Lee Miller

photographe américaine
Cette page est une ébauche. N'hésitez pas à la modifier en ajoutant des citations admissibles !

Citations

modifier

 

Il surgit comme par enchantement au sommet d'un escalier en colimaçon qui aboutissait à l'étage. Il ressemblait à un taureau, avec un torse extraordinaire, des sourcils très noirs et des cheveux bruns. Je lui dis sans détour que j'étais sa nouvelle élève. Il me répondit qu'il ne prenait pas d'élèves et que, de toute façon, il quittait Paris pour aller en vacances. - Je sais, lui dis-je, je viens avec vous. Et c'est ce que je fis. Nous vécûmes ensemble pendant trois années. On m'appelait madame Man Ray, car c'est ainsi qu'on fait les choses en France
  • Les vies de Lee Miller, Antony Penrose (trad. Christophe Claro), éd. Arléa/Seuil, 1994  (ISBN 2-86959-203-5), chap. II. Photographe dans le Paris surréaliste, 1929-1932, p. 31-32 (lire en ligne)


Je pense que les femmes ont plus de chance de réussir dans la photographie que les hommes. Les femmes sont plus vives et s’adaptent mieux que les hommes. Et je trouve qu’elles ont une intuition qui les aide à comprendre les personnalités plus rapidement que les hommes. Et un bon photographe doit savoir saisir une personne non pas à l’improviste mais quand celle-ci est le plus elle-même.
  • Les vies de Lee Miller, Antony Penrose (trad. Christophe Claro), éd. Arléa/Seuil, 1994  (ISBN 2-86959-203-5), chap. III. Photographe dans le New York de la mode, 1932-1934, p. 58 (lire en ligne)


Dans l'avion arrivant en vue de la France, je refoulai péniblement mes larmes et me souvins d'un film dans lequel une actrice embrassait une poignée de terre. J'abandonnai ces pensées affectées pour scruter le panorama de ciel gris tendre qui s'étendait sur près de deux mille six cents kilomètres carrés au-dessus du territoire français, de la France libérée. La mer et le ciel se rejoignaient en un mauvais lavis; en bas, deux convois maritimes mouchetaient la surface lisse et fragile de la Manche. Cherbourg formait une courbe embrumée loin sur la droite, et devant nous, trois avions revenaient de lâcher leurs bombes, laissant derrière eux des colonnes de fumée. C'était le front.
  • « Des guerriers sans armes »[1].
  • « 1. Des guerriers sans armes », Lee Miller, dans Lee Miller : photographe et correspondante de guerre, 1944-1945, Antony Penrose (dir.), éd. Du May, 1994  (ISBN 2-84102-002-9), p. 15


J'errais de tente en tente. Personne ne trouvait à redire à ce que je prenne des photos, pose des questions, ou grimpe sur un ballot de linge. Je ne déclenchais pas mon flash sans avertir les chirurgiens, mais je n'avais pas de souci à me faire car ils ne cillaient jamais, même à proximité des tirs. Grâce à cette organisation efficace et sereine, je n'ai jamais eu le sentiment d'être une gêne, ni une présence frivole. Sans lever les yeux de l'incision qu'il pratiquait, un chirurgien me demanda même de noter le temps de pose nécessaire pour prendre la photo détaillée d'une opération, en tenant compte du contraste des compresses blanches et de la lumière concentrée qui découpait des ombres denses. Je croisai les doigts en espérant ne pas m'être trompée, ni pour ma photo, ni pour la sienne.
  • « Des guerriers sans armes »
  • « 1. Des guerriers sans armes », Lee Miller, dans Lee Miller : photographe et correspondante de guerre, 1944-1945, Antony Penrose (dir.), éd. Du May, 1994  (ISBN 2-84102-002-9), p. 20, 23


Un jour, dans la chambre noire, quelque chose a frôlé mon pied; j'ai poussé un cri et j'ai allumé la lumière. Je n'ai jamais su ce que c'était, si c'était une souris ou quoi, mais la pellicule s'est trouvée soudain en pleine lumière. Dans le bac de développement, il y avait en effet une douzaine de négatifs, quasiment développés, des nus sur fond noir. Man Ray les a immédiatement pris pour les plonger dans le fixateur, puis, il les a examinés. Il ne s'est même pas donné la peine de m'engueuler tellement j'étais effondrée. Les parties non exposées du négatif, c'est-à-dire l'arrière-plan noir, avaient été brusquement exposées à une violente lumière et elles s'étaient développées jusqu'aux contours du corps, nu et blanc. Mais le fond et l'image ne fusionnaient pas complètement, si bien qu'il y avait un cerne noir. Man parlera plus tard de « solarisation ».
  • Entretien avec Mario Amaya, « My Man Ray », Art in America, 1975.


