Mort

état de ce dont les fonctions vitales se sont arrêtées

La mort est un concept qualifiant l'état d'un organisme biologique ayant cessé de vivre.

Autoportrait à la Mort violoniste, Arnold Böcklin
La Mort de SénèqueJoseph-Noël Sylvestre (1875)
La Mort de PaetusAntoine Rivalz

Ingrid Astier, Angle mort, 2013

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Comment pouvait-on accepter la mort de ceux que l’on aime ? La réponse l’avait réconciliée avec la vie, avec cette douleur culpabilisante de leur survivre.
On n’accepte jamais.


Amadou Hampâté Bâ

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On ne peut m’annoncer une mauvaise nouvelle plus grave que celle que le destin m’a assigné au jour de ma naissance en me disant : » Tu es entré dans une existence dont tu ne sortiras pas vivant, quoi que tu fasses »et nulle force humaine ne pourra jamais me loger plus étroitement sur cette terre que je ne le serrai dans ma propre tombe.


C'est la Mort qui console, hélas ! Et qui fait vivre ;
C'est le but de la vie, et c'est le seul espoir
Qui, comme un élixir, nous monte et nous enivre,
Et nous donne le cœur de marcher jusqu'au soir.


La mort tombe dans la vie comme une pierre dans un étang ː d'abord éclaboussures, affolements dans les buissons, battements d'ailes et fuites en tout sens. Ensuite grands cercles sur l'eau, de plus en plus larges. Enfin le calme à nouveau, mais pas du tout le même silence qu'auparavant, un silence, comment dire ː assourdissant.


Je ne sais quoi penser de la mort. elle me semble étrange — mais pas plus au fond que l'amour ou le ciel dans les yeux des nouveaux-nés. La mort, l'amour et les yeux brûlants de bleu sont des choses pures et légendaires. Je les regarde sans comprendre — comme dans la terrible nuit des contes on regarde les fenêtres illuminés d'un maison dans la forêt, là-bas, au loin, très loin.


La mort n'éteint pas la musique, n'éteint pas les roses, n'éteint pas les livres, n'éteint rien.


Par mes désirs prévenue,
Près de mon lit douloureux,
Déjà la mort est venue
Asseoir son squelette affreux ;

  • « Odes », dans Œuvres Complètes, Nicolas Boileau, éd. Firmint-Didot, 1865, p. 599


Des extrêmes confins, il sentait avancer sur lui une ombre progressive et concentrique, c'était peut-être une question d'heures, peut-être de semaines ou de mois ; mais même les semaines et les mois sont une bien pauvre chose quand ils nous séparent de la mort. La vie donc n'avait été qu'une sorte de plaisanterie : pour un orgueilleux pari tout avait été perdu.
  • Le désert des Tartares, Dino Buzzati (trad. Michel Arnaud), éd. Robert Laffont, coll. « Pavillons », 1994  (ISBN 2-221-09637-1), p. 228


Courage, Drogo, c'est là ta dernière carte, va en soldat à la rencontre de la mort et que, au moins, ton existence fourvoyée finisse bien. Venge-toi finalement du sort, nul ne chantera tes louanges, nul ne t'appellera héros ou quelque chose de semblable, mais justement pour cela ça vaut la peine. Franchis d'un pied ferme la limite de l'ombre, droit comme pour une parade, et souris même, si tu y parviens. Après tout, ta conscience n'est pas trop lourde et Dieu saura pardonner.
  • Le désert des Tartares, Dino Buzzati (trad. Michel Arnaud), éd. Robert Laffont, coll. « Pavillons », 1994  (ISBN 2-221-09637-1), p. 229/230


Nous tendons à la mort, comme la flèche au but et nous ne le manquons jamais, la mort est notre unique certitude et nous savons toujours que nous allons mourir, n'importe quand et n'importe où, n'importe la manière.


Ce qui m’angoisse, et pour toujours je crois, c’est la façon qu’un petit enfant cesse de jouer pour s’en aller tout de suite, si vite, c’est presque rien à trépasser, le temps de lever un deux trois son petit pinceau, de rire bien encore deux ou trois fois, quatre, et puis voilà. Cette façon de n’être entré dans nos ombres que pour y porter un petit peu de lumière, comme un papillon entre au soir au jardin et s’en va devant la nuit. Vingt ans sont passés depuis, cependant bien des choses encore, des biens étranges et biens lourdes, et petit Peter qu’est toujours là, pour un dixième, pour un petit soupir.


Mourir, ce n'est jamais que contraindre sa conscience, au moment même où elle s'abolit, à prendre congé de quelques quartiers physiques actifs ou somnolents d'un corps qui nous fut passablement étranger
  • Fureur et mystère (1948), René Char, éd. Gallimard, coll. « Poésie », 1962  (ISBN 2-07-030065-X), partie SEULS DEMEURENT (1938-1944), Partage formel, p. 71


La mort n'épargne personne. Mais qu'à cette dernière heure, le front du mort reçoive le toucher de doigts affectueux, que la flamme de sa vie s'éteigne sous le regard d'un visage empli d'affection et de compassion, qu'il voie au moins une larme dans les yeux d'un être humain. Ce serait pour lui un bonheur suffisant au moment de son départ pour l'autre monde.
  • Dernières phrases du roman.


