Tractatus logico-philosophicus

livre de Ludwig Wittgenstein

Le Tractatus logico-philosophicus est une œuvre du philosophe Ludwig Wittgenstein. Publiée en 1921 sous le titre Logisch-Philosophische Abhandlung, elle paraît l'année suivante en anglais sous le titre latin actuel. Opus magnum de l'auteur avec les Recherches philosophiques, le Tractatus eu une influence considérable sur les premiers philosophes analytiques.

La tractacus logico-philosophicus de M. Wittgenstein, qu’il se révèle ou non comme donnant la vérité définitive sur les sujets dont il traite, mérite certainement, par son ampleur et sa portée et sa profondeur, d’être considéré comme événement important dans le monde philosophique.

Bertrand Russell, introduction du Tractatus logico-philosophicus de Ludwig Wittgenstein, Édition Tel Gallimard, réimpression 2009, p.13 [lire en ligne]

Les mots du traducteur modifier

Incessu, comme dit le poète, incessu patuit dea. « À sa démarche on reconnut la déesse ».


Avant-propos modifier

Devise : … et tout ce que l'on sait, qu'on n'a pas seulement entendu comme un bruissement ou un grondement, se laisse dire en trois mots.  —Kürnberger
  • Dédié à la mémoire de mon ami David H. Pinsent


Ce livre ne sera peut-être compris que par qui aura déjà pensé lui-même les pensées qui s'y trouvent exprimées (...) Son but serait atteint s'il se trouvait quelqu'un qui, l'ayant lu et compris, en retirait du plaisir.


On pourra résumer en quelque sorte tout le sens du livre en ces termes : tout ce qui proprement peut être dit peut être dit clairement, et sur ce dont on ne peut parler, il faut garder le silence.


Propositions 1 modifier

1 - Le monde est tout ce qui a lieu.
  • Première phrase du livre passé l'avant propos.


Propositions 2 modifier

2 - Ce qui a lieu, le fait, est la subsistance d'états de chose.


2.061 - Les états de choses sont mutuellement indépendants.


2.12 - L'image est un modèle de la réalité.


Propositions 3 modifier

3 - L'image logique des faits est la pensée.


3.01 - La totalité des pensées vraies est une image du monde.
  • Tractatus logico-philosophicus, Ludwig Wittgenstein (trad. Gilles-Gaston Granger), éd. Gallimard, 2001  (ISBN 9782070758647), p. 41


3.03 - Nous ne pouvons rien penser d’illogique, parce que nous devrions alors penser illogiquement.
  • Tractatus logico-philosophicus, Ludwig Wittgenstein (trad. Gilles-Gaston Granger), éd. Gallimard, 2001  (ISBN 9782070758647), p. 41


3.325 - Pour éviter ces erreurs, il nous faut employer une langue symbolique qui les exclut, qui n'use pas du même signe pour des symboles différents (...) Une langue symbolique qui obéisse à la grammaire logique - à la syntaxe logique. (l'idéographie de Frege et de Russell constitue une telle langue).


3.328 - Si un signe n’a pas d’usage, il n’a pas de signification. Tel est le sens de la devise d’Occam.
(Si tout se passe comme si un signe avait une signification, c’est qu'alors il en a une.)
  • Tractatus logico-philosophicus, Ludwig Wittgenstein (trad. Gilles-Gaston Granger), éd. Gallimard, 2001  (ISBN 9782070758647), p. 47


3.343 - Les définitions sont des règles de traduction d'une langue dans une autre.


Propositions 4 modifier

4 - La pensée est la proposition pourvue de sens.


La langue déguise la pensée. Et de telle manière que l'on ne peut, d'après la forme extérieure du vêtement, découvrir la forme de la pensée qu'il habille; car la forme extérieure du vêtement est modelée à de tout autres fins qu'à celle de faire connaître la forme du corps.


4.003 - La plupart des propositions et des questions qui ont été écrites touchant les matières philosophiques ne sont pas fausses, mais sont dépourvues de sens.


La plupart des propositions et des questions des philosophes découlent de notre incompréhension de la logique de la langue.


4.0031 - Toute philosophie est « critique du langage ».


4.024 - Comprendre une proposition, c'est savoir ce qui a lieu quand elle est vraie.


4.11 - La totalité des propositions vraies est toute la science de la nature (ou la totalité des sciences de la nature).


4.111 - Le mot "philosophie" doit signifier quelque chose qui est au-dessus ou au-dessous des sciences de la nature, mais pas à leur côté.


4.112 - Le but de la philosophie est la clarification logique des pensées.
 La philosophie n'est pas une théorie mais une activité.
 Une œuvre philosophique se compose essentiellement d'éclaircissements.
 Le résultat de la philosophie n'est pas de produire des « propositions philosophiques », mais de rendre claires les propositions.


4.1212 - Ce qui peut être montré ne peut être dit.


4.128 - Les formes logiques n'ont pas de nombre.

C'est pourquoi il n'y a pas en logique de nombres distingués, et c'est pourquoi il n'y a pas de monisme ou de dualisme philosophique.

  • Mis à part le zéro


4.461 - La tautologie et la contradiction sont vides de sens.
 (Comme le point, duquel partent deux flèches en directions opposées.)
 (Je ne sais rien du temps qu'il fait par exemple, lorsque je sais : ou il pleut ou il ne pleut pas.)


