Michel Houellebecq

écrivain, poète, essayiste, acteur et réalisateur français

Michel Houellebecq, de son vrai nom Michel Thomas, est un écrivain français né le 26 février 1958 ou 1956 selon son acte de naissance à la Réunion. Ses romans Les Particules élémentaires et Plateforme lui ont valu une sulfureuse réputation internationale de provocateur, mais ils sont aussi souvent considérés comme un ton nouveau dans la littérature française.

Michel Houellebecq en 2008


Citations

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Tout comme le libéralisme économique sans frein, et pour des raisons analogues, le libéralisme sexuel produit des phénomènes de paupérisation absolue. Certains font l'amour tous les jours; d'autres cinq ou six fois dans leur vie, ou jamais. Certains font l'amour avec des dizaines de femmes ; d'autres avec aucune. C'est ce qu'on appelle la « loi du marché ».
  • Extension du domaine de la lutte (1994), Michel Houellebecq, éd. J'ai lu, coll. « Nouvelle génération », 2005  (ISBN 2-290-34952-6), p. 100


Le libéralisme économique, c’est l’extension du domaine de la lutte, son extension à tous les âges de la vie et à toutes les classes de la société. De même, le libéralisme sexuel, c’est l’extension du domaine de la lutte, son extension à tous les âges de la vie et à toutes les classes de la société.
  • Extension du domaine de la lutte (1994), Michel Houellebecq, éd. J'ai lu, coll. « Nouvelle génération », 2005  (ISBN 2-290-34952-6), p. 100


Bien entendu. C'est foutu depuis longtemps, depuis l'origine. Tu ne représenteras jamais, Raphaël, un rêve érotique de jeune fille. Il faut en prendre ton parti ; de telles choses ne sont pas pour toi. De toute façon, il est déjà trop tard. L'insuccès sexuel, Raphaël, que tu as connu depuis ton adolescence, la frustration qui te poursuit depuis l'âge de treize ans laisseront en toi une trace ineffaçable. À supposer même que tu puisses dorénavant avoir des femmes – ce que, très franchement, je ne crois pas – cela ne suffira pas ; plus rien ne suffira jamais. Tu resteras toujours orphelin de ces amours adolescentes que tu n'as pas connues. En toi, la blessure est déjà douloureuse ; elle le deviendra de plus en plus. Une amertume atroce, sans rémission, finira par emplir ton cœur. Il n'y aura pour toi ni rédemption, ni délivrance. C'est ainsi.
  • Extension du domaine de la lutte (1994), Michel Houellebecq, éd. J'ai lu, coll. « Nouvelle génération », 2005  (ISBN 2-290-34952-6), p. 121


Certains êtres éprouvent très tôt une effrayante impossibilité à vivre par eux-mêmes; au fond ils ne supportent pas de voir leur propre vie en face, et de la voir en entier, sans zones d'ombre, sans arrière-plans. Leur existence est j'en conviens une exception aux lois de la nature, non seulement parce que cette fracture d'inadaptation fondamentale se produit en dehors de toute finalité génétique mais aussi en raison de l'excessive lucidité qu'elle présuppose, lucidité évidemment transcendante aux schémas perceptifs de l'existence ordinaire. Il suffit parfois de placer un autre être en face d'eux, à condition de le supposer aussi pur, aussi transparent qu'eux-mêmes, pour que cette insoutenable fracture se résolve en une aspiration lumineuse, tendue et permanente vers l'absolument inaccessible. Ainsi, alors qu'un miroir ne renvoie jour après jour que la même désespérante image, deux miroirs parallèles élaborent et construisent un réseau net et dense qui entraîne l'œil humain dans une trajectoire infinie, sans limites, infinie dans sa pureté géométrale, au-delà des souffrances et du monde.
  • Extension du domaine de la lutte (1994), Michel Houellebecq, éd. J'ai lu, coll. « Nouvelle génération », 2005  (ISBN 2-290-34952-6), p. 146-147