Citations sur

modifier

Carolyn Burke

modifier

Edmonde Charles-Roux

modifier
La poche de Colmar venait à peine d'être prise et l'on craignait qu'elle ne retombât aux mains de l'ennemi lorsque fut annoncée la visite d'une photographe de la U.S. Army dont l'état-major français n'avait pas retenu le nom. […] Cette Lee-quelque chose était reconnaissable entre toutes et je ne fus pas longue à mettre un nom sur le visage de la femme qui m'était confiée : Lee Miller. C'était donc elle. Elle me parut effectivement très belle. Elle avait un uniforme bien taillé et elle était reporter à Vogue, un magazine dont on ne s'attendait guère à ce qu'il publiât des articles consacrés aux opérations militaires, pas plus, du reste, que l'on ne s'attendait à voir déambuler en chair et en os, sur le front d'Alsace, la Vénus blonde des surréalistes dont l'apparition dans Le Sang d'un poète était encore dans toutes les mémoires.


Lee Miller a été un reporter photographe d'un immense talent. Mais plus étonnante encore fut la révélation de son talent d'écrivain. Ses articles, parus dans Vogue, sont dignes de figurer dans une anthologie des récits de guerre. La statue vivante des années trente, la belle des belles, était aussi un écrivain.


Mark Haworth-Booth

modifier
Rétrospectivement, elle nous apparaît en effet comme la femme que le XXe siècle avait besoin de créer : une femme indépendante, libre, créative, courageuse et talentueuse. En réalité, elle est sa propre invention, sa propre création. Par son parcours exceptionnel, elle échappe à tous les stéréotypes et, bien que de plus en plus étudiée et appréciée depuis quelques dizaines d'années, elle demeure un « puzzle surréaliste[2]. »
  • Lee Miller, Mark Haworth-Booth, éd. Hazan/Jeu de Paume, 2008  (ISBN 978-2-7541-0251-3), chap. Introduction, p. 7


Parmi les talents de Lee Miller, il faut citer ses qualités d'écriture, et elle-même se décrira comme « un puzzle imbibé d'eau, des morceaux ivres qui ne s'accordent ni par la forme ni par les motifs ». Par la vie qu'elle a menée, par sa carrière exceptionnelle, par la manière dont elle a réuni en une personnalité unique des traits de caractère masculins et féminins, Lee Miller reste, sans nul doute, une énigme.
  • Lee Miller, Mark Haworth-Booth, éd. Hazan/Jeu de Paume, 2008  (ISBN 978-2-7541-0251-3), chap. Introduction, p. 8


S'il fallait trouver une métaphore parfaite pour parler d'elle, c'est du côté de l'électricité qu'il faudrait la chercher. Comme la « fée » électricité, elle attirait fortement et dangereusement. Son visage rayonnant, que les photographes ont adoré, a éclairé de nombreuses pages de magazine, il illumine de multiples photographies d'art. Le XXe siècle est bien le premier siècle de l'électricité, et l'art de Lee Miller y a brillé dans toute sa clarté.
  • Lee Miller, Mark Haworth-Booth, éd. Hazan/Jeu de Paume, 2008  (ISBN 978-2-7541-0251-3), chap. Introduction, p. 11