Malcolm de Chazal

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La mort est une « perte de souffle » étagée. La volupté est une « perte de souffle » en rond.
  • « Sens plastique », Malcolm de Chazal, dans Anthologie de la poésie française du XXè siècle (1948), Michel Décaudin (Ed.), éd. Gallimard, coll. « Poésie », 1983, p. 439


Le dit de Tianyi
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Entre-temps, ma petite sœur, cette compagne de jeux, cette complice, qui dormait chaque nuit à côté de moi, un matin n'ouvrit pas les yeux, ne me sourit pas, ne me répondit pas. D'un coup, elle ne fut plus là, plus jamais là, creusant un vide énorme dans la maison et au-dehors. Si grand que fussent le chagrin de mes parents et mon crève-cœur à moi, j'étais pourtant convaincu qu'elle se trouvait quelque part, qu'elle jouait à cache-cache avec moi. Que de fois, au craquement d'un meuble, aux crissements des feuilles sur le sentier, je me suis retourné…


C’était en m’accrochant à la lueur bleue que toutes les nuits suivantes je tentais de dominer ma peur. Je communiais avec la souffrance de l’autre qui avait maintenant un visage. Le jeune homme aux yeux fiévreux et aux joues creuses, entre-temps, était devenu mon compagnon. Par allusions successives, il m’avait signifié que son plus grand regret était de devoir quitter cette vie sans avoir connu de femme. Comment le consoler ? Pouvais-je lui dire que tout homme, né d’une mère, a déjà connu la femme. Et sa mère, si elle le savait – elle ne le saura jamais -, le reprendrait volontiers en elle, le réchauffant de sa chair, pour qu’il renaisse. Nuit après nuit, à défaut d’être consolé, je me contraignais par la pensée à devenir consolateur. Le jeune homme avant de disparaitre m’aura fait, à sa manière, un signe de vie. Un signe de la vie.


Cinq méditations sur la mort, autrement dit sur la vie
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Pour l’heure, tentons tout de même, d’après notre expérience de la vie d’ici, d’imaginer un instant une forme d’existence dans laquelle les êtres ignoreraient totalement la mort. Ils seraient donc toujours là, depuis toujours contemporains. D’ailleurs, les mots tels que « toujours » et « contemporain » n’existeraient probablement pas dans leur vocabulaire, puisque, de fait, le temps serait absent de leur univers. Tout ayant été donné depuis toujours, ils n’auraient pas l’idée d’un écoulement et d’un renouvellement, encore moins celle de la transformation ou de la transfiguration. Tout étant répétable et différable, il n’y aurait chez eux ni élan irrésistible ni désir irrépressible pour une réalisation. Ils n’éprouveraient aucun étonnement, aucune reconnaissance devant l’existence, perçue par eux comme une donnée qui se continuerait indéfiniment, et jamais comme un don inespéré, irremplaçable.

  • Cinq méditations sur la mort, autrement dit sur la vie, François Cheng, éd. Albin Michel, 2013  (ISBN 978-2-226-25191-6), p. 20


Ici, au contraire, leur rumeur nous parvient, infiniment émouvante et éclairante, murmures qui sourdent du cœur, paroles proches de l'essence, comme filtrées par la grande épreuve. Car avec les morts nous gagnons à rester tout ouïe : ils ont beaucoup à nous dire. Étant passés par la grande épreuve, ils sont en quelque sorte des initiés. Ils sont à même de repenser et revivre la vie autrement, de jauger la vie à l'aune de l'éternité.


Chers amis, au cours de mes précédentes méditations, nous avons pu voir que la vie a imposé la mort corporelle comme une de ses propres lois, cela afin que la vie soit vie, qu'elle soit en devenir. La mort n'étant que la cessation d'un certain état de la vie, elle n'existerait pas si n'existait la vie. La mort corporelle, inéluctable, révèle paradoxalement la vie comme le principe absolu. Il n'y a qu'une seule aventure, celle de la vie. Cette aventure, rien ne peut plus faire qu'elle ne soit advenue dans l'univers et qu'elle se poursuive.


Quand reviennent les âmes errantes
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Toi qui as été justicier, qui as supprimé la vie d’autres personnes, as-tu agi de façon toujours juste ? Eh bien, interroge-toi. Peux-tu continuellement esquiver ta propre mort, continuellement ruser avec elle ? Le temps n’est-il arrivé pour toi d’honorer ton mandat ? Peut-être es-tu venu au monde pour faire face à ce défi ! Peut-être est-ce bien à toi de faire ce qu’il y a à faire !


La vraie gloire est ici
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À bout de soif,
une gorgée d'eau…
Toute mort est vie ː
désert-oasis


— Le jour où disparaîtront d'un seul coup tes amis! où d'un seul coup disparaîtra la terre et ce qu'elle porte, hormis toi ! quand tu seras seul on te croira mort ; c'est on qui le sera. L'univers meurt chaque fois que meurt un homme, et il y a beaucoup d'hommes parmi les hommes.


l’explorateur casqué de blanc s’apprête à mourir et rassemble ses souvenirs pour savoir comment doit mourir un explorateur : si c’est les bras en croix ou face dans le sable, s’il doit creuser une tombe fugitive en raison du vent et des hyènes, ou se recroqueviller dans la position dite en chien de fusil