Tisserand parut d'abord s'intéresser à une brunette d'une vingtaine d'années, vraisemblablement une secrétaire. J'étais assez tenté d'approuver son choix. D'une part la fille n'était pas d'une beauté exceptionnelle, et serait sans doute peu courtisée; ses seins, certes de bonne taille, étaient déjà un peu tombants, et ses fesses paraissaient molles; dans quelques années, on le sentait, tout cela s'affaisserait complètement. D'autre part son habillement, d'une grande audace, soulignait sans ambiguïté son intention de trouver un partenaire sexuel: en taffetas léger, sa robe virevoltait à chaque mouvement, découvrant un porte-jarretelles et un string minuscule en dentelle noire, qui laissait le fessier entièrement nu. Enfin son visage sérieux, même un peu obstiné, semblait indiquer un caractère prudent; voilà une fille qui devait certainement avoir des préservatifs dans son sac.

Pendant quelques minutes Tisserand dansa non loin d'elle, lançant vivement les bras en avant pour indiquer l'enthousiasme que lui communiquait la musique. À deux ou trois reprises il tapa même dans ses mains; mais la fille ne semblait nullement le remarquer. À la faveur d'un léger blanc musical, il prit donc l'initiative de lui adresser la parole. Elle se retourna, lui jeta un regard méprisant et traversa la piste de part en part pour s'éloigner de lui. C'était sans appel.

Tout se passait comme prévu. Je partis commander un deuxième bourbon au bar.

À mon retour, je sentis que quelque chose venait de basculer. Une fille était assise à la table voisine de la mienne, seule. Elle était beaucoup plus jeune que Véronique, elle pouvait avoir dix-sept ans; n'empêche qu'elle lui ressemblait horriblement. Sa robe très simple, plutôt ample, en tissu beige, ne soulignait pas vraiment les formes de son corps; celles-ci n'en avaient nullement besoin. Les hanches larges, les fesses fermes et lisses; la souplesse de la taille qui conduit les mains jusqu'à deux seins ronds, amples et doux; les mains qui se posent avec confiance sur la taille, épousant la noble rotondité des hanches. Je connaissais tout cela; il me suffisait de fermer les yeux pour m'en souvenir. Jusqu'au visage, plein et candide, exprimant la calme séduction de la femme naturelle, sûre de sa beauté. La calme sérénité de la jeune pouliche, encore enjouée, prompte à essayer ses membres dans un galop rapide. La calme tranquillité d'Ève, amoureuse de sa propre nudité, se connaissant comme évidemment, éternellement désirable. Je me suis rendu compte que deux années de séparation n'avaient rien effacé; j'ai vidé mon bourbon d'un trait. C'est ce moment que Tisserand a choisi pour revenir; il transpirait légèrement. Il m'a adressé la parole; je crois qu'il souhaitait savoir si j'avais l'intention de tenter quelque chose avec la fille. Je n'ai rien répondu; je commençais à avoir envie de vomir, et je bandais; ça n'allait plus du tout. J'ai dit: " Excuse-moi un instant… " et j'ai traversé la discothèque en direction des toilettes. Une fois enfermé j'ai mis deux doigts dans ma gorge, mais la quantité de vomissures s'est avérée faible et décevante. Puis je me suis masturbé, avec un meilleur succès: au début je pensais un peu à Véronique, bien sûr, mais je me suis concentré sur les vagins en général, et ça s'est calmé. L'éjaculation survint au bout de deux minutes; elle m'apporta confiance et certitude.

En revenant, je vis que Tisserand avait engagé la conversation avec la pseudo-Véronique; elle le regardait avec calme et sans dégoût. Cette jeune fille était une merveille, j'en avais la certitude intime; mais ce n'était pas grave, j'étais masturbé. Du point de vue amoureux Véronique appartenait, comme nous tous, à une génération sacrifiée. Elle avait certainement été capable d'amour; elle aurait souhaité en être encore capable, je lui rends ce témoignage; mais cela n'était plus possible. Phénomène rare, artificiel et tardif, l'amour ne peut s'épanouir que dans des conditions mentales spéciales, rarement réunies, en tous points opposées à la liberté de mœurs qui caractérise l'époque moderne. Véronique avait connu trop de discothèques et d'amants; un tel mode de vie appauvrit l'être humain, lui infligeant des dommages parfois graves et toujours irréversibles. L'amour comme innocence et comme capacité d'illusion, comme aptitude à résumer l'ensemble de l'autre sexe à un seul être aimé, résiste rarement à une année de vagabondage sexuel, jamais à deux. En réalité, les expériences sexuelles successives accumulées au cours de l'adolescence minent et détruisent rapidement toute possibilité de projection d'ordre sentimental et romanesque; progressivement, et en fait assez vite, on devient aussi capable d'amour qu'un vieux torchon. Et on mène ensuite, évidemment, une vie de torchon; en vieillissant on devient moins séduisant, et de ce fait amer. On jalouse les jeunes, et de ce fait on les hait. Cette haine, condamnée à rester inavouable, s'envenime et devient de plus en plus ardente; puis elle s'amortit
  • Extension du domaine de la lutte (1994), Michel Houellebecq, éd. J'ai lu, coll. « Nouvelle génération », 2005  (ISBN 2-290-34952-6), p. à compléter