Antony Penrose

modifier

David E. Scherman

modifier
Trente ans avant le Mouvement de Libération de la Femme et malgré les instances officielles qui commençaient tout juste à s'accommoder des correspondants itinérants, sans parler des femmes, et encore moins des femmes photographes au front, Lee Miller fut accréditée auprès de la revue britannique Vogue, publication improbable entre toutes dans ce contexte. Non seulement elle couvrit une douzaine d'engagements importants, appareils photos en main, mais à l'étonnement de ses amis qui ne la pensaient pas capable d'écrire quelque chose de plus élaboré qu'une liste d'emplettes, elle accompagna ses photographies de milliers de mots dignes du journalisme le plus éloquent que la guerre ait engendré.
  • « Avant-propos », David E. Scherman, dans Lee Miller : photographe et correspondante de guerre, 1944-1945, Antony Penrose (dir.), éd. Du May, 1994  (ISBN 2-84102-002-9), p. 7


Kate Winslet

modifier
Alors qu'elle n'a qu'une vingtaine d'années, Lee décide en toute conscience de quel côté de l'objectif elle préfère être. « J'aime mieux prendre une photo qu'en être une », déclare-t-elle. La petite fille qui a grandi en étant regardée est devenue une femme qui apprend à regarder les autres par elle-même. Peut-être parce qu'elle se souvient de ce qu'elle éprouvait lorsqu'elle était l'objet silencieux du regard des hommes, elle interagit activement avec ses sujets féminins.
  • texte écrit en 2022 lors du tournage du film Lee Miller à Saint-Malo.


Le terme de muse est souvent utilisé pour décrire Lee Miller. Ce mot m'irrite au plus haut point, parce qu'il a été trop fréquemment employé pour définir qui elle était sur la base de son seul physique. Pour moi, Lee Miller est une force vive, une personnalité avec laquelle il faut compter plus qu'un objet de désir retenant l'attention des hommes célèbres avec lesquels on l'associe habituellement. Cette photographe-journaliste-reporter a réalisé son destin avec amour, passion et courage. Elle est l'exemple même de ce que l'être humain peut accomplir, et de ce qu'il peut supporter, s'il ose prendre fermement sa vie en main pour la vivre le plus intensément possible.
  • texte écrit en 2022 lors du tournage du film Lee Miller à Saint-Malo.
  • « Un force vice », Kate Winslet, dans Lee Miller: photographies, Antony Penrose, éd. Delpire & co, 2023  (ISBN 979-10-95821-59-5), p. 8


C'est le seul personnage que j'ai incarné qui m'a fait changer, en quelque sorte. [...] Elle a gardé sa fureur à l'intérieur d'elle et s'en est aussi servi pour aider les autres, ceux qui ne parvenaient pas à se faire entendre.
  • A l'occasion de la sortie le 9 octobre 2024 du film d'Ellen Kuras consacré à cette photographe
  • « Kate Winslet : c'est un honneur d'incarner Lee Miller », propos de Kate Winslet recueillis par Anne Michelet, Femina, 7 octobre 2024, p. 10


Elle a été très éprouvée psychologiquement par les horreurs de la guerre, et revenir à une vie normale lui a ensuite été impossible. Je peux le comprendre. Aujourd'hui, on sait ce qu'est le stress post-traumatique et on le soigne.
  • A l'occasion de la sortie le 9 octobre 2024 du film d'Ellen Kuras consacré à cette photographe
  • « Kate Winslet : c'est un honneur d'incarner Lee Miller », propos de Kate Winslet recueillis par Anne Michelet, Femina, 7 octobre 2024, p. 9


Notes et références

modifier
  1. Manuscrit original d’un article publié dans Vogue en septembre 1944.
  2. Mark Haworth-Booth fait ici référence à la citation placée en exergue de son introduction : « Lee Miller est un puzzle surréaliste, ce qui, convenons-en, est en soi une énigme » (Creative Art, New York, mai 1933). Voir Géraldine Chouard et François Brunet, « A propos de l’exposition « L’Art de Lee Miller » », Transatlantica, 2009 [texte intégral, lien DOI]  :

    « In my book, The Art of Lee Miller, I quoted as an epigraph a report in the New York magazine Creative Art which told its readers in 1933 that Lee Miller 'is making a surrealist jig-saw puzzle - which, you will admit, is a puzzle'. Lee Miller's life does not fit the usual templates. She was not only a supermodel who became a professional photographer but she was in turn several different kinds of photographer and then an outstanding reporter in another medium again - words. »

    .

Voir aussi

modifier

Vous pouvez également consulter les articles suivants sur les autres projets Wikimédia :