils lançaient leur cavalerie jusqu'à Sens; déjà le Berbère Munuza s'établissait en Septimanie et épousait la fille du duc d'Aquitaine. Ce fut un moment solennel dans l'histoire du monde. La question se décida dans ces plaines fameuses entre Tours et Poitiers, où Charles Martel opposa sa puissante infanterie austrasienne, comme une muraille de fer, aux cavaliers impétueux de l'Arabie, de la Syrie et du Magreb (732).
Histoire du moyen âge,
Victor Duruy, éd. Hachette, 1861, p. 93
L'Espagne, ou une armée de Berbères commandée par l'un d'eux, Tariq, mit fin en une bataille (711) à l'empire wisigoth, fournit un exutoire aux nouveaux convertis. Ce furent eux qui conquirent la péninsule et pénétrèrent en Gaule jusqu'à Poitiers (732). Leur retraite, après la victoire de Charles Martel, fut moins due à l'ardeur des Francs qu'aux révoltes provoquées, dans l'Afrique du Nord extrême, par le partage, au bénéfice des seuls Arabes, des terres espagnoles et par les exactions ou les violences des gouverneurs de Tanger.
La conquête islamo-arabe n'a pas déplacé vers le Maghreb des foules démesurées, pas plus que, par exemple en Europe, les invasions germaniques en France et en Espagne. Aujourd'hui, on peut raisonablement affirmer que, peu ou prou, les Algériens sont très majoritairement des Berbères arabisés, nonobstant tels radotages d'intellectuels idéologues qui ont voulu faire d'eux des Yéménites originels. Aucun historien de l'Algérie ne peut cependant nier ou sous-estimer la place éminente, en Algérie, de son ancrage islamo-arabe plus que millénaire, y compris dans les zones restées berbérophones ou l'arabe est devenue langue du sacré et langue de hautre culture.
La merveilleuse civilisation maure d’Espagne, au fond plus proche de nous, parlant plus à nos sens et à notre goût que Rome et la Grèce...une civilisation en comparaison de laquelle meme notre XIX siècle semblerait pauvre et retardataire!
L’Antéchrist (1888), Friedrich Nietzsche, éd. Gallimard, 2006
(ISBN 2070325571), aphorisme 60, p. 85
Dans l'antiquité, les Carthaginois ont établi sur diverses côtes, surtout dans l'ile de Corse, des colonies de Libyens, de Gétules et de Numides, qui avaient plus d'un rapport ethnique avec quelques-unes de celles auxquelles on donna plus tard le nom de Sarrasins. Les Sarrasins en effet, ou Maures d'Espagne, étaient un peuple composé non seulement d'Arabes musulmans, mais aussi de Berbères idolâtres auxquels s'étaient joints quelques Juifs. Dans la vallée des Bauges (entre le lac d'annecy et Chambéry), vallée alpestre longtemps occupée par les Sarrasins, on retrouve encore de leurs descendants devenus chrétiens. Aubusson, dans le département de la Creuse, a été peuplé en partie de Sarrasins.
Traité d'hygiène (1877),
Adrien Proust, éd. Masson, 1881, Ethnogénie de la France, p. 28
Au midi de la France, ce sont d'autres "rois de la mer", et de race tout à fait étrangère, qui eurent la plus forte part au mélange du sang. Les Sarrasins gardèrent longtemps sur les côtes de la Provence, à la Garde-Freinet, un solide point d'appui et de là purent faire des incursions dans une partie de la France. Au huitième siècle, lors de l'invasion des Berbères dit Arabes, ceux-ci avaient pénétré jusque dans la vallée de la Loire : on parle même de leur venue dans la région orientale de la France, à Luxeuil, dans les Vosges et devant Metz. [...] En maints endroits de la France on signale des colonies de Sarrasins; il est vrai que ce nom, étant celui des ennemis les plus exécrés, du être fréquemment donné à d'autres peuples que les Maures; mais les observations des anthropologistes ne permettent pas de douter que nombre de familles françaises dans les bassins de la Garonne et du Rhône ne soient issus des envahisseurs musulmans, Berbères modifiés par leur croisement avec les Espagnols, les Arabes et les noirs d'Afrique.