La poursuite du bonheur, 1997

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« Nous voulons retourner dans l'ancienne demeure
Où nos pères ont vécu sous l'aile d'un archange,
Nous voulons retrouver cette morale étrange
Qui sanctifiait la vie jusqu'à la dernière heure.

Comme un enlacement de douces dépendances
Quelque chose qui dépasse et contienne l'existence ;
Nous ne pouvons plus vivre loin de l'éternité.

  • La poursuite du bonheur (1991), Michel Houellebecq, éd. Flammarion, 1997  (ISBN 978-2-0812-5788-7), p. 75


D'abord révélée à l'animal sous la forme de la douleur physique, l'existence individuelle n'accède dans les sociétés humaines à la pleine conscience d'elle-même que par l'intermédiaire du mensonge, avec lequel elle peut en pratique se confondre.
  • Les Particules élémentaires (1998), Michel Houellebecq, éd. J'ai lu, coll. « Nouvelle génération », 2006  (ISBN 2-290-35171-7), p. 76


Le désir sexuel se porte essentiellement sur les corps jeunes, et l'investissement progressif du champ de la séduction par les très jeunes filles ne fut au fond qu'un retour à la normale, un retour à la vérité du désir analogue à ce retour à la vérité des prix qui suit une surchauffe boursière anormale.
  • Les Particules élémentaires (1998), Michel Houellebecq, éd. J'ai lu, coll. « Nouvelle génération », 2006  (ISBN 2-290-35171-7), p. 106


Dans un monde qui ne respecte que la jeunesse, les êtres sont peu à peu dévorés.
  • Les Particules élémentaires (1998), Michel Houellebecq, éd. J'ai lu, coll. « Nouvelle génération », 2006  (ISBN 2-290-35171-7), p. 112


« Parler avec ces pétasses, songeait Bruno en retraversant le camping, c'est comme pisser dans un urinoir rempli de mégots ; ou encore c'est comme chier dans une chiotte remplie de serviettes hygiéniques : les choses ne rentrent pas, et elles se mettent à puer. »
  • Les Particules élémentaires (1998), Michel Houellebecq, éd. J'ai lu, coll. « Nouvelle génération », 2006  (ISBN 2-290-35171-7), p. 113


Adolescent, Michel croyait que la souffrance donnait à l'homme une dignité supplémentaire. Il devait maintenant en convenir : il s'était trompé. Ce qui donnait à l'homme une dignité supplémentaire, c'était la télévision.
  • Les Particules élémentaires (1998), Michel Houellebecq, éd. J'ai lu, coll. « Nouvelle génération », 2006  (ISBN 2-290-35171-7), p. 120


Les relations familiales persistent quelques années, parfois quelques dizaines d'années, elles persistent en réalité beaucoup plus longtemps que toutes les autres ; et puis, finalement, elles aussi s'éteignent.
  • Les Particules élémentaires (1998), Michel Houellebecq, éd. J'ai lu, coll. « Nouvelle génération », 2006  (ISBN 2-290-35171-7), p. 156


La possibilité de vivre commence dans le regard de l'autre.
  • Les Particules élémentaires (1998), Michel Houellebecq, éd. J'ai lu, coll. « Nouvelle génération », 2006  (ISBN 2-290-35171-7), p. 176