(...) oui on peut rire de tout, on doit rire de tout. De la guerre, de la misère et de la mort. Au reste, est-ce qu’elle se gêne, elle, la mort, pour se rire de nous ? Est-ce qu’elle ne pratique pas l’humour noir, elle, la mort ? Regardons s’agiter ces malheureux dans les usines, regardons gigoter ces hommes puissants boursouflés de leur importance, qui vivent à cent à l’heure. Ils se battent, ils courent, ils caracolent derrière leur vie, et tout d’un coup ça s’arrête, sans plus de raison que ça n’avait commencé, et le militant de base, le pompeux P.D.G., la princesse d’opérette, l’enfant qui jouait à la marelle dans les caniveaux de Beyrouth, toi aussi à qui je pense et qui a cru en Dieu jusqu’au bout de ton cancer, tous, tous nous sommes fauchés un jour par le croche-pied rigolard de la mort imbécile, et les droits de l’homme s’effacent devant les droits de l’asticot.


Il se trouvait déjà dans un coma léger. J’ai toujours eu le sentiment que les agonisants restent conscients jusqu'à la fin. Ils ne sont séparés des vivants que par des dysfonctionnements physiques. Je ne crois pas qu’un homme puisse être totalement coupé du monde. J’ai acquis cette certitude après avoir accompagné tant de moines vers la mort. Le frère Paul n’est pas resté longtemps dans notre infirmerie. Il est mort trois jours plus tard.


Dom Innocent me dit avec son humour habituel que la vie serait un désastre si nous ne savions pas que la mort viendrait nous chercher un jour. Comment les hommes resteraient-ils indéfiniment dans cette vallée de larmes ? « Nous sommes nés pour rencontrer Dieu. Les vieux chartreux lui demandent de ne pas tarder. La mort c’est la fin de l’école. Après le Paradis arrive. Un moine a donné sa vie à Dieu, et il ne l’a jamais rencontré. Il est normal qu’il soit impatient de le voir. »


[…] la mort n'est rien pour nous, car tout bien et tout mal résident dans la sensation ; or, la mort est la privation complète de cette dernière.
  • Épicure et les épicuriens (1961), Épicure (trad. Maurice Solovine, choix des textes Jean Brun), éd. Presses universitaires de France, coll. « Les grands textes », 2004, p. 130 (texte intégral sur Wikisource)


Je me rappelais que mon père avait coutume de dire que le but de la vie c'est de se préparer à rester mort très longtemps.
  • Tandis que j'agonise (1930), William Faulkner (trad. Maurice-Edgar Coindreau), éd. Gallimard, coll. « Du monde entier », 1966, p. 183


Poussière de craie, chiffrant un néant qui cherche à gonfler la bulle, la fine membrane blanche qui l'enclôt, délinéant une part de nuit obscure et contournée sur le fond d'une nuit d'asphalte plus vaste, ligne hâtive silhouettant une absence et que les passants indifférents crèvent, emportent et dispersent à la semelle de leurs souliers.
  • À propos d'une silhouette de craie sur un trottoir, suite à mort violente.
  • La Décomposition, Anne F. Garréta, éd. Grasset (Le Livre de Poche), 1999, p. 50


Tu dors sans faste, au pied de la colline,
            Au dernier rang,
Et sur ta fosse un saule pâle incline
            Son front pleurant ;

Ton nom déjà par la nuit et la neige
            Est effacé
Sur le bois noir de la croix qui protège
            Ton lit glacé.

  • « Clémence », dans Œuvres de Théophile Gautier - Poésies, Volume 1 (1832), Théophile Gautier, éd. Lemerre, 1890, p. 63


Enfin au cimetière,
Un soir d’automne sombre et grisâtre, une bière
Fut apportée : un être à la terre manqua ;
Et cette absence, à peine un cœur la remarqua.

  • « Une âme », dans Œuvres de Théophile Gautier - Poésies, Volume 1 (1832), Théophile Gautier, éd. Lemerre, 1890, p. 77


La mort est un roman.


Les mots aussi nous ont été confisqués. Plus personne n'est moribond, quelle indécence ! On ne meurt plus de nos jours : on s'endort dans la paix du Seigneur ou bien on décède. Expirer évoque trop le dernier souffle. À éviter. Rendre l'âme est démodé maintenant qu'on n'est pas sûr d'avoir une âme... Trépasser paraît trop littéraire, alors qu'on peut dire décès en toute indifférence tant le mot a été vidé de tout pouvoir émotionnel par les administrations qui l'emploient. Dire « Ma mère est décédée hier » fait nettement moins mal que « Maman est morte ».
  • La Touche étoile, Benoîte Groult, éd. Le Livre de Poche, 2006, p. 22-23


Les jeunes enfants sont terrorisés par l'idée de la mort. Par leur naissance, ils sont encore proches du néant et je suis convaincue que dans le ventre maternel déjà ils éprouvent des terreurs inimaginables. […] En réalité, les enfants hurlent à la mort. Ils sont des vivants de fraîche date, et n'ont pas eu le temps d'oublier leur état antérieur. [...] Les enfants sont des morts de la veille et les vieillards des morts du lendemain.


La mort des parents ne devient définitive que le jour où leurs enfants ne sont plus là pour les évoquer.


De ma mort

Ce n'est pas moi
Qui fermerai

Pas moi qui crierai
Pour la fermeture.