Nouvelle géographie universelle: la terre et les hommes,
Élisée Reclus, éd. Hachette, 1881, t. 2, chap. 1-Vue d'ensemble - Le milieu et la race, Ançêtres de Français, p. 45-46
Les Normands étant les corsaires du Nord, les Arabes furent les corsaires du Sud. Sans rien dire de leur immense incursion dans l'Ouest, de l'Espagne aux vallées d'entre Poitiers et Tours ou leur destin fut scellé, ils piratèrent longuement sur le littoral de la Méditerranée "rhodanienne", dans le pays de Narbonne, de Maguelonne, et vers l'orient de Marseille, en ce qui fut ensuite Langudoc, Roussillon, Provence. En certains lieux ils ne firent que passer; ailleurs ils demeurèrent, notamment dans les montagnes littorales des Maures ou ils eurent un camps retranché difficile à forcer en ce temps d'armes sans portée lointaine; et ils méditèrent la conquête de tout le pays, aussi loin que la terre porte le galop du cheval : le monde n'était-il pas promis, et tout entier, aux louangeurs du Prophète, aux hommes de la "Guerre Sainte" ? Et le vrai croyant, mort en conquérant le sol infidèle, n'était-il pas attendu par les vierges dans le lieu des délices, Walhalla sans bière et sans hydromel, - les hommes du Sud étant sobres de nature autant qu'ivrognes ceux du Nord ? Ces Arabes, ces Maures, ces Sarrasins, disons mieux, ces Berbères islamisés étaient peut-être peu ou prou les cousins des hommes de notre midi de par une communauté d'ançêtres préhistoriques; ils entrèrent dans l'alliance de beaucoup de familles méridionales
Le plus beau royaume sous le ciel (1899),
Onésime Reclus, éd. Hachette, 1899, p. 765
Ces mêmes Maures cultivèrent les sciences avec succès, et enseignèrent l’Espagne et l’Italie pendant plus de cinq siècles. Les choses sont bien changées. Le pays de saint Augustin n’est plus qu’un repaire de pirates.
Dictionnaire philosophique,
Voltaire, éd. Lequien fils, 1829, t. 2, Augustin, p. 212
(1609) L'expulsion des Maures fit bien plus de tort à la monarchie [espagnole]. Philippe III ne pouvait venir à bout d'un petit nombre de Hollandais, et il put malheureusement chasser six à sept cent mille Maures de ses États. Ces restes des anciens vainqueurs de l'Espagne étaient la plupart désarmés, occupés du commerce et de la culture des terres, bien moins formidables en Espagne que les protestants ne l'étaient en France, et beaucoup plus utiles, parce qu'ils étaient laborieux dans le pays de la paresse. [...] La plus grande partie des Maures espagnols se réfugièrent en Afrique, leur ancienne patrie; quelques-uns passèrent en France, sous la régence de Marie de Médicis : ceux qui ne voulurent pas renoncer à leur religion s'embarquèrent en France pour Tunis. Quelques familles, qui firent profession du christianisme, s'établirent en Provence, en Languedoc; il en vint à Paris même, et leur race n'y a pas été inconnue : mais enfin ces fugitifs se sont incorporés à la nation [française], qui a profité de la faute de l'Espagne, et qui ensuite l'a imitée dans l'émigration des réformés. C'est ainsi que tous les peuples se mêlent, et que toutes les nations sont absorbées les unes dans les autres, tantôt par les persécutions, tantôt par les conquêtes.
« Essais sur les mœurs » (1756), dans
Œuvres complètes de Voltaire,
Voltaire, éd. Hachette, 1859, t. 8, p. 264
C'est la France qui a contribué au progrès de l'Islam [en Algérie], en rendant par exemple l'usage de l'arabe obligatoire dans les justices de paix. L'islamisation de la Kabylie en particulier est d'époque récente.