Considérant les événements présents de notre vie, nous oscillons sans cesse entre la croyance au hasard et l'évidence du déterminisme.
  • Les Particules élémentaires (1998), Michel Houellebecq, éd. J'ai lu, coll. « Nouvelle génération », 2006  (ISBN 2-290-35171-7), p. 178


La traditionnelle lucidité des dépressifs, souvent décrite comme un désinvestissement radical à l'égard des préoccupations humaines, se manifeste en tout premier lieu par un manque d'intérêt pour les questions effectivement peu intéressantes. Ainsi peut-on, à la rigueur, imaginer un dépressif amoureux, tandis qu'un dépressif patriote paraît franchement inconcevable.
  • Les Particules élémentaires (1998), Michel Houellebecq, éd. J'ai lu, coll. « Nouvelle génération », 2006  (ISBN 2-290-35171-7), p. 226


Notre malheur n'atteint son plus haut point que lorsque a été envisagée, suffisamment proche, la possibilité pratique du bonheur.
  • Les Particules élémentaires (1998), Michel Houellebecq, éd. J'ai lu, coll. « Nouvelle génération », 2006  (ISBN 2-290-35171-7), p. 245


De tous les biens terrestres, la jeunesse physique est à l'évidence le plus précieux ; et nous ne croyons plus aujourd'hui qu'aux biens terrestres.
  • Les Particules élémentaires (1998), Michel Houellebecq, éd. J'ai lu, coll. « Nouvelle génération », 2006  (ISBN 2-290-35171-7), p. 258


La création du premier être, premier représentant d'une nouvelle espèce intelligente créée par l'homme "à son image et à sa ressemblance", eut lieu le 27 mars 1929 (...) Aujourd'hui, près de cinquante ans plus tard, la réalité a largement confirmé la teneur prophétique des propos d'Hubczejak - à un point, même, que celui-ci n'aurait pas soupçonné. Il subsiste quelques humains de l'ancienne race, en particulier dans les régions restées longtemps soumises à l'influence des doctrines religieuses traditionnelles. Leur taux de reproduction, cependant, diminue d'année en année, et leur extinction semble à présent inéluctable (...) Ayant rompu le lien filial qui nous rattachait à l'humanité, nous vivons heureux ; il est vrai que nous avons su dépasser les puissances, insurmontables pour les hommes, de l'égoïsme, de la cruauté, de la colère et de la violence.
  • Les Particules élémentaires (1998), Michel Houellebecq, éd. J'ai lu, coll. « Nouvelle génération », 2006  (ISBN 2-290-35171-7), p. 316


De toute façon, les Français méprisent les Belges, dit-il pour conclure ; et le pire est qu'ils ont raison. La Belgique est un pays déliquescent et absurde, un pays qui n'aurait jamais dû exister.
  • Lanzarote (2000), Michel Houellebecq, éd. Flammarion, 2000  (ISBN 2-080-67927-9), p. 39


L'audition du monde réel était déjà en soi une souffrance.


C'est dans le rapport à autrui qu'on prend conscience de soi ; c'est bien ce qui rend le rapport à autrui insupportable.
  • Plateforme (2001), Michel Houellebecq, éd. J'ai lu, 2002  (ISBN 2-290-32123-0), p. 89


C'est avec facilité qu'on renonce à la vie, qu'on met soi-même sa vie de côté.


Pour la masochiste manipulateur, il ne suffit pas que lui-même soit malheureux ; il faut encore que les autres le soient.
  • Plateforme (2001), Michel Houellebecq, éd. J'ai lu, 2002  (ISBN 2-290-32123-0), p. 102


L'homme n'est décidément pas fait pour le bonheur.


Je suis pris dans un système qui ne m'apporte plus grand-chose, et que je sais au demeurant inutile; mais je ne vois pas comment y échapper.


Ce n'est pas aussi compliqué qu'on le raconte, les relations humaines: c'est souvent insoluble, mais c'est rarement compliqué.


Tout peut arriver dans la vie, et surtout rien.


S'il n'y avait pas, de temps à autre, un peu de sexe, en quoi consisterai la vie?