C'est qu'on me fermera

  • « De ma mort », dans Sphère, Guillevic, éd. Gallimard, 1963, p. 17


Il faut mourir aimable, si on le peut.


— Et qu'est-ce que la mort, celle de votre mère, ou la vôtre, ou la mienne ? Vous n'avez vu mourir que votre mère. Moi, à la Mater ou au Richmond, j'en vois tous les jours qui tournent de l'œil, et dans la salle de dissection je les vois débiter en tranches. Est-ce que ça n'est pas tout simplement bestial ? Tout ceci ne rime à rien. Vous avez refusé de vous mettre à genoux et de prier pour votre mère qui vous le demandait sur son lit de mort. Pourquoi ? Parce que vous avez en vous de la maudite essence de jésuite, bien qu'elle opère à rebours. Pour moi dans tout ceci il n'y a que dérision et bestialité. Ses lobes cérébraux ne fonctionnent plus. Elle appelle le médecin Sir Peter Teazle et cueille des boutons d'or sur son couvre-pieds. Contentez-la tant qu'elle y est encore.


Poussant devant lui un amas flottant de détritus, un banc de poissons en éventail, de cocasses coquilles. Un cadavre blanc de sel, émergeant dans le ressac, ballotté vers la terre, mètre à mètre, un marsouin. Le voilà. Accrochez-le vite. Tout descendu qu'il soit sous le plancher des eaux. Il est à nous. Stoppe.
Sac de gaz cadavériques macérant dans une saumure infecte. Un frisson de fretin engraissé d'un spongieux morceau de choix fuit des interstices de sa braguette boutonnée. Dieu se fait homme se fait poisson se fait oie bernacle se fait édredon. Vivant, je respire des souffles morts, foule la poussière de mort, dévore un urineux rebut de chairs mortes. Hissé roide sur le plat-bord, il exhale aux cieux la puanteur de son tombeau vert, le trou lépreux de son nez ronflant au soleil.
Une marine métamorphose ceci, des yeux bruns bleuis de sel. Mort par la mer, la plus douce des morts qui s'offrent à l'homme. Antique Père Océan.


Sois sans crainte : chacun meurt en paix — la bataille n'est que pour les parvis.
  • Graffiti/Frontalières (1966), Ernst Jünger (trad. Henri Plard), éd. Christian Bourgois, coll. « 10/18 », 1977, p. 77


D'une bonne prose, on doit exiger qu'elle chasse la crainte de la mort.
  • Graffiti/Frontalières (1966), Ernst Jünger (trad. Henri Plard), éd. Christian Bourgois, coll. « 10/18 », 1977, p. 79


Hadrianus Junius, XVIè siècle

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Nul pot de vin, nul honneur, nulle puissance formidable ne peut apitoyer la Mort.
  • Accompagne une gravure de Heemskerck, La Victoire de la Mort.
  • Heemskerck, l'humanisme, Hadrianus Junius, éd. Musée des Beaux-Arts de Rennes, 2010, p. 123


– On ne sait rien, dit-il, avec un geste qu'il ne parvint pas à rendre insouciant.
– Ils étaient quatre, Thélis ? demanda Marbot à mi-voix.
Le capitaine ne répondit pas. La mort entra dans le mess.
Mais Neuville, en qui se glissait l'épouvante, voulut une diversion.
– Sans atout, dit-il.
– Et Charensole répliqua :
–Deux trèfles.
Il parut à l'aspirant que l'air manquait à toutes les poitrines, mais on ne pouvait ouvrir la porte. L'orage frappait la nuit. Comme ils ne trouvaient pas d'autre occupation, la partie continua.


Plein de fatigue et d'horreur, Oetilé ne parvenait pourtant pas à détacher son regard de cette forme qui lui ressemblait encore par son épouvante, par son ignorance et qui, dans quelques minutes, allait tout comprendre. Marc eut l'espoir insensé que, lui aussi, à travers elle, saurait. Jamais il n'avait senti aussi transparent, aussi matérialisé, le grand passage, car la lutte désespérée de l'agonisant réduisait la marge flottante de la vie à la mort, la rongeait jusqu'à cette pointe extrême où l'une se mêle à l'autre impénétrablement.


Pourquoi tous ces hommes ont-ils laissé leurs habitudes, et leurs plaisirs, et leur sécurité ? Quel est donc cet instinct secret et sacré, plus fort que celui de vivre, et qui les pousse à embrasser la mort ? Aucun d'eux n'est un héros. Ils ont tous une épouvante humaine de la fin. Ils n'ont aucun goût du martyre. ils sont jeunes et forts. Ils aiment et le vin et les filles. D'où vient cette volonté, cet acharnement à saigner, à crever ? Moi, je sais pourquoi je suis ici. Je hais l'esprit allemand, je hais ma faiblesse physique et je viens vaincre ma peur. J'ai le sens aigu du mépris de moi-même. Je ne saurais vivre en le portant à l'extrême. Oui, moi, je sais… Mais eux ? Pourquoi ?


Venez, sommeil et mort ; vous ne promettez rien, vous tenez tout.
  • Søren Kierkegaard. Œuvres complètes (1843), Søren Kierkegaard (trad. Paul-Henri Tisseau), éd. Robert Laffont, coll. « Bouquins », 1993  (ISBN 2-221-07373-8), p. 37


Le charme de la mort n'existe que pour les courageux..