Propositions 5 modifier

5.133 - Toute conséquence est conséquence a priori.


La croyance en un lien causal est un préjugé.


Mais toutes les propositions de la logique disent la même chose. À savoir : rien.


5.4541 - Simplex sigillum veri.
  • (fr) Le simple est le sceau du vrai.


5.473 - La logique doit prendre soin d'elle même.
5.4733 - Frege dit : toute proposition construite selon les règles doit avoir un sens ; et je dis : toute proposition possible est construite selon les règles, et si elle n'a pas de sens, ce ne peut être que parce que l'on n'a pas donné de signification à certains de ses éléments.
(Même si nous croyons l'avoir fait.)


En un certain sens, nous ne pouvons nous tromper en logique.


5.5303 - Sommairement parlant, dire que deux choses sont identiques est dépourvu de sens, et dire d'une chose est identique à elle-même ce n'est rien dire du tout.


5.535 - L'axiome de l'infini pourrait s'exprimer dans la langue par ceci, qu'il y a une infinité de noms avec des significations différentes.


5.6 - Les frontières de mon langage sont les frontières de mon monde.


5.621 - Le monde et la vie ne font qu'un.


5.632 - Le sujet n'appartient pas au monde, mais il est une frontière du monde.


5.641 - Le je fait son entrée dans la philosophie grâce à ceci : que « le monde est mon monde ».


Propositions 6 modifier

6.021 - Le nombre est l'exposant d'une opération.


6.021 - Le concept de nombre est rien d'autre que ce qui est commun à tous les nombres, la forme générale du nombre.

Le concept de nombre est le nombre variable

Et le concept d'égalité entre nombres est la forme générale de toutes les égalités numériques particulières.


6.1 - Les propositions de la logique sont des tautologies.


6.233 - A la question de savoir si l'on a besoin de l'intuition pour résoudre un problème de mathématiques, il faut répondre que c'est justement ici le langage lui-même qui fournit l'intuition nécessaire.


6.3 - L'exploration de la logique signifie l'exploration de toute capacité d'être soumis à des lois. Et hors de la logique, tout est hasard.


6.37 - Il n'est de nécessité que logique.


6.341 - De même que l'on peut écrire n'importe quel nombre avec le système des nombres, de même avec le système de la mécanique on peut former n'importe quelle proposition de la physique.


6.41 - Le sens du monde doit être en dehors de lui. Dans le monde, tout est comme il est, et tout arrive comme il arrive ; il n'y a en lui aucune valeur - et s'il y en avait une elle serait sans valeur.


6.421 - Il est clair que l'éthique ne se laisse pas énoncer. L'éthique est transcendantale. (Éthique et esthétique sont une seule et même chose.)


6.422 - Il doit y avoir, en vérité, une espèce de châtiment et une espèce de récompense éthiques, mais ils doivent se trouver dans l'acte lui-même.


6.43 - Si le bon ou le mauvais vouloir changent le monde, ils ne peuvent changer que les frontières du monde, non les faits ; non ce qui peut être exprimé par le langage. En bref, le monde doit alors devenir par là totalement autre. Il doit pouvoir, pour ainsi dire, diminuer ou croître dans son ensemble. Le monde de l'homme heureux est un autre monde qui celui de l'homme malheureux.


6.431 - Ainsi dans la mort, le monde n'est pas changé, il cesse.


6.4311 - La mort n'est pas un événement de la vie. On ne vit pas la mort. Si on entend par éternité non la durée infinie mais l'intemporalité, alors il a la vie éternelle celui qui vit dans le présent.


6.4312 - L'immortalité de l'âme humaine, c'est-à-dire la survie éternelle après la mort, non seulement n'est en aucune manière assurée, mais encore et surtout n'apporte nullement ce qu'on a toujours voulu obtenir en en recevant la croyance. Car quelle énigme se trouvera résolue du fait de mon éternelle survie ? Cette vie éternelle n'est-elle pas aussi énigmatique que la vie présente ? La solution de l'énigme de la vie dans le temps et l'espace se trouve en dehors de l'espace et du temps.


6.432 - Comment est le monde, ceci est pour le Supérieur parfaitement indifférent. Dieu ne se révèle pas dans le monde.


6.52 – Nous sentons que, à supposer même que toutes les questions scientifiques possibles soient résolues, les problèmes de notre vie demeurent encore intacts. À vrai dire, il ne reste plus alors aucune question; et cela même est la réponse.


6.522 - Il y assurément de l'indicible. Il se montre, c'est le Mystique.


6.53 - La méthode correcte en philosophie consisterait proprement en ceci : ne rien dire que ce qui se laisse dire, à savoir les propositions de la science de la nature.


6.54 - Mes propositions sont des éclaircissements en ceci que celui qui me comprend les reconnaît à la fin comme dépourvues de sens, lorsque par leur moyen - en passant par elles - il les a surmontées. (Il doit pour ainsi dire jeter l'échelle après y être monté.)


Proposition 7 modifier

7 - Sur ce dont on ne peut parler, il faut garder le silence.
  • Dernière phrase de l'ouvrage.


Voir aussi modifier

Il existe une fiche de références pour cette œuvre :
Tractatus logico-philosophicus.

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