L'islam ne pouvait naître que dans un désert stupide, au milieu de bédouins crasseux qui n'avaient rien d'autre à faire - pardonnez-moi - que d'enculer leurs chameaux.
  • Plateforme, Michel Houellebecq, éd. Flammarion, 2001  (ISBN 2-08-068237-7), p. 261


Non seulement [les Occidentaux] ont honte de leur propre corps, qui n'est pas à la hauteur des standards du porno, mais, pour les mêmes raisons, ils n'éprouvent plus aucune attirance pour le corps de l'autre.
  • Plateforme (2001), Michel Houellebecq, éd. J'ai lu, 2002  (ISBN 2-290-32123-0), p. 236


L'absence d'envie de vivre, hélas, ne suffit pas pour avoir envie de mourir.


Loin d’être un effort d’abstraction, comme on le prétend parfois, le passage au monothéisme n’est qu’un élan vers l’abrutissement.
  • Plateforme (2001), Michel Houellebecq, éd. J'ai lu, 2009, p. 244


Quand les gens parlent de « droits de l’homme », j’ai toujours plus ou moins l’impression qu’ils font du second degré.
  • Plateforme (2001), Michel Houellebecq, éd. J'ai lu, 2009, p. 80


Les hommes vivent les uns à côté des autres comme des bœufs ; c’est tout juste s’ils parviennent, de temps en temps, à partager une bouteille d’alcool.
  • Plateforme (2001), Michel Houellebecq, éd. J'ai lu, 2009, p. 26


Et l'amour, où tout est facile,
Où tout est donné dans l'instant ;
Il existe au milieu du temps
La possibilité d'une île.

  • La Possibilité d'une île (2005), Michel Houellebecq, éd. Le Livre de Poche, 2007  (ISBN 978-2-253-11552-6), p. 424


Quant aux droits de l'homme, bien évidemment, je n'en avais rien à foutre ; c'est à peine si je parvenais à m'intéresser aux droits de ma queue.
  • La Possibilité d'une île (2005), Michel Houellebecq, éd. Le Livre de Poche, 2007  (ISBN 978-2-253-11552-6), p. 24


La liberté, à titre personnel, j'étais plutôt contre ; il est amusant de constater que ce sont toujours les adversaires de la liberté qui se trouvent, à un moment ou à un autre, en avoir le plus besoin.
  • La Possibilité d'une île (2005), Michel Houellebecq, éd. Le Livre de Poche, 2007  (ISBN 978-2-253-11552-6), p. 48


L'enfant est une sorte de nain vicieux, d'une cruauté innée, chez qui se retrouvent immédiatement les pires traits de l'espèce, et dont les animaux domestiques se détournent avec une sage prudence.
  • La Possibilité d'une île (2005), Michel Houellebecq, éd. Le Livre de Poche, 2007  (ISBN 978-2-253-11552-6), p. 67


Jeunesse, beauté, force : les critères de l'amour physique sont exactement les mêmes que ceux du nazisme.
  • La Possibilité d'une île (2005), Michel Houellebecq, éd. Le Livre de Poche, 2007  (ISBN 978-2-253-11552-6), p. 74


J'aurais pu, à l'extrême limite, opérer un cunnilingus sur la personne de Gros Cul – j'imaginais mon visage s'aventurant entre ses cuisses flasques, ses bourrelets blafards, essayant de ranimer son clitoris pendant.
  • La Possibilité d'une île (2005), Michel Houellebecq, éd. Le Livre de Poche, 2007  (ISBN 978-2-253-11552-6), p. 294


L'amour non partagé est une hémorragie.
  • La Possibilité d'une île (2005), Michel Houellebecq, éd. Le Livre de Poche, 2007  (ISBN 978-2-253-11552-6), p. 316


Sans doute l'amour n'avait-il jamais été, comme la pitié selon Nietzsche, qu'une fiction inventée par les faibles pour culpabiliser les forts, pour introduire des limites à leur liberté et à leur férocité naturelles.
  • La Possibilité d'une île (2005), Michel Houellebecq, éd. Le Livre de Poche, 2007  (ISBN 978-2-253-11552-6), p. 341