Mains ouvertes des morts sous les feuilles de la forêt

  • « Le Carreau sans cœur », Annie Le Brun, La Brèche, nº 7, Décembre 1964, p. 59


Quelle chose mystérieuse, curieuse, que la mort. Quelle tranquillité, quel repos, quelle sorte de bonheur même, sur ce visage. Quelque chose d'un très léger sourire à la bouche. Tout à fait le visage d'une femme qui fermerait les yeux pour recevoir des baisers. C'est à faire rêver.
  • Journal littéraire, Paul Léautaud, éd. Mercure de France, 1962, p. 260


Finalement, je veux bien croire que tu es ma sœur et, si cela peut te faire plaisir, j'y crois plus qu'à la mort même, sans que tu ailles pour autant me rayer de l'état civil! Mais à rester ainsi sans bouger, je vais m'évanouir. Si le cœur t'en dit, essaie de courir à mes côtés, en tâchant cependant de ne pas crever, car je suis plutôt rapide. Tout en courant, tu pourras me dire ce que tu attends de moi; sinon, eu égard à notre parenté, je te promets de te laisser, lorsque je mourrai, la totalité de mes biens.


Finir la partie n'est pas une sinécure : il faut trouver une chute, sans chuter dans le veule et la gesticulation. Mat, oui, mais la tête haute. Tous les fous du roi vous diront que la chose est difficile. Ne jamais sacrifier sa reine pour un destin de pacotille.


[...] la tragédie de la mort est en ceci qu’elle transforme la vie en destin, qu’à partir d’elle rien ne peut plus être compensé.


La mort de tout homme est une doublure pour toutes les autres. Et puisque la mort est notre sort commun il n'y a pas moyen d'apaiser la crainte qu'elle inspire si ce n'est d'aimer cet homme qui est là à notre place.
  • Des villes dans la plaine, Cormac McCarthy (trad. François Hirsch et Patricia Schaeffer), éd. Éditions de l'Olivier, 2002, p. 317


La mort est digne de respect comme le berceau de la Vie, comme le sein du renouvellement. Mais opposée à la Vie et séparée d'elle, elle devient un fantôme, un masque, et pire encore. Car la mort prise comme une puissance spirituelle indépendante est une puissance fort dépravée dont l'attirance perverse est incontestablement très forte, et ce serait sans doute le plus effroyable égarement de l'esprit humain que de vouloir sympathiser avec elle.
  • La Montagne magique (1931), Thomas Mann (trad. Maurice Betz), éd. Arthème Fayard, coll. « Le Livre de Poche », 1994, p. 300


Mascarille : On ne meurt qu'une fois, et c'est pour si longtemps !…


Je veux que la mort me trouve plantant mes choux.


Qui apprendrait aux hommes à mourir, leur apprendrait à vivre.


Il est bien que l'homme meure quand il est abandonné par la part divine de soi-même.

  • (fr) Brocéliande: Notes, Henry de Montherlant, éd. Gallimard, coll. « Théâtre, Bibliothèque de la Pléiade », 1972, p. 1006


Mourir, lui arrivait-il parfois de penser, était peut-être le seul vrai plaisir que la vie réservât aux hommes.


La mort acheta un billet de loterie en son nom.
  • « Dolman le maléfique », Joyce Mansour, La Brèche, nº 1, Octobre 1961, p. 50


Car naturellement, il y a la mort. Elle a sa place dans les calculs domestiques. Mais ce ne pas une bête sauvage, tapie, à l’affût, prête à bondir. On est en 1914, que diable ! Le siècle de la science, du progrès. La mort elle-même se fait petite devant ces lumières.


Au café, je vois comme des cendres sous sa peau. Désintégration. J'éprouve une terrible angoisse. J'ai envie de la prendre dans mes bras. Je la sens glisser vers la mort et j'ai envie d'entrer dans le royaume de la mort pour la suivre, pour l'embrasser. Elle est en train de mourir sous mes yeux. Sa sombre beauté, si cruellement attirante, est en train de mourir. Sa force étrange, presque virile.
  • Henry et June — Les cahiers secrets (1986), Anaïs Nin (trad. Béatrice Commengé), éd. Stock, 2007  (ISBN 978-2-234-05990-0), Décembre (1931), p. 30


La philosophie, l'art et la religion existent parce que la mort oblige les hommes à inventer des parades pour ne pas avoir à succomber et à trembler d'effroi devant elle.
  • La Lueur des orages désirés. Journal hédoniste IV, Michel Onfray, éd. Grasset, 2007, p. 13


Le vent du soir
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Parmi les cent mille morts russes de la bataille de Moukden figurait le cadavre du capitaine Nicolas. Une des sources dont je m'inspire pour raconter son histoire indique qu'un sourire flottait sur le visage gelé de l'officier de fortune et qu'au milieu des neiges où le sang des soldats laissait des traînées rouges, il avait l'air heureux.
  • Le vent du soir, Jean D'Ormesson, éd. Éditions Jean Claude Lattès, 1985, p. 365


La Douane de mer
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Il n'y aurait qu'une chose de pire que de mourir : ce serait de ne pas mourir. Ne me replonge pas dans la vie : elle n'a de prix que parce qu'elle cesse. Tous, ou presque tous, nous avons peur de mourir. Mais une fois dans la mort, dans la paix, dans l'oubli, aurions-nous envie de revenir sur cette Terre ?