Le problème démographique nord-africain (1947),
Louis Chevalier, éd. Presses universitaires de France, 1947, p. 196
Ce rôle de vecteur de l’arabisation qu’a joué la colonisation ne se réduit pas aux retombées objectives d’une intrusion déstabilisatrice : il y a bien en cette matière une intervention volontaire de l’autorité française. L’École, l’institution juridique et administrative coloniales contribuent à la diffusion de l’arabe en zones berbères. Un autre secteur où cette action est particulièrement flagrante est celui de la nomenclature onomastique officielle française, que ce soit la toponymie, l’ethnonymie ou l’anthroponymie. Au lieu d’enregistrer simplement les noms de lieu, de tribus ou de familles dans leur forme locale berbère, l’administration française s’est ingéniée à arabiser les noms propres dans les régions berbérophones [...] Et le comble sera atteint avec l’établissement, proprement surréaliste , de l’état-civil, notamment en Kabylie. Non seulement on arabise les noms de famille traditionnels, mais très souvent on en donne d’autres, parfaitement arbitraires, le plus souvent arabes ou de forme arabe. [...] L’arabe a tout naturellement servi de modèle de référence permanent dans cette activité de nomination menée par la France. Le nom et le pouvoir de nommer étant un aspect fondamental de l’identité, l’institution coloniale, à travers cette imposition, niait l’autonomie des groupes berbères et les insérait automatiquement dans le creuset arabe.
Berbères d'aujourd'hui,
Salem Chaker, éd. L'Harmattan, 1998, p. 115-116
L'armée française, battue le 4 à Wissembourg, est refoulée de Woerth par l'armée du Prince Royal de Prusse. Pour couvrir sa retraite Mac-Mahon sacrifie ses dernières troupes de réserve. Alors apparurent les tirailleurs algériens. Ils avaient combattu l'avant veille toute la journée à Wissembourg. Ils étaient 1700. Déployés en ligne, comme à la parade, sans tirer un coup de feu, criant d'une seule voix: « À la baïonnette! », ils s'élancèrent. Rien ne tint devant eux. En quelques minutes, ils reprennent les pièces perdues, le village d'Elsasshausen et, toujours courant, poursuivaient les Allemands jusqu'à la lisière d'un bois. Là, contre un ennemi bien à couvert, leurs charges, trois fois renouvelées, furent vaines. Quand les tirailleurs, décimés par la mitraille, se retirèrent, ils laissèrent sur le terrain 800 hommes, la moitié de leur effectif. La charge des tirailleurs, la résistance acharnée de quelques débris de régiment [...], permirent la retraite sur Reichshoffen.
- Albert Malet décrit l'épisode de la retraite sur Reichshoffen (Wissembourg) pendant la guerre franco-allemande de 1870
Histoire de France 1789 à 1875,
Albert Malet, éd. Hachette, 1921, p. 486
[P]uisse la France sentir à temps que notre interminable guerre d'Afrique [Algérie] tient surtout à ce que nous méconnaissons le génie de ces peuples; nous restons toujours à distance, sans rien faire pour dissiper l'ignorance mutuelle, les malentendus qu'elle cause. Ils ont avoué l'autre jour qu'ils ne combattaient contre nous, que parce qu'ils nous croyaient ennemis de leur religion, qui est l'Unité de Dieu; ils ignoraient que la France, et presque toute l'Europe, eussent secoué les croyances idolâtriques qui pendant le moyen âge ont obscurci l'Unité. Bonaparte le leur dit au Caire; qui le redira maintenant ? Le brouillard se lèvera un jour ou l'autre entre les deux rives, et l'on se reconnaîtra. L'Afrique, dont les races se rapprochent tellement de nos races du Midi, l'Afrique que je reconnais parfois dans mes amis les plus distingués des Pyrénées, de la Provence, rendra à la France un grand service ; elle expliquera en elle bien des choses qu'on méprise et qu'on n'entend pas.
Le Peuple, Jules Michelet, éd. Paulin, 1846, p. 217-218
Ces Kabyles sont les soldats les plus braves de toute l'Afrique.
Moins la religion musulmane introduite parles Arabes, la civilisation berbère procède de la civilisation romaine et chrétienne, comme celle de toute l'Europe occidentale. Aveugles sont ceux qui ne le voient pas.
L'Algérie devant l'Empereur (1865),
Auguste Warnier, éd. Challamel aîné, 1865, p. 16
Quoiqu'il se prétende Arabe, en sa qualité de cherif, considérée, dans ce cas, comme synonyme de descendant du prophète Mohammed,
Abd el-Kader n'est lui-même qu'un Berbère arabisé, comme la plupart des hommes éminents dont l'Afrique septentrionale s'honore.