Jamais je ne me suis senti de devoir, ni d'obligation, par rapport à la France, et le choix d'un pays de résidence a pour moi à peu près autant de résonance émotive que le choix d'un hôtel. Nous sommes de passage sur cette Terre, je l'ai maintenant parfaitement compris ; nous n'avons pas de racines, nous ne produisons pas de fruit. Notre mode d'existence, en résumé, est différent de celui des arbres. Cela dit j'aime beaucoup les arbres, je les aime même de plus en plus ; mais je n'en suis pas un. Nous serions plutôt des pierres, lancées dans le vide, et aussi libres qu'elles ; ou, si l'on tient absolument à voir les choses du bon côté, nous serions un peu comme des comètes.
  • Ennemis publics (2008), Michel Houellebecq, éd. Poche, 2008, p. 122


Que l'histoire politique puisse jouer un rôle dans ma propre vie continuait à me déconcerter, et à me répugner un peu. Je me rendais bien compte pourtant, et depuis des années, que l'écart croissant, devenu abyssal, entre la population et ceux qui parlaient en son nom, politiciens et journalistes, devait nécessairement conduire à quelque chose de chaotique, de violent et d'imprévisible. La France, comme les autres pays d'Europe occidentale, se dirigeait depuis longtemps vers la guerre civile, c'était une évidence ; mais jusqu'à ces derniers jours j'étais encore persuadé que les Français dans leur immense majorité restaient résignés et apathiques - sans doute parce que j'étais moi-même passablement résigné et apathique. Je m'étais trompé.
  • Soumission (2015), Michel Houellebecq, éd. Flammarion, 2015, p. 116


Ce qui est extraordinaire chez Bayrou, ce qui le rend irremplaçable, poursuivit Tanneur avec enthousiasme, c'est qu'il est parfaitement stupide, son projet politique s'est toujours limité à son propre désir d'accéder par n'importe quel moyen à la « magistrature suprême », comme on dit ; il n'a jamais eu, ni feint d'avoir la moindre idée personnelle ; à ce point, c'est tout de même rare. Ça en fait l'homme politique idéal pour incarner la notion d'humanisme, d'autant qu'il se prend pour Henri IV, et pour un grand pacificateur du dialogue interreligieux ; il jouit d'ailleurs d'une excellente cote auprès de l'électorat catholique, que sa bêtise rassure. C'est exactement ce dont a besoin Ben Abbes, qui souhaite avant tout incarner un nouvel humanisme, présenter l'islam comme la forme achevée d'un humanisme nouveau, réunificateur, et qui est d'ailleurs parfaitement sincère lorsqu'il proclame son respect pour les trois religions du Livre.

  • Soumission, Michel Houellebecq, éd. Flammarion, 2015, p. 152


Entretiens

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Je ne suis pas pour l'action politique, au fond. [...] Je ne suis pas un citoyen et je n'ai pas envie de le devenir. On n'a pas de devoir par rapport à son pays, ça n'existe pas. Il faut le dire aux gens. [...] On est des individus, tous, pas des citoyens ou des sujets. [...] On n'a aucun devoir par rapport à son pays. [...] La France est un hôtel, pas plus
  • Michel Houellebecq, 9 novembre 2010, dans Interview de Michel Houellebecq, paru France Inter, 9 novembre 2010, Michel Houellebecq.


La religion la plus con, c'est quand même l'islam. Quand on lit le Coran, on est effondré... effondré !
  • Michel Houellebecq, septembre 2001, dans Propos recueillis par Didier Sénécal, paru Lire, septembre 2001, Michel Houellebecq.


L’islam est une religion dangereuse, et ce depuis son apparition. Heureusement, il est condamné. D’une part, parce que Dieu n’existe pas, et que même si on est con, on finit par s’en rendre compte. A long terme, la vérité triomphe. D’autre part, l’Islam est miné de l’intérieur par le capitalisme. Tout ce qu’on peut souhaiter, c’est qu’il triomphe rapidement. Le matérialisme est un moindre mal. Ses valeurs sont méprisables, mais quand même moins destructrices, moins cruelles que celles de l’islam.
  • Michel Houellebecq, septembre 2001, dans Propos recueillis par Didier Sénécal, paru Lire, septembre 2001, Michel Houellebecq.


La lecture du Coran est une chose dégoûtante. Dès que l’islam naît, il se signale par sa volonté de soumettre le monde. Sa nature, c’est de soumettre. C’est une religion belliqueuse, intolérante, qui rend les gens malheureux.


Patrick Cohen : L'islam, vous ne le voyez plus comme la religion la plus con du monde ?
Michel Houellebecq : Non, tout compte fait, disons qu'après lecture approfondie du Coran, je suis sûr qu'on peut négocier en fait. Je veux dire, la position normale d'un lecteur du Coran en fait quelqu'un avec qui on peut négocier. Bon, le problème c'est que c'est toujours qu'il y a une marge d'interprétation. Effectivement, en prenant une sourate, en l'exploitant à fond, en en éliminant cinq autres, on peut aboutir à un djihadiste. Il faut vraiment une sérieuse dose de malhonnêteté pour le lire le Coran et aboutir à ça, mais c'est possible.
Patrick Cohen : On négocie, mais si je me réfère à votre roman, on négocie au prix de la mort de la république ?
Michel Houellebecq : Une transformation oui...
Patrick Cohen : Pas une petite transformation  ?
Michel Houellebecq : Oui, mais vous savez, la France a existé avant la République et existera peut-être après, c'est vrai que ce n'est pas un de mes absolus. Ce n'est pas un absolu transcendant.

  • Michel Houellebecq, Michel Houellebecq : "Mon livre est une satire", France Inter, 7 janvier 2015


Antoine de Caunes : Vous aviez un commentaire très violent sur le Coran en 2001, que l'islam était la religion la plus con du monde. Je voudrais savoir qu'est-ce qui vous a fait bouger...
Michel Houellebecq : Qu'est-ce qui m'a fait changer d'avis ? La lecture du Coran surtout, je ne l'avais peut-être pas lu suffisamment bien. Maintenant, je pense qu'une interprétation moyennement honnête du Coran n'aboutit pas au djihadisme. Il faut une interprétation très déshonnête pour aboutir au djihadisme.

  • Michel Houellebecq, Le Grand Journal - Interview de Michel Houellebecq, Canal plus, 12 janvier 2015


Citations sur Michel Houellebecq

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Tout ceux qui pensent que Houellebecq ne soigne pas son style sont des gens qui n'ont lu ni Jean de La Ville de Mirmont ni Joseph Conrad (deux de ses influences). Au contraire, peu d'écrivains contemporains ont les moyens de placer la barre aussi haut sur le plan littéraire sans devenir hermétiques ou pompeux. Houellebecq possède la nonchalance des auteurs vraiment sûrs d'eux.


Nous sommes tous atrocement prisonniers de la plateforme où nous sommes montés sans être capables d'en redescendre.


Ce que je partage peut-être de plus profond avec Houellebecq : comprendre la littérature comme un programme de survie.
  • Le Théâtre des opérations (1999), Maurice G. Dantec, éd. Gallimard, coll. « Folio », 2002, p. 49


Michel Houellebecq est un extraordinaire sismographe des mutations qui ont affecté la France et l'Occident depuis les années 1960, mais c'est à tort, me semble-t-il, qu'on le réduit à un romancier sociologique. Il est doué d'un don de vision, il pressent les forces qui travaillent souterrainement nos sociétés et possède ce pouvoir de révélation qui distingue les œuvres importantes. Soumission en est un remarquable exemple.

  • « Le conservatisme, c'est l'avenir », Bérénice Levet, Eléments, nº 166, Juin-Juillet 2017, p. 69


Ses livres relèvent de la santé publique. Voir que notre époque est quadrillée par la science et la statistique, laquelle est étymologiquement au cœur de la raison d'État et de sa volonté de normer par la « loi normale » le monde est une chose ; approcher ensuite les deux raisons de vivre, ou survivre, houellebecquiennes – la bonté et l'amour – en est une autre, autrement oxygénante.


Houellebecq estime que les amuseurs publics sont ce qu'il y a de plus bas dans la société : des cyniques qui font commerce de leur cynisme.


Houellebecq fait un vibrant éloge de William Morris et des préraphaélites, pour lesquels "la distinction entre l'art et l'artisanat, entre la conception et l'exécution, doit être abolie."


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