Guide des égarés
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Ce qu'il y a de plus étrange dans la mort, c'est cette barrière infranchissable qui la sépare de la vie. On dirait un fait exprès. Très loin dans le passé, il y a des millions et des millions de siècles, un mur s'élève tout au début pour nous empêcher de connaître notre origine. Très près dans l'avenir, dans quelques années, dans quelques mois ou peut-être demain, un mur s'élève tout à la fin pour nous empêcher de connaître notre destin.
Nous ignorons d'où nous venons, nous ignorons où nous allons. Nous sommes tous des égarés.


Une fête en larmes
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– À quoi ? demanda Clara avec une ombre d'insolence.
– Mais à la mort, lui dis-je. Ne le savez-vous pas ? Tout finit. Les amours éternels finissent aussi par finir. Vous finirez. Je finirai. Je suis près de finir. Vous êtes loin de finir parce que vous êtes jeune. Mais vous finirez aussi. C'est un malheur. Et, en un sens, c'est une chance. On peut dire que, sous le soleil et au-delà du soleil, tout est triste et mal parce que tout finit. On peut dire aussi — et c'est pire, et c'est encore plus triste — que tout est bien : parce que tout finit.


Je dirai malgré tout que cette vie fut belle
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Apparemment opposée à la première, la deuxième a quelque chose de plus sombre : naître, c'est commencer à mourir et la vie que j'ai tant aimée est une espèce d'illusion appelée avec évidence à se dissiper au plus vite et à périr à jamais. Cette deuxième conviction l'emporte de loin sur la première. Avec ses bonheurs et sa tristesse, avec ses drames et ses enchantements, l'existence sur cette terre m'apparaît comme un sas, une sorte de stage, une épreuve, un examen de passage – mais vers quoi ou vers où ?


Je sentis que je me noyais. Et Lorsque je fus sur le point de mourir, déjà violacé, elle me déposa doucement sur le bord, et se mit à me baiser, me disant je ne sais quoi. Je me sentais faible, moulu et humilié. En même temps, la volupté me faisait fermer les yeux. Sa voix était suave et me parlait de la mort délicieuse des noyés. Quand je revins à moi, je commençai à la craindre et la haïr.
  • Liberté sur parole (1958), Octavio Paz (trad. Jean-Clarence Lambert), éd. Gallimard, coll. « Poésie », 1966  (ISBN 2-07-031789-7), partie II. AIGLE OU SOLEIL ? (1949-1950), Sables mouvants — Ma vie avec la vague, p. 76


Il se tenait debout, entre le novice attaché à la barre, et la silhouette plus claire du père Élias qui, simplement, avait l’air d’attendre, un air d’attendre admirable ; sa posture n’était pas celle de l’indifférence, ni de l’abandon, ni de la superbe, mais la posture extraordinairement placide et résolue d’un homme qui, ne sachant pas trop ce qu’il va quitter, sait fort bien, et de longue date, ce qui l’attend.


Le cœur fatigué d'angoisses qui tiraient leur origine du désordre et de la décadence générale, je succombai à la cruelle fièvre. Après un petit nombre de jours de souffrance, après maints jours pleins de délire, de rêves et d'extases dont tu prenais l'expression pour celle de la douleur, pendant que je ne souffrais que de mon impuissance à te détromper, — après quelques jours je fus, comme tu l'as dis, pris par une léthargie sans souffle et sans mouvement, et ceux qui m'entouraient dirent que c'était la Mort.


Mon père, en s'en allant, a donné un demi siècle à mon enfance.
  • (es) Mi padre, al irse, le regaló medio siglo a mi infancia.


Envisager la mort avec calme ne compte que si nous l'envisageons seul. La mort à deux n'est plus la mort, même pour les incrédules.


Je crains pas ça tellment la mort de mes entrailles
et la mort de mon nez et celle de mes os
Je crains pas tellement moi cette moustiquaille
qu'on baptisa Raymond d'un père dit Queneau
[...] Je crains pas cette nuit Je crains pas le sommeil
absolu Ça doit être aussi lourd que le plomb
aussi sec que la lave aussi noir que le ciel
aussi sourd qu'un mendiant bêlant au coin d'un pont

  • « L'instant fatal », Raymond Queneau, dans Anthologie de la poésie française du XXè siècle, Michel Décaudin (Ed.), éd. Gallimard, coll. « Poésie », 1983, p. 448


La seule vraie coupable, c’est la Mort : elle devrait être condamnée pour faux et usage de faux.


Mais dans la mort d'un homme, un monde inconnu meurt, et je me demandais quelles étaient les images qui sombraient avec lui.


Ce qui donne un sens à la vie donne un sens à la mort.


Au contact avec le vivant, rien se semble plus naturel que la mort. Il suffit d'imaginer une forêt où aucune plante ne s'assécherait et où la sève ferait croître indéfiniment les arbres pour se rendre compte de l'utilité de la mort. Si notre planète était peuplée de tous les hommes qui sont nés depuis la préhistoire, elle deviendrait invivable et l'image la plus juste de l'enfer.