L'Algérie devant l'Empereur,
Auguste Warnier, éd. Firmin Didot, 1865, p. 47
La majorité des «Arabes» connus en France sont en réalité des Berbères: à l'Académie française - Assia Djebar -, dans le spectacle - Fellag, Dany Boon, Farid Chopel, etc. -, dans les médias - Rachid Arhab, Nacer Kettane (président de Beur FM) -, dans la musique - Idir, les leaders de Zebda et des rappeurs de 113, Souad Massi, Gnawa Diffusion, etc.). Il semble que, très tôt, ils aient opté pour le mariage mixte puisque, pour ne citer que les plus célèbres, d'Edith Piaf à Alain Bashung, de Daniel Prévost à Jacques Villeret, de la chanteuse Juliette à Isabelle Adjani, tous sont rejetons du mariage d'un Berbère avec une Française. Enfin, il existe des Berbères chrétiens (une infime minorité), juifs (beaucoup parmi les Marocains d'origine) et, bien sûr, une majorité écrasante de musulmans. Et si certains d'entre eux peuvent avoir basculé dans le fondamentalisme, c'est parmi les Berbères de France qu'on rencontre le plus d'individus qui, bien que nés dans une famille musulmane, revendiquent leur athéisme.
Tous les jours de la semaine dernière, l'émission "Les Chemins de la connaissance", sur France Culture, était consacrée aux Berbères et à leur univers, ce qui chaque fois me faisait penser à Farid [Tali], qui à l'occasion se prétendait berbère, ou disait se vouloir berbère, comme les plus anciens Marocains. Chaque fois que j'entends parler du Maroc, du monde arabe, des Berbères, de la religion musulmane, je suis pris d'une nostalgie de lui, car le fréquenter m'avait donné avec ces choses un lien sensible, si ténu soit-il, qui me faisait les voir de façon tout à fait différente, je n'oserais dire de l'intérieur, non, mais amoureusement, c'est plutôt cela - avec tout ce que le terme implique de profonde mécompréhension, bien entendu.
Retour à Canossa: Journal 1999, Renaud Camus, éd. Fayard, 2002, p. 137
L'immigration berbère en France est l'une des plus anciennes puisqu'elle remonte à la fin du XIXe siècle. Elle répondait à la fois aux besoins de mobilisation des soldats en période de guerre (Première et Seconde Guerres mondiales) et au déficit de main-d'œuvre, notamment dans les secteurs de l'industrie et du BTP. On estime actuellement l'immigration berbère à environ deux millions d'individus, contribuant en toute discrétion à l'épanouissement économique, scientifique, artistique et sportif de la France. Il est utile de rappeler par exemple que Edith Piaf, Mouloudji, Daniel Prévost, Isabelle Adjani, Zidane, et bien d'autres personnalités de tous horizons, sont le fruit de cet apport berbère.
- Belkacem Lounes est président du Congrès mondial Amazigh
Belkacem Lounes, 27 juin 2003, Paris, dans « Berbères, libres et fiers de l'être », Le Figaro, p.27-28, paru 27 juin 2003, Belkacem Lounes.
C'est grâce à l'Armée d'Afrique que la France a retrouvé non seulement le chemin de la victoire et la foi en son armée, mais aussi et surtout l'Honneur et la Liberté.
- Sur le rôle de l'Armée d'Afrique (Berbères, Arabes et "Pieds-Noirs") durant la campagne 1942-45
L'Armée d'Afrique 1830-1962, Robert Huré, éd. Charles-Lavauzelle, 1977, Préface par le
Général Monsabert, p. 1
Comment ne me sentirais-je pas solidaire de ceux que l'ordonnance du 7 mars 1944 a appelé "les Français Musulmans" ? Les ayant conquis autrefois, nous les avons pris en charge ; aussi bien n'avons-nous jamais hésité à les intégrer à notre nation, aussi longtemps qu'il s'agissait de travailler pour elle dans nos usines et nos chantiers, de combattre ou de mourir : hier encore, traversant la Beauce, je me suis arrêté devant un cimetière militaire à dénombrer les tombes marquées du croissant de l'Islam - soldats tombés pour la France, sacrifiés pour retarder la retraite de l'été 40...
- « France ma patrie », texte paru dans Le Monde du 5 avril 1956 dénonçant les méthodes utilisées en Algérie
Crise de notre temps et réflexion chrétienne de 1930 à 1975 (recueil),
Henri Irénée Marrou, éd. Beauchesne, 1978, « France ma patrie », p. 176
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