Haïr la mort ou la cacher ne sert à rien. Je me méfie de ceux qui veulent vivre comme si l'instant présent pouvait se dilater de manière infinie. Ils se distraient de leur condition mortelle par toutes les ressources de l'illusion afin de repousser loin de leur conscience le dernier des rendez-vous. Celui-ci survient toujours trop tôt, sans qu'ils aient pu se préparer.


La mort est une réalité intrinsèque à la condition humaine. Depuis la première minute de notre existence, elle est aussi présente, palpable et indispensable que l'air que nous respirons. Des nourrissons de trois jours s'éteignent dans un souffle. Leur vie enferme la même énigme que celle d'un vieil homme qui part, entourés des siens. Depuis Buchenwald, j'ai connu beaucoup de jeunes vies fauchées par la guerre. Le mystère de leur passage m'habite toujours.


Plus absurde est la vie, moins supportable la mort.


Ce qu’il y a de bien quand on est mort, c’est que personne ne vous dit que fumer est mauvais pour nous ; le problème, c’est qu’on ne trouve de cigarettes nulle part.
  • L’amour dans une langue morte, Lee Siegel (trad. M.-O. Probst et A. Porte), éd. Philippe Picquier, 2003, p. 387


Craindre la mort, ce n'est rien d'autre en effet, Juges, que de passer pour sage alors qu'on ne l'est point, que de passer en effet pour savoir ce que l'on ne sait pas. Car de la mort, nul n'a de savoir, pas même si ce n'est pas précisément pour l'homme le plus grand des biens ; mais on la craint, comme si l'on savait parfaitement qu'il n'y a pas de plus grand mal ! Et cela, comment n'y pas voir cette ignorance justement qui est répréhensible, celle qui consiste à s'imaginer savoir ce qu'on ne sait pas ?
  • Apologie de Socrate, 29a-b.
  • Apologie de Socrate. Criton. Phédon., Platon (trad. Léon Robin et Joseph Moreau), éd. Gallimard, coll. « Folio », 1968, 29a-b, p. 43


La mort est le moment le plus décisif de la vie humaine. C'est comme notre couronnement : mourir en paix avec Dieu.
La mort peut être quelque chose de beau. C'est comme rentrer à la maison. Celui qui meurt en Dieu rentre chez lui, même si naturellement la personne qui s'en est allée nous manque. Mais c'est quelque chose de beau. Cette personne est de retour à la maison de Dieu.


Comment parler aux hommes ? demandait Saint-Exupéry juste avant d’entrer dans le silence éternel. C’est le tourment de tout homme qui écrit, non pour assembler des mots ni même pour répandre des idées, mais pour partager avec ses frères une vérité et un amour plus vivants en lui que lui-même : où sont les paroles qui atteignent l’être dans sa source, comment trouver les mots qui mènent au-delà des mots ?
Et d’abord, qu’est-ce que l’homme ? Une chose qui pense et qui aime et, en même temps, qui va mourir et qui le sait. Peu importe qu’il s’évertue à l’oublier et qu’il se fasse un bandeau de toutes les apparences : l’œil de l’âme ne s’aveugle pas comme l’œil du corps, et il le sait tout de même. C’est son unique certitude, la seule promesse qui ne faillira point et le paradoxe d’une vie dont la suprême vérité est dans la mort. Nous mourrons, moi qui parle et vous qui m’écoutez – et toute parole entre nous est vaine qui n’a pas d’écho dans cette ultime enceinte de l’âme où règne déjà la mort immortelle. Seule a un sens, parmi le tapage du monde, la voix solitaire qui sait réveiller dans l’homme le Dieu endormi.


Ne pas mourir est un chose. Vivre en est une autre. Nous entrons dans une ère où l'homme cultive et multiplie tous les moyens de ne pas mourir (médecine, confort, assurances, distractions) - tout ce qui permet d'étirer ou de supporter l'existence dans le temps, mais non pas de vivre, car l'unique source de la vrai vie réside au-delà du temps et contient la mort dans son unité. Nous voyons poindre l'aurore douteuse et bâtarde d'une civilisation où le souci stérilisant d'échapper à la mort conduira les hommes à l'oubli de la vie.

  • Notre regard qui manque à la lumière, Gustave Thibon, éd. Fayard, 1970  (ISBN 978-2-213-00296-5), p. 73


Telle qu'un moissonneur, dont l'aveugle faucille
Abat le frais bleuet, comme le dur chardon,
Telle qu'un plomb cruel qui, dans sa course, brille,
Siffle, et, fendant les airs, vous frappe sans pardon

  • La mort
  • Œuvres poétiques, Paul Verlaine, éd. Jean de Bonnot, 1975, t. 7, p. 210, vers 1-4



Plus tard, soit que le sort, l'épargne ou le désigne,
On le verra, bon vieux, barbe blanche, œil terni,
S'éteindre doucement, comme un jour qui finit.

Ou bien, humble héros, martyr de la consigne,
Au fond d'une tranchée obscure ou d'un talus
Rouler, le crâne ouvert par quelque éclat d'obus.

  • L'apollon de Pont-Audemer.
  • Œuvres poétiques, Paul Verlaine, éd. Jean de Bonnot, 1975, t. 7, p. 215, vers 9-14


Vers le milieu de la nuit, seulement, il pensa qu'il allait mourir. Il ne savait pas comment on meurt. Sans doute un homme meurt-il lorsqu'il est prêt à mourir, et il est prêt lorsqu'il est trop malheureux. Ou bien, peut-être, un homme meurt-il lorsqu'il ne lui reste plus rien d'autre à faire. C'est un chemin qu'un homme prend lorsqu'il n'a plus où aller... Mais il ne mourut pas. Son cœur battait, battait toujours. Il n'était pas plus facile de mourir que de vivre.


Anne Calife sous le nom de Anne Colmerauer, La déferlante, 2003

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Je vais y sculpter un bébé mort-né. Si, si ! C’est le meilleur exemple de fusion, de raccourci entre l’agonie et la naissance. Résume toute la condition de l’homme : entre la naissance et la mort, n’est qu’un couloir. Comme celui de mon appartement. Court. Très court…


Anne Calife, Paul et le Chat, 2004

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Quelque chose allait nous tomber dessus. Quelque part entre les branches noires de l’hiver, la mort nous fixait. Le Printemps allait pouvoir commencer.


La mort n'est rien d'autre que le passage à l’horizontale ; rien d’autre que des choses horizontales, toujours horizontales. Moi, je voudrais n’être ni verticale, ni horizontale, j’aimerais juste être oblique.


Amin Maalouf, Origines, 2004

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Les racines s’enfouissent dans le sol, se contorsionnent dans la boue, s’épanouissent dans les ténèbres ; elles retiennent l’arbre captif dès la naissance, et le nourrissent au prix d’un chantage : « Tu te libères, tu meurs ! »
  • Origines, Amin Maalouf, éd. Grasset, 2004, p. 9


Guillaume Musso, Sauve-moi, 2005

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On ne se sent jamais aussi vivant qu’au seuil de la mort.
  • Sauve-moi, Guillaume Musso, éd. Pocket, 2005, p. 38


L’Attentat, 2005
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Ça ne sert à rien de rester ici. Les morts sont morts et finis, quelque part ils ont purgé leurs peines. Quant aux vivants, ce ne sont que des fantômes en avance sur leur heure.


Je ne comprendrai jamais pourquoi les survivants d’un drame se sentent obligés de faire croire qu’ils sont plus à plaindre que ceux qui y ont laissé leur peau.


Quand les rêves sont éconduits, la mort devient l’ultime salut...


Ce que le jour doit à la nuit, 2008
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Le fait de se réveiller le matin relevait du miracle, et la nuit, lorsqu’on s’apprêtait à dormir, on se demandait s’il n’était pas raisonnable de fermer les yeux pour de bon, convaincus d’avoir fait le tour des choses et qu’elles ne valaient pas la peine que l’on s’attardât dessus. Les jours se ressemblaient désespérément ; ils n’apportaient jamais rien, ne faisaient, en partant, que nous déposséder de nos rares illusions qui pendouillaient au bout de notre nez, semblables aux carottes qui font avancer les baudets.
  • Ce que le jour doit à la nuit, Yasmina Khadra, éd. Pocket, 2008, p. 12


L’Olympe des Infortunes, 2010
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[U]n homme est capable d’aller au-delà de la mort et de revenir.
  • L’Olympe des Infortunes, Yasmina Khadra, éd. Julliard, 2010, p. 227


L’équation africaine, 2011
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Lorsque la mort tente de vampiriser jusqu’au dernier recoin de l’esprit, la vie se doit de réagir. Il y va de sa crédibilité [...].


Memento mori [...]. C’est pour se rappeler la mort et mieux s’y préparer !


« Un ascète ne pleure pas », se dit-il en serrant les lèvres. Il eut envie de crier, d’extérioriser sa douleur, mais, craignant que l’écho ne le trahît en répercutant sa voix, il se ravisa. Il ouvrit alors les Évangiles et relut la fameuse phrase de Jésus : « Celui qui croit en moi, quand même il serait mort, vivra. » Sa mère n’était donc pas morte.


Souviens-toi avec quelle sérénité M. de Chasteuil a affronté le départ de sa mère. Victor Hugo, qui a perdu sa fille, disait que « les morts sont des invisibles, mais non des absents ! » Ta maman est toujours présente, même si on ne la voit pas. Prête l’oreille au silence, tu l’entendras...


La mort n’a pas d’âge.


Amin Maalouf, Les désorientés, 2012

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Je ne suis pas certain qu’il faille pardonner à ceux qui meurent. Ce serait trop simple si, au soir de chaque vie humaine, on remettait les compteurs à zéro ; si la cruauté et l’avidité des uns, la compassion et l’abnégation des autres, étaient benoîtement passées par profits et pertes. Ainsi, les meurtriers et leurs victimes, les persécuteurs et les persécutés, se retrouvaient également innocents à l’heure de la mort ? Pas pour moi, en tout cas. L’impunité est, de mon point de vue, aussi perverse que l’injustice ; à vrai dire, ce sont les deux faces d’une même monnaie.


Moi, maintenant, je la vois de si près que j'ai souvent envie d'étendre les bras pour la repousser. Elle couvre la terre et emplit l'espace. Je la découvre partout. Les petites bêtes écrasées sur les routes, les feuilles qui tombent, le poil blanc aperçu dans la barbe d'un ami, me ravagent le cœur et me crient : "La voilà !"
  • Bel-Ami (1885), Guy de Maupassant, éd. Gallimard, 1973  (ISBN 2-07-036865-3), partie 1, chap. 6, p. 